Chapitre 2
Jamais je n'oublierai la peur à l'état pur gravée sur le visage de bon
nombre des nôtres. Jamais je n'oublierai la lueur incandescente des
flammes dansant sur les visages et dévorant tout sur leur passage.
Jamais je n'oublierai l'expression de tristesse sur la face de mes
proches. Jamais je n'oublierai cette douleur envahissante, insoutenable
et atroce, les cris des villageois, ces hurlements de terreur, de haine
et de chagrin. Seule la réconfortante présence de ma sœur me permettait
de continuer à me traîner pitoyablement sur les chemins pierreux,
poussiéreux et désertiques de cette drôle de région. Je me sentais
perdu, confus, déboussolé, sans repaire et surtout coupable. Coupable de
fuir, coupable de ne pas rester au village auprès de mes parents et de
mes amis. Coupable de ne pas pouvoir aider.
Après environ deux heures de marche, nous nous sommes arrêtés sur le
bord d'un sentier longeant un cours d'eau presque asséché pour boire et
nous reposer. Je me souviendrai de ce moment toute ma vie, quand je me
suis penché pour boire, tombant à quatre pattes et contemplant les rares
larmes qui me restaient s'écrasant dans une mince flaque d'eau en
produisant des petits cercles concentriques. L'eau avait un horrible
goût de terre mais à ce moment-là ce fut pour moi une chose délicieuse
après l'âpreté, la cruauté, la douleur et la peur des derniers
événements. Cette eau fut pour moi comme une source de vie, c'est elle
qui m'a permis de sécher mes larmes et d'encaisser à retardement le choc
de devoir partir, fuir ce pays où les hommes n'ont aucun respect pour
les leurs.
Laïaw et moi avons dormi à tour de rôle, sursautant au moindre
bruissement des rares feuilles, au moindre froissement de la végétation
à peine présente, à la moindre caresse du vent.
Nous sommes repartis tôt le lendemain matin et nous nous dirigions vers
un endroit bien précis même si j'ignorai où nous allions. C'est Laïaw
qui me guidait à travers maints sentiers sortis depuis bien longtemps de
la mémoire des hommes. Elle avait entre les mains un petit morceau de
papier, trouvé dans l'une des sacoches avec deux petites lames en os de
fauve et des bouts de défenses d'éléphant.
Après trois jours de marche et de survie, nous nourrissant comme nous
le pouvions nous sommes arrivés devant une grande tente marron, tenue
par des piquets de bois. Un camion à motifs de tâches, façon camouflage,
était stationné à côté. Un homme en descendit et se dirigea vers nous
d'une démarche gauche. Ma sœur m'ordonna de rester à ma place et de ne
rien faire. Elle s'éloigna avec l'homme et ils discutèrent longtemps
ensemble, faisant de grands gestes mais sans élever la voix. Enfin,
l'inconnu vint vers moi et d'un mouvement de la tête m'ordonna de monter
dans le camion. Alors que j'obtempérais, j'aperçus du coin de l'œil ma
sœur lui remettre quelque chose mais je ne vis pas quoi.
A l'intérieur du camion, il faisait une chaleur épouvantable et une
atroce odeur de transpiration planait dans l'air. De nombreuses
personnes étaient serrées les unes contre les autres. Ma sœur me poussa
dans le dos et je finis par aller me serrer vers un groupe de jeunes
garçons sales, déguenillés et aux yeux hagards. Le silence complet qui
m'entourait me déstabilisait et m'effrayait. Un garçon tourna vers moi
un regard vide et un autre me fixa avec froideur. Laïaw prit place à
côté de moi et me sourit d'une manière qui se voulait encourageante.
Le camion se mit soudainement en branle et nous fumes tous projetés en
avant. Des exclamations étouffées retentirent autour de moi. L'endroit
où nous roulions était semé d'embûches et nous fumes ballottés dans tous
les sens pendant une bonne heure. Finalement, le terrain sembla
s'aplanir et la chaleur redoubla à tel point que la tête me tourna. De
la nourriture et de l'eau furent distribuées. Je me jetai sur ma portion
et l'engloutis rapidement avant de boire goulûment l'eau de ma bouteille
sous l'œil estomaqué des garçons d'à côté qui n'avaient pas touché à ce
qui leur avait été donné.
Nous avons roulé pendant longtemps, très longtemps. L'étouffante
chaleur qui régnait dans le véhicule était insoutenable et nous avons
suffoqué durant des heures entières jusqu'à ce que la nuit succède au
jour et le jour à la nuit en un cycle infini et indifférent à notre
sort. Les secondes s'allongèrent et semblèrent durer des heures, le
temps s'étira indéfiniment et les heures s'éternisèrent. Je m'endormais
souvent sur l'épaule de Laïaw lorsque la chaleur se faisait trop
insoutenable. Nous eûmes quelques fois la possibilité de voir le paysage
dans lequel nous évoluions. Nous nous trouvions en plein désert du
Sahara et faisions route en direction de la Libye sous un soleil de
plomb. Laïaw et moi avions pour but de voyager par delà la mer pour
aller en France ou en Italie, loin de notre village, de notre foyer et
de notre famille.
Enfin nous nous sommes arrêtés après des jours de voyage. Un homme nous
fit descendre et nous pria de nous diriger vers la montagne verte de la
Libye, le djebel Akhdar. A la lisière de cette grande forêt, se
trouvaient des rochers, des arbres desséchés et des buissons carbonisés
sous le soleil de plomb. La lumière du jour me blessa les yeux. Je
clignais des yeux, aveuglé par la vive luminosité. Mes membres
engourdis, ankylosés et douloureux mirent du temps avant de se remettre
en état de marche.
C'est avec un homme devant et un homme derrière que notre groupe se mit
en route, passant de la sinistre étendue aveuglante à ce poumon vert
tout de même assez effrayant. Les gens trébuchaient, grognaient de
mécontentement et lançaient des regards prudents tout autour d'eux. Des
mouches venaient nous harceler, les racines des arbres qui sortaient de
terre semblaient vouloir s'opposer à notre passage en nous faisant
glisser. De même, les branches nous griffaient la peau et s'accrochaient
à ce qui restait de nos vêtements comme pour nous retenir en ce lieu
rempli de contrastes.
Salut tout le monde !!!! Voici le second chapitre de "Un périple doux-amer". J'espère qu'il vous à plût ! 😁😄
N'hésitez pas à me donner votre avis, il m'est très précieux !! 🙃😀
nombre des nôtres. Jamais je n'oublierai la lueur incandescente des
flammes dansant sur les visages et dévorant tout sur leur passage.
Jamais je n'oublierai l'expression de tristesse sur la face de mes
proches. Jamais je n'oublierai cette douleur envahissante, insoutenable
et atroce, les cris des villageois, ces hurlements de terreur, de haine
et de chagrin. Seule la réconfortante présence de ma sœur me permettait
de continuer à me traîner pitoyablement sur les chemins pierreux,
poussiéreux et désertiques de cette drôle de région. Je me sentais
perdu, confus, déboussolé, sans repaire et surtout coupable. Coupable de
fuir, coupable de ne pas rester au village auprès de mes parents et de
mes amis. Coupable de ne pas pouvoir aider.
Après environ deux heures de marche, nous nous sommes arrêtés sur le
bord d'un sentier longeant un cours d'eau presque asséché pour boire et
nous reposer. Je me souviendrai de ce moment toute ma vie, quand je me
suis penché pour boire, tombant à quatre pattes et contemplant les rares
larmes qui me restaient s'écrasant dans une mince flaque d'eau en
produisant des petits cercles concentriques. L'eau avait un horrible
goût de terre mais à ce moment-là ce fut pour moi une chose délicieuse
après l'âpreté, la cruauté, la douleur et la peur des derniers
événements. Cette eau fut pour moi comme une source de vie, c'est elle
qui m'a permis de sécher mes larmes et d'encaisser à retardement le choc
de devoir partir, fuir ce pays où les hommes n'ont aucun respect pour
les leurs.
Laïaw et moi avons dormi à tour de rôle, sursautant au moindre
bruissement des rares feuilles, au moindre froissement de la végétation
à peine présente, à la moindre caresse du vent.
Nous sommes repartis tôt le lendemain matin et nous nous dirigions vers
un endroit bien précis même si j'ignorai où nous allions. C'est Laïaw
qui me guidait à travers maints sentiers sortis depuis bien longtemps de
la mémoire des hommes. Elle avait entre les mains un petit morceau de
papier, trouvé dans l'une des sacoches avec deux petites lames en os de
fauve et des bouts de défenses d'éléphant.
Après trois jours de marche et de survie, nous nourrissant comme nous
le pouvions nous sommes arrivés devant une grande tente marron, tenue
par des piquets de bois. Un camion à motifs de tâches, façon camouflage,
était stationné à côté. Un homme en descendit et se dirigea vers nous
d'une démarche gauche. Ma sœur m'ordonna de rester à ma place et de ne
rien faire. Elle s'éloigna avec l'homme et ils discutèrent longtemps
ensemble, faisant de grands gestes mais sans élever la voix. Enfin,
l'inconnu vint vers moi et d'un mouvement de la tête m'ordonna de monter
dans le camion. Alors que j'obtempérais, j'aperçus du coin de l'œil ma
sœur lui remettre quelque chose mais je ne vis pas quoi.
A l'intérieur du camion, il faisait une chaleur épouvantable et une
atroce odeur de transpiration planait dans l'air. De nombreuses
personnes étaient serrées les unes contre les autres. Ma sœur me poussa
dans le dos et je finis par aller me serrer vers un groupe de jeunes
garçons sales, déguenillés et aux yeux hagards. Le silence complet qui
m'entourait me déstabilisait et m'effrayait. Un garçon tourna vers moi
un regard vide et un autre me fixa avec froideur. Laïaw prit place à
côté de moi et me sourit d'une manière qui se voulait encourageante.
Le camion se mit soudainement en branle et nous fumes tous projetés en
avant. Des exclamations étouffées retentirent autour de moi. L'endroit
où nous roulions était semé d'embûches et nous fumes ballottés dans tous
les sens pendant une bonne heure. Finalement, le terrain sembla
s'aplanir et la chaleur redoubla à tel point que la tête me tourna. De
la nourriture et de l'eau furent distribuées. Je me jetai sur ma portion
et l'engloutis rapidement avant de boire goulûment l'eau de ma bouteille
sous l'œil estomaqué des garçons d'à côté qui n'avaient pas touché à ce
qui leur avait été donné.
Nous avons roulé pendant longtemps, très longtemps. L'étouffante
chaleur qui régnait dans le véhicule était insoutenable et nous avons
suffoqué durant des heures entières jusqu'à ce que la nuit succède au
jour et le jour à la nuit en un cycle infini et indifférent à notre
sort. Les secondes s'allongèrent et semblèrent durer des heures, le
temps s'étira indéfiniment et les heures s'éternisèrent. Je m'endormais
souvent sur l'épaule de Laïaw lorsque la chaleur se faisait trop
insoutenable. Nous eûmes quelques fois la possibilité de voir le paysage
dans lequel nous évoluions. Nous nous trouvions en plein désert du
Sahara et faisions route en direction de la Libye sous un soleil de
plomb. Laïaw et moi avions pour but de voyager par delà la mer pour
aller en France ou en Italie, loin de notre village, de notre foyer et
de notre famille.
Enfin nous nous sommes arrêtés après des jours de voyage. Un homme nous
fit descendre et nous pria de nous diriger vers la montagne verte de la
Libye, le djebel Akhdar. A la lisière de cette grande forêt, se
trouvaient des rochers, des arbres desséchés et des buissons carbonisés
sous le soleil de plomb. La lumière du jour me blessa les yeux. Je
clignais des yeux, aveuglé par la vive luminosité. Mes membres
engourdis, ankylosés et douloureux mirent du temps avant de se remettre
en état de marche.
C'est avec un homme devant et un homme derrière que notre groupe se mit
en route, passant de la sinistre étendue aveuglante à ce poumon vert
tout de même assez effrayant. Les gens trébuchaient, grognaient de
mécontentement et lançaient des regards prudents tout autour d'eux. Des
mouches venaient nous harceler, les racines des arbres qui sortaient de
terre semblaient vouloir s'opposer à notre passage en nous faisant
glisser. De même, les branches nous griffaient la peau et s'accrochaient
à ce qui restait de nos vêtements comme pour nous retenir en ce lieu
rempli de contrastes.
Salut tout le monde !!!! Voici le second chapitre de "Un périple doux-amer". J'espère qu'il vous à plût ! 😁😄
N'hésitez pas à me donner votre avis, il m'est très précieux !! 🙃😀
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Chapitre 2
Toujours aussi merveilleusement bien écrit ! ❤🥰 bravo ! J'adore ! 😍🤩❤
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2020-11-09 19:22:19
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