Prologue : L'hécatombe
Chapitre 1 : Un duo fusionnel
Chapitre 2 : Une rencontre inespérée
Chapitre 2 : Une rencontre inespérée
Cléya se réveilla en sursaut, sentant son corps se faire secouer légèrement. Ses yeux s'ouvrirent rapidement sur une énorme truffe qui lui faisait face, rapidement sa vision fût obscurcie par une énorme masse qui s'abattit sur son visage. La langue râpeuse d'Écho lui laboura le visage, le trempant de salive par la même occasion. C'était quelque peu douloureux, mais cela lui permit de se rendre compte qu'elle tremblait de peur, que sa peau était recouverte de sueur par endroits et que son cœur semblait galoper à une allure phénoménale. La jeune fille venait de refaire le même cauchemar qu'elle endurait chaque fois qu'elle s'endormait, ces événements l'avaient profondément marqués, s'accrochant à elle comme à une bouée de sauvetage. Son compagnon l'en avait tiré à sa manière, plus exactement à son échelle et ses deux grand yeux dorés la dévisageaient à présent tendrement.

Cléya lui sourit doucement tout en le gratifiant d'une petite caresse sur la joue. Son compère était toujours là pour elle, pour la sortir de ces mauvais moments. Il lui arrivait même de se demander si le Tarkaïns ne ressentait pas ses émotions aussi distinctement qu'elle au vu de ses réactions semblables à celles humaines. Le félidé sembla satisfait de voir le visage de la jeune fille reprendre des couleurs et il s'écarta quelque peu pour la libérée. À première vue, on n'aurait jamais pu deviner qu'une humaine était lovée au creux de son ventre lorsqu'il était couché en boule tant sa taille était imposante. Chaque soir, il formait ce bouclier protecteur autour d'elle pour la réchauffer lors des nuits froides et humides. Cléya se redressa et s'étira quelque peu, afin de réveiller ses muscles endoloris.

- Ça fait longtemps que l'on n'a pas trouvé d'indication. Je commence à me demander si ce camp de réfugiés existe réellement... Marmonna-t-elle en baillant à demi. On peu très bien s'être légèrement décalé, ne serait-ce que pour se battre ou fuir et les louper. Des coordonnées auraient été bien plus simples, encore faudrait-il avoir une carte à la même échelle... Soupira-t-elle.

Écho, du bout de sa truffe légèrement humide, lui donna un petit coup sur l'épaule qui se voulait réconfortant, mais qui manqua de peu de la faire tomber. Elle décrocha cependant un grand sourire, ayant aisément compris ses intentions.

- Tu as raison, rien ne sert de s'en faire, car on a rien à perdre ! S'exclama-t-elle en récupérant son sac à dos, poser vulgairement contre une paroi de la grotte.

Écho agita légèrement ses oreilles, comme pour appuyer ses propos tout en se relevant, il s'ébroua et s'étendit tel un chat en avançant petit à petit ses pattes avants et en courbant le dos. L'adolescente renversa une gourde d'eau sur le feu, qui avait servi à cuire le gibier fraîchement chassé de la veille, pour l'éteindre complètement car celui-ci fumait encore. Inutile de prendre le risque de créer un feu de forêt.

Elle s'engouffra dans la sortie de la grotte, ses deux gourdes vides à la main. À peine eut-elle posé un pied dehors, qu'une douce brise lui fit s'envoler ses longs cheveux sur le côté, arrivant sur la truffe d'Écho qui ne put qu'éternuer. Cléya grignota un morceau de lapin qu'elle n'avait pas finis la veille tandis que deux iris dorés se firent attendrissants, espérant en avoir également. Elle leva les yeux au ciel, excédée, accompagnée d'un léger sourire en coin.

- Aller, t'as gagner, capitula-t-elle en lui envoyant le reste de son repas, qui fut intercepter d'un bond et avaler tout aussi rapidement.

Arrivée au lit de la rivière, la jeune femme s'accroupit pour remplir ses gourdes d'eau tandis qu'Echo se pencha pour laper un peu d'eau fraîche. Ses prunelles se posèrent doucement sur la bipède d'une lueur espiègle alors qu'il approchait sa tête d'elle silencieusement.

- N'y penses même pas ! Le réprimanda-t-elle en devinait très clairement ce qu'il avait en tête.

Un plongeon ne la tentait pas vraiment alors qu'il faisait encore trop frais à son goût. Le Tarkaïns fit comme s'y de rien n'était et continua à boire. S'il avait fait la taille, ne serait-ce que d'un loup, elle ne se serait aucunement gênée pour le pousser, mais au vu de son gabarit elle n'en avais aucune chance.
Les gourdes remplies, l'adolescente les rangea à nouveau dans son sac en veillant à les tenir écartés de la petite poche intérieure, craignant pour son contenu.

Quand le soleil eut atteint son paroxysme, les deux compères rencontrèrent une route bétonnée à demi détruite. Des blocs de béton étaient parfois complètement relevés de quelques centimètres du sol. Quelques racines et plantes y avaient élu domicile, brisant le béton pour subsister. Un vieux panneau attira l'attention de Cléya, il était tombé au sol tandis que le poteau sur lequel il avait dû être fixé se tenait encore droit, bien que du lierre s'était enroulé tout autour. La jeune fille redressa le panneau et passa sa main sur la surface boueuse dans l'espoir de faire apparaître les lettres inscrites, elle put y deviner : "Bienvenue à Nagatika". Ses iris verts se posèrent un instant sur la créature rousse sombre, comme pour l'interroger silencieusement, mais bien vite elle reporta son attention sur le petit village. Cléya se décida finalement à y pénétrer, après tout elle pouvait très bien y trouver quelque chose d'intéressant.

Le petit village, dominant la clairière, ne ressemblait probablement plus à ce qu'il était il y a quelques années. La plupart des bâtiments laissés à l'abandon étaient recouverts de lierre et autres plantes grimpantes qui couraient sur les murs. Entre les tuiles, de la mousse s'y était installer ainsi que quelques petites touffes d'herbes. Pour nombre d'entres elles, leur façade était à demi-effondré, soit par le poids de la végétation, soit par les créatures, devina facilement Cléya. Quelques étalages de petits commerçants étaient effondrés et pour certains piétinés, sous les restes des décombres de l'un d'eux, elle y devina une silhouette à demi-osseuse. Son cœur ne put s'empêcher de se serrer dans sa poitrine, afin d'essayer de penser à autre chose, elle reporta son attention sur les petites maisons. La plupart d'entre elles ressemblaient à des chalets constituées de bois aux fondations en pierres, plus résistantes aux inondations et d'une cheminée surplombant un toit triangulaire. Sur les volets, qui étaient encore accrochés sur les rares habitations indemnes, la jeune fille y découvrit de fines gravures élégantes ou elle devinait pour certain qu'il s'agissait de runes.

Cléya se décida à rentrer dans l'une des maisons qui semblait a priorité indemne. Elle ne désirait pas prendre le risque que le tout s'effondre sur elle. L'adolescente poussa du bout de ses doigts la porte en bois sculptée ou une petite partie était composée de verre, salit par le temps si bien qu'il était impossible de voir au travers. Cette dernière émit un étrange bruit, les gonds de la porte avaient sans doute dû céder car elle pencha dangereusement jusqu'as tombé sur le sol dans un bruit d'éclat de verre, faisant s'envoler par la même occasion un petit nuage de poussière.

- Oups...

Elle dut se résoudre à enjamber la structure rectiligne, en évitant les morceaux tranchants, pour entrer dans le bâtiment. Écho, sur ses talons, n'améliora pas l'entrée, car il força pour que ses larges épaules puissent passer tout en se baissant. Cette mise en scène eut pour effet d'enfoncer complètement le cadre de porte et une partie de la façade.
L'habitation était sombre, les faibles rayons du soleil semblaient se démener dans l'espoir d'illuminer l'habitacle, cherchant à laisser une douche chaleur sous les portes ou entre les fins passages des volets.

Cléya déambulait à tâtons dans l'espoir de trouver une fenêtre, les ombres des meubles se détachaient presque imperceptiblement de l'obscurité tandis que le Félidé, de sa silhouette trapue, s'ajoutait à l'aspect sombre de la bâtisse en dissimulant la faible lumière qui tentait de pénétrer à l'intérieur par l'ouverture récemment apparue. La jeune femme manqua de trébucher sur un petit cheval a bascule, trônant au milieu du passage comme pour inviter un enfant à l'enfourcher et à galoper loin de cet enfer, dans un monde plus coloré, plus accueillant, plus utopique. Vers un endroit où les rires fusent à chaque coin, ou la joie teinte les visages et ou le malheur est chasser par les sourires. Ses prunelles vertes étaient posées avec mélancolie sur cet objet, enviant l'enfant innocente qu'elle avait pus être il y a quelques années, loin du malheur. Commençant à s'acclimater à l'obscurité omniprésente, une fenêtre se détacha du décor et elle ne perdis pas de temps pour aller l'ouvrir tandis que son pied butta sur un petit train de bois, les wagons se détachant les uns des autres à la manière des êtres que cette funèbre apocalypse a séparer.

- On y voit de suite plus clair, commenta l'adolescente après avoir actionné la poignée et ouvert les volets, laissant entrer la douce chaleur.

Cléya ne perdit pas de temps pour fouiller la petite maisonnette en commençant par les chambres, son vieux pull gris a capuche déchirer de toutes part et son jean tacher de sang n'étaient clairement pas l'idéale. En ouvrant l'une des commodes près du lit elle découvrit des vêtements à peu près à sa taille qui feraient bien l'affaire, après tout cette famille n'en avait plus besoin, autant qu'ils servent. Une fois changée, elle rejoignit Écho qui semblait passer les odeurs de l'habitacle au peigne fin. La jeune femme dénicha sur le vieux bureau en pagaille des piles de dossiers, parmi eux, un petit rouleau qui se détachait du lot attira son attention. Elle s'empressa de s'en emparer et de dérouler le papier à demi-plastifié, dévoilant une carte du district de Lëonā.

- Écho ! L'appela-t-elle. J'ai trouvé une carte ! S'exclama-t-elle en dégageant tous les documents du bureau afin de faire de la place.

Le Tarkaïns arriva vers elle en quelques bonds, affaissant considérablement le vieux parquet sombre sous son poids. Une lueur d'enthousiasme dansant dans ses prunelles bien qu'il n'avait aucune idée de l'utilité de cet objet. Tant que sa partenaire était contente, alors il le serait également. L'état émotionnel de l'humaine influait énormément sur celui de son compagnon à quatre pattes.

La brunette aux reflets roux étala cette dernière sur la surface du bois et chercha du bout du doigt la fameuse ville où ils se trouvaient. Rapidement, les lettres composant Nagatika attirèrent ses iris tandis qu'elle remarquait qu'elle se trouverait dans le secteur 7. Cléya replaça machinalement l'une de ses mèches derrière son oreille tandis qu'elle réalisait tout le chemin qu'elle avait parcourut, n'en revenant pas. Dire qu'au début de tout ça elle n'était pas seule, Écho était une présence rassurante et apaisante, mais son contact différait de ses semblables. Cela faisait si longtemps qu'elle n'avait pas eu de discutions avec une personne, en y repensant elle ne serait même pas comment engager la conversation. L'adolescente se forçait à parler à son acolyte même lorsque que ce n'était pas forcement nécessaire, cela revendrait à parler toute seule pour beaucoup, mais peu lui importait, cette manière d'agir l'empêchait de devenir folle et de sombrer dans le vide qui l'appelait inexorablement.

Enroulant sa trouvaille à nouveau afin de la ranger soigneusement dans son sac à dos, tout en se dirigeant vers la sortie, un porte-couteau dans la cuisine attira son attention. En s'approchant de plus près elle saisit l'un des couteaux et, jugeant la lame trop petite, la reposa afin de saisir le plus gros, probablement un couteau afin de découper la viande à même la carcasse. Cléya le sous-pesa et le fit légèrement tournoyer entre ses doigts, il ferait bien l'affaire. Le duo fouilla comme cela d'autres bâtiments, mais n'y rien d'intéressent à emporter, étant donné qu'ils voyageaient sans cesse, il fallait être le plus léger possible. Alors que l'adolescente parvint à dénicher une vielle boîte de conserve, bien qu'elle ne serait guère étonnée s'il était poussé des poils à l'aliment le contenant étant donné l'aspect de la boite, des grognements retentirent bruyamment, faisant légèrement vibrer les murs.

- Chut, murmura-t-elle presque inaudible à l'intention d'Écho, croisant secrètement les doigts que le vent couvrirait ses paroles à leurs ennemis.

Le duo ne bougeait plus, désirant se faire le plus discret possible, dissimuler derrière les grands rayons d'un vieux hangar. Le rideau métallique était à demi-ouvert et cabossé, comme si un Tarkaïns avait tenté de se glisser dessous en se relevant trop tôt, ce qui évidemment a permis à Écho de passer sans encombre. Cléya se positionna sur la pointe des pieds pour espérer regarder au-dehors, par la minuscule fenêtre, bien plus longue que large, protégée par des barreaux. Ne l'atteignant pas, elle dut se résoudre à passer discrètement la tête à l'extérieur du bâtiment afin de localiser leur imprévu. Sans plus tarder une seconde tête apparut derrière la petite, bien plus grosse et bien moins discrète. Rapidement, une main se plaça sur la truffe d'Écho en y effectuant une légère pression pour lui intimer l'ordre de reculer. Le félidé ne manqua pas de relever l'amusement de sa coéquipière qui, certes levait les yeux au ciel, l'air dépitée, mais qui possédait ce petit éclat d'amusement dans les yeux.

La jeune femme finit par apercevoir la silhouette d'un énorme Tarkaïns gris sombre, rayer de noir et aux quelques taches de la même couleur. Il était massif et, du peu qu'elle l'ait entre vue, ses canines étaient considérables, au ton blanc presque jaunâtre, d'ont l'une d'elles avait l'extrémité cassée. La créature était sans aucun doute bien plus âgée que son compagnon, et par conséquent bien plus expérimenté. Il ne falait pas prendre de trop gros risques.

Une idée lui traversa l'esprit, similaire à une évidence. C'était risqué, mais toujours moins que d'attendre que la bête les trouvent, d'autant plus que rien ne masquait leurs odeurs. Dégainant son poignard et son couteau de cuisine qu'elle avait récupéré antérieurement, Cléya fit un signe de la main à Écho. Celui-ci partis immédiatement vers la gauche, se glissant avec aisance sous le rideau métallique et disparaissant derrière les maisons de la rue d'en face. L'adolescente sortis également de l'entrée et bifurqua sur la droite, longeant les murs. Ils comptaient prendre en embuscade leur ennemi, Écho faisant diversion devant et Cléya lançant l'assaut par-derrière.

Arrivée à son niveau, l'adolescente attendit le signal de son partenaire qui ne tarda pas à arriver. Le rouquin émergea d'un côté d'une habitation en grognant, portant l'attention du Tarkaïns sur lui. La brunette aux reflets roux se précipita derrière la bête, le poignard dans la main gauche et le couteau dans la seconde, elle le lacéra de coups de couteaux aux pattes postérieures, visant les tendons de la cible. La créature hurla et fit volte face, malgré ses postérieurs qui peinaient à le maintenir debout. Dans ses yeux dansait un éclat de folie meurtrier, Cléya se jeta sur le côté les bras tendus puis elle enroula son corps sur lui-même afin d'éviter une violente morsure. Elle reprit appui sur ses pieds, mais n'eut pas le temps de se relever, elle était nez à truffe avec l'assaillant. Un éclat de terreur passa dans ses yeux tandis que par réflexe elle envoya adroitement le couteau de boucher dans la gorge du félidé alors qu'il ouvrait la gueule pour lui séparer la tête de son corps. L'ennemi poussa un cri de douleur alors qu'un filet de sang s'échappait entre ses crocs, Écho en profita pour lui sauter dessus, en se cramponnant à l'aide de ses griffes. Puis, d'un geste sec, il lui brisa la nuque qu'il maintenait par la gueule. S'en était fini pour lui, la créature s'effondra sur le sol, inerte.

Cléya se redressa et fut assaillit d'une langue râpeuse qui vint s'écraser sur sa joue, elle ne put s'empêcher de rire légèrement à cette attention, bien qu'elle était légèrement douloureuse. En guise de remerciement, elle passa sa main sous le menton poilu de son coéquipier et le grattouilla, des ronronnements ne tardèrent pas à l'envelopper d'un cocon chaleureux.

- On forme une bonne équipe tous les deux, tu ne penses pas ? Le questionna-t-elle de manière rhétorique, sachant pertinemment qu'elle n'obtiendrait aucune réponse de sa part.

Les ronronnements se firent plus fort suite à ses paroles, ce qui lui décrocha un sourire. Inutile de parler la même langue pour se comprendre.

Le duo s'était à nouveau renfoncé dans la forêt depuis maintenant plusieurs heures, au vu de la déclinaison de l'astre brûlant à quelques centaines de milliers de kilomètres. Un bruissement de feuille près d'un gros buisson sortit Cléya de ses réflexions qui, par réflexe, dégaina sa dague tandis qu'Écho se tendit sur ses pattes en position d'attaque et retroussa ses énormes babines d'un air menaçant.

- N'attaque que quand je te le dirai, chuchota la jeune femme.

Le félin huma l'air, dressa les oreilles et se jeta d'un bon dans le buisson, faisant presque imperceptiblement trembler le sol de part son poids.

- Écho ! Ça t'arrive de m'écouter des fois ? Le réprimanda-t-elle tandis qu'elle se trouvait sur le qui-vive.

Celui-ci en ressortit avec un oiseau entre les crocs, que la brunette aux reflets roux reconnus être une buse. Le volant semblait minuscule face à son prédateur si colossal. La bête aux yeux d'or déposa sa prise sur le sol terreux au pied de son amie et redressa lentement son regard vers elle, ses pupilles étaient dilatés et ses oreilles coucher presque honteusement le long de sa fourrure.

- Mais non, je ne t'en veux pas, le rassura-t-elle en un sourire.

Le regard du Tarkaïns passa de la tristesse au bonheur en une fraction de seconde. Ce dernier poussa l'animal plumé un peu plus près de Cléya, comme pour l'inviter à se servir en premier. Un geste qui, de par sa simplicité, témoignait pourtant de la confiance et du respect que la créature lui attribuait, elle était son repère, elle était tout pour ces grands yeux dorés.

L'adolescente refusa cependant l'offre doucement d'un léger hochement de tête négatif. Cela ne démordis pas Écho de ses convictions qui, d'un geste adroit, arracha une patte de son gibier et la déposa au creux de sa main avant d'attaquer son repas.

- Une vraie tête de mule, soupira-t-elle en levant les yeux vers la surface bleutée. Très bien... Je la mangerais...

Le rouquin redressa vivement la tête, un morceau de plume s'était collé à sa truffe, l'air interloqué.

- ... Ce soir, quand elle sera cuite, ajouta-t-elle en pouffant légèrement face à la situation.

Il inclina la tête légèrement de côté, l'air de ne pas comprendre ce qui l'amusait. N'obtenant pas de réponse, il reporta bien vite son attention sur la buse qu'il s'empressa de terminer, tout affamé qu'il était.

Tout en reprenant leur chemin, Cléya laissa divaguer son esprit, fatale erreur au vu des démons qui la tourmentait.

- Cléya, ta garde ! La réprimanda une voix grave qu'elle connaissant entre mille.

Ses yeux verts fatigués, sous lesquels se dessinait des poches bleutés, se posèrent sur ceux de la même couleur, mais plus foncés de son frère. Ses cheveux châtains clair plus court sur les côtés et plus long sur le dessus étaient complètement en bataille.

- Eliel... Soupira l'adolescente, tu m'expliques pourquoi tu tiens absolument à m'entraîner à me battre contre des gens ?

Le garçon, bien plus grand qu'elle, lui envoya son poing gauche dans la direction du visage de sa petite sœur. Cette dernière se décala vivement de côté afin d'éviter le coup et ne put s'empêcher d'être satisfaite d'y être parvenus. Son sourire, qui commençait à s'étirer, se transforma bien vite en une affreuse grimace de douleur. Le poing droit d'Eliel venait d'atterrir dans son ventre.

- J'ai deux mains, ne l'oublie pas, lui conseilla ce dernier.

Cléya se mit à pester et a positionner un bras près de son ventre, comme si ce geste allait atténuer la douleur.

- Pourquoi tu fais comme si de rien n'était !? Papa et maman sont morts ! Des ... Je ne sais même plus comment ça s'appelle, trainent dans le coin ! Et toi, tu ne trouves rien de mieux à faire que de te battre avec moi !? S'énerva-t-elle.

- Miss Wester, calme toi, la taquina-t-il légèrement en utilisant leur nom de famille comme appellation.

- Comment veux-tu que je me calme avec tout ce qui arrive ? On risque de se faire bouffer n'importe quand, et toi, tu veux m'apprendre une espèce de self-defence. Mais à quoi ça va me servir ? Je ne vais pas faire une prise à ces espèces de géants félins ! Gronda-t-elle.

Le jeune homme s'approcha de sa sœur et posa sa main sur son épaule d'un air réconfortant. Il sait, il sait ce qu'elle ressent. Ce geste fit légèrement monter des larmes aux yeux de l'adolescente alors qu'elle plongea ses iris dans celles vertes sombres de son seul repère.

- Les Tarkaïns ne sont pas la seule menace p'tite sœur, n'oublie pas les gens. Ce n'est pas un monde qui s'écroule qui fera changer la nature humaine.

La brunette aux reflex roux renifla légèrement et se blottit dans les bras de son frère tandis qu'un couinement retentis. Onora venait de se faire piquer la truffe par un hérisson.

- Ils me manquent tellement... Murmura faiblement la jeune fille.

Eliel caressa tendrement les cheveux de sa sœur, le cœur serré. Il connaissait ce vide qui devenait de plus en plus grand chaque jour et que jamais rien ne pourrait combler. Lui aussi avait envie de s'effondrer en larmes, mais il se devait d'être l'épaule sur laquelle la jeune fille devait pouvoir s'appuyer. Il devait être fort pour elle, et lui enseigner tout ce qu'il pouvait tant qu'il respirait encore.

- À moi aussi Cléya, à moi aussi... Mais n'oublie pas qu'ils sont mort, on ne peu plus rien pour eux. Les vivants par contre, ont besoin de nous.

À ce douloureux souvenir, une larme coula le long de la joue de la jeune fille pour finir au coin de sa bouche, le goût familièrement salé se répendit sur ses lèvres. Elle pensait à sa famille chaque jour sans exceptions, la douleur de leur perte ne faisait que creuser son cœur un peu plus chaque jour, l'amenant inexorablement au bord du précipice. Ce cercle sans fin ne finissait jamais, impossible pour elle de faire son deuil. Toutes ses techniques de survie et de défense lui venaient de son frère, ils s'entraînaient chaque jour pour ne pas perdre la technique, mais au fil du temps les Tarkaïns se faisaient de plus en plus nombreux et les séances d'entraînement diminuaient à vus d'œil. Dans un sens, Cléya était rassurée que ses parents soient morts le premier jour, ils n'avaient pas eu à vivre dans cet enfer où chacune des personnes auxquelles tu t'attaches finit par t'être arraché. La mort n'était pas si douloureuse pour ceux qui l'étaient, mais bien plus pour ceux qui ne l'étaient pas et qui devait continuer à avancer.

Un cri perçant retentit dans le silence de la forêt, pas un grognement, ni un piaillement, mais un cri. Le hurlement d'un humain sûrement en danger. La jeune femme sauta sur Écho et ce dernier fila tel une flèche dans cette direction. Il avait aisément deviné les intentions de sa partenaire et n'allait pas la décevoir. Le vent siffla dans leurs oreilles et fouetta leur visage, les enjambées d'Écho étaient si grandes que Cléya avait l'impression qu'il volait entre chaque foulée.

Arrivés sur les lieux, une scène d'horreur se déroulait face à eux et rappelait à l'adolescente de soir la, trois ans plus tôt. L'odeur âcre du sang était omniprésente et prenait jusqu'aux tripes. Des corps étaient étendus sur le sol, au vu de la longueur des cheveux elle y devina deux femmes, d'ont l'une d'elles tenais près d'elle un bébé de quelques mois, ainsi que quatre hommes. Les silhouettes étaient inertes, du sang parsemant le sol de toute part, ne laissant presque aucune couleur verte. Certains des corps étaient démembrés, un bras arracher se trouvait non loin du duo. Cléya sentit un haut-le-cœur parvenir jusqu'à sa gorge et manqua de peu de vomir. Son regard ne s'attarda pas sur les quatre Tarkaïns étendus baignant dans leur sang au sol, mais bel est bien sur celui encore en vie.

L'énorme bête tout en muscles se dressait devant une enfant, que la jeune femme estima avoir à peu près 7 ans. La petite était toute maigrichonne et remplie de blessures pour la plus part superficielles à priori, dans sa petite main se tenait un couteau ensanglanté, elle luttait comme elle pouvais. Cléya sauta du dos d'Écho tout en dégainant sa dague.

- Reste là, tu risques de lui faire peur ! Le préviens-t-elle. Et ce n'est pas négociable ! Ajouta-t-elle devinant aisément son coéquipier n'en faire qu'as sa tête et tenter de la suivre.

L'enfant fit une roulade pour éviter les crocs acérés de la créature et se retrouva sous son ventre, elle en profita pour le lacérer en enfonçant la lame le plus en profondeur possible. La bête lâcha un hurlement de fureur à demi-plaintif tout en essayant d'atteindre la petite. Cléya profita de ce mouvement d'inattention de la part du félidé pour lui sauter sur le dos. Elle se cramponna, puis se pencha sur le côté pour atteindre sa gorge qu'elle trancha, consciente que son arme ne faisait pas assez de dégâts, elle trancha à nouveau dans l'ouverture. La créature voulut pousser un cri plaintif, mais il se noyait dans son propre sang, le liquide remplis ses poumons rapidement et il s'effondra sur le sol. Le corps massif fut parsemé de tremblements avant de se calmer tandis que ses yeux devinrent vitreux.

La brunette au reflet roux s'extirpa difficilement du Tarkaïns, qui était coucher sur sa jambe. Tirant le plus possible pour se dégager, pivotant un coup d'un côté et un coup de l'autre pour faciliter son travail. Un sentiment de peur lui tenaillait le ventre tandis qu'elle songea au fait que la petite n'avait peut-être pas eu le temps de s'éloigner et qu'elle était possiblement écrasée sous la bête. Son angoisse s'apaisa bien rapidement quand elle la remarqua près du Tarkaïns, assise, les jambes au niveau du ventre et ses bras les enserrant. Elle se trouvait dos à Cléya, mais cela ne l'empêcha pas de remarquer qu'elle se berçait d'un léger mouvement de bascule.

La jeune fille s'approcha doucement d'elle et voulut déposer une main rassurante sur son épaule, comme son frère savait si bien le faire, mais cela n'eut pas l'effet escompté. La fillette se dressa d'un bond, et pivota légèrement pour faire face à sa potentielle menace, sa petite main fermement encrée sur sa lame. Cléya remarqua qu'elle possédait de beaux yeux bleu clair, rappelant celui du ciel, bien qu'ils étaient brouillés de larmes, à demi-caché par une mèche sombre. Ses cheveux aussi noirs que l'ébène étaient regrouper en une natte de côté attachée avec un petit ruban violet. Deux petites barrettes de la femme couleur retenaient ses mèches, un gilet violet abîmer la recouvrait tandis qu'une petite jupe bleue sombre recouvrait une partie de ses jambes. D'un geste lent, la petite essuya ses larmes sur le creux de son coude tandis qu'elle semblait détailler également l'adolescente de ses petits yeux emplis de douleur. Quand les sanglots de la petite finirent par se calmer, Cléya s'accroupit face à elle doucement.

- C'est fini ... Tout va bien ... Tenta-t-elle de la rassurer.

La fillette lâcha soudainement son couteau et courut dans les bras de son aînée, pleurant chaudement contre elle. La jeune femme passa ses mains dans le dos de la petite et y fit de petits cercles pour tenter de l'apaiser, tout en ignorant les mains froides de l'enfant enlacées autour de son cou qui étaient glacées. Elles restèrent un moment comme cela, jusqu'as ce que la petite se détache d'elle.

- Moi c'est Cléya, et toi ma belle ? Demanda-t-elle d'une voix calme et douce, ne voulant pas la brusquer.

L'enfant ouvra la bouche pour lui répondre, mais n'y parvint pas, aucun son ne voulait sortir de sa gorge, comme bloquer quelque chose qui lui échappait. Son petit visage se peignit d'une sérieuse inquiétude et ses yeux bleus cherchaient un point d'accroche, complètement affolés. Cléya songea au fait que ce à quoi vient d'être exposé cette petite a très bien pu la traumatiser au point qu'elle ne parvienne plus à parler. C'était tout a fais possible, aucune enfant de son âge ne devrait a avoir à vivre dans un monde pareil, ni quiconque. Ce n'était pas une vie, c'était de la survie.

L'adolescente se redressa et s'éloigna de la petite, le regard posé sur le sol. Elle trouva rapidement l'objet de sa conviction, qui n'était d'autre qu'un bâton. À l'aide de ce dernier, elle écarta les feuilles au sol, dévoilant la terre battue.

- Dis-moi, tu te sens capable d'écrire ton prénom, princesse ? Lui demanda-t-elle avec douceur.

Pour toute réponse, la petite hocha la tête positivement de haut en bas tout en posant ses iris toujours voilés de tristesse vers son aînée, quelque peu curieuse.

- Alors tu vois ce bout de bois ? C'est comme un stylo, on peu écrire avec, regarde. Accompagnant les gestes à la parole elle inscrit son nom sur la terre battue puis tendis le bâton à la petite. À ton tour, proposa-t-elle.

La fillette aux cheveux ébène saisit le bâton sans ses petites mains et commença à écrire en lettres scriptes. Rapidement, le prénom fut lisible et un léger sourire émergea du visage de Cléya.

- Tamy est un très joli prénom, ma puce. Veux-tu rester avec moi ? Lui proposa l'adolescente, elle n'allait quand même pas la laisser ici toute seule, mais ne pouvais pas l'emmener de force non plus.

Tamy se tourna vers son groupe, qui a présent baignait dans son sang, une larme coula sur sa joue alors qu'elle reporta son attention sur son aînée. Timidement, elle hocha la tête. Ma jeune femme lui fit un tendre sourire et lui proposa sa main, que la petite accepta rapidement.

- Je dois te présenter un ami, ne t'inquiète pas, il n'est pas méchant, la rassura-t-elle d'une voix douce. Écho ! L'appela-t-elle.

Le rouquin détala comme une furie et sauta sur Cléya, il semblait rassurer qu'elle n'ait rien mise à part d'évidents futurs bleus au niveau de la jambe auparavant écrasée. La petite Tamy prit peur en s'apercevant que le fameux ami était en réalité un Tarkaïns et sortit son couteau, prête à se battre à nouveau.

- N'aie pas peur, il est gentil. Je l'ai appelé Écho, c'est un vieil ami à moi, on a grandi ensemble, tenta-t-elle de ma rassurer en levant légèrement la main à la verticale.

La fillette hésita longuement avant de ranger son couteau et d'agripper le bras gauche de Cléya, se cachant derrière elle pour éviter la créature.

Il faut croire que les âmes brisées s'attirent et, quand elles se rencontrent, se répares mutuellement.

~Era
© Era ,
книга «Invasion Tarkaïns».
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