Chapitre deux
Pdv Warner
Je balaie du regard les photos accrochées à mon miroir. Elles sont à mon image : parfaitement droites et alignées, et séparées en plusieurs groupes qui ne sont pas l'oeuvre du hasard. Je me concentre sur l'une d'elles, qui représente un jeune garçon aveugle. Je dois le rencontrer aujourd'hui. J'inspire profondément. Je ne dois pas défaillir. Ce n'est pas parce qu'il est privé de vue qu'il est inoffensif. En tout cas, sa famille ne l'est pas.
Je vérifie d'un rapide coup d'œil la propreté de ma chambre avant de sortir. Je n'aime pas le désordre. Les quelques agents que je croise dans les couloirs me saluent avec respect. Ils ne sont pas nombreux : il n'est que six heures trente. Pourtant, je ne trouve pas qu'il est tôt. Il n'y a pas une heure qui passe sans que notre métier de révèle être utile. Il y a beaucoup de personnes malveillantes. Nous ne sommes pas de simples agents pour la justice. Nous, nous nous sacrifions chaque seconde. Parce qu'on ne s'occupe pas des simples délits.
Je croise alors un hommes de mon escouade. Je le reconnais parce qu'il est aussi le meilleur ami de mon apprenti. Je l'arrête.
— Il n'est pas réveillé, n'est-ce-pas ?
Mal à l'aise, il semble hésiter à le trahir, mais son silence suffit. Je lui fais signe de la tête qu'il peut partir et vais chercher un seau d'eau. Je ne tolère pas le retard. Encore moins ceux du réveil. Ce n'est pas un hôtel ici. Sans demander, j'ouvre la porte de sa chambre. L'odeur du sommeil mêlé à celle du travail m'interpelle aussitôt. Il n'en faut pas plus pour m'énerver d'avantage. Je m'approche de son lit, et sans crier gare, je verse le contenu du récipient. Le jeune garçon sursaute et pousse un cri peu attirant, avant de se relever avec précipitation.
— Putain, grogne t'il sans s'apercevoir de ma présence.
Quand il me voit, son expression change.
— Euh, excusez-moi, s'empresse t'il de se corriger, je n'ai pas vu l'heure.
— Je vois ça. Tu as exactement un quart d'heure pour te préparer et ranger cette écurie.
J'insiste sur la conjonction de coordination. J'indique de la tête les vêtements, les draps et les papiers sur le sol. Rien est à sa place. Après un dernier regard meurtrier, je sors rapidement de cette pourriture.
— Je vérifie, hurlé-je une fois dehors.
Je secoue la tête. Quel délaissement. Je viens de perdre cinq minutes inutilement.
Je me rends ensuite dans la cuisine et me sers de mon petit-déjeuner que j'ai préparé soigneusement hier, comme chaque jour. Quelques instants plus tard, je me pose sur une des tables de la cantine qui est vide, avec mon verre de jus d'orange et quelques céréales dans un bol de lait. L'autre abruti ne devrait pas tarder. Il a même intérêt. Je me saisis de mon téléphone et jette un œil sur les actualités. Mon regard s'arrête sur un article dont le titre contient le nom de la ville. Je clique et lis :
Règlement de compte sanglant:
Hier, aux alentours de vingt-trois heures,
J'arrête ma lecture. Vingt-trois heures. Je dormais. La rage et la culpabilité me ronge. La ville n'est pas bien grande. À moins d'une dizaine de kilomètres de moi, il y a eu un meurtre. Pendant que je dormais. Je soupire. Les actualités sont le meilleur moyen de plomber ma journée. Je décide de ne pas finir la lecture. De toutes façons, on me le rapportera. Et puis, je ne peux pas tout faire.
— Je suis vraiment désolé, dit le jeune garçon aux cheveux teintés de vert. Je ne me suis pas levé.
J'ai vu ça oui. Tout le monde le surnomme l'apprenti excentrique. Visiblement, ma méthode de réveil à fonctionné. Il me paraît en pleine forme. Il pose quelques cookies sur un plateau et un verre de cacao avant de me rejoindre. Je me retiens de critiquer son faux petit-déjeuner et son t-shirt alors que nous sommes aux portes de l'hiver, et lui intime de s'assoir.
Soudain, l'objet à mon oreille vibre. Quand mon oreillette se montre à cette heure, c'est qu'il y a une urgence ou une affaire –urgente aussi–. C'est alors que la voix de notre chef s'élève :
— Agent Warner, Vous êtres attendu au café-bar Rosalía. Règlement de compte.
Je le savais. Quelle ironie du sort. Bien-sûr que l'affaire devait m'être confiée. Je grogne de frustration. Jen, mon apprenti, semble se concentrer. J'en déduis que le message lui parvient lui aussi par oreillette.
— Je viens d'en entendre parler à la radio, pendant que je me préparais, me dit t'il
Je lève les yeux au ciel. Je n'ai pas envie de m'occuper de ce cas.
— Ils disaient que les responsables seraient les membres d'une organisation mafieuse. Je pense deviner qui c'est.
Les Hyenas. Finalement, cela prend une tournure différente. Je sens que mon visage s'illumine. Je me saisis alors rapidement de mon téléphone, retarde ma rencontre avec le garçon aveugle, puis je me lève. Je suppose que mon geste est brusque puisque l'excentrique, qui vient de finir de manger, sursaute.
— On y va, déclaré-je.
~~~
Nous sommes devant la façade dudit Rosalía, ou le café-bar du meurtre. J'aurais probablement toqué avant d'entrer si la porte n'étais pas cassée en mille morceaux. Il n'y sont visiblement pas allés de main morte. Je contourne donc les bouts de porte et pénètre à l'intérieur du bâtiment. Finalement, ça va. Seul le vide et l'atmosphère angoissée témoigne de l'incident d'hier. Comment le meurtre a t'il eu lieu ? Je ne vois ni sang, ni corde. Nos informations seraient t'elles faussées ?
Alors que je m'apprêtais à tirer la conclusion que le lieu est vide, un homme tousse. Il est assis au fond, sur une chaise haute du bar. Pas moins de soixante ans au premier regard. Je ne le vois pas très bien : un épais manteau le couvre en entier sans exclure sa tête. Il est avachi sur un long bar, en face d'un présentoir à boisson. Je doute que ce soit du jus d'orange. Mon hypothèse devient encore plus probable quand je l'entends grommeler des mots incompréhensibles et le vois tanguer.
Je m'approche de lui, éternellement taloné par Jen. Lorsque j'arrive à sa hauteur, l'homme ne bouge pas. Je me racle alors la gorge :
— Je suis l'agent Warner, envoyé par une agence de défense.
Je ne lui précise rien d'autre. Ne jamais rien dire de trop à des inconnus. Se contenter du minimum.
— J'ai quelques questions, reprends-je, étiez-vous là au moment de l'incident.
Lorsqu'il lève enfin son visage, je comprends que la réponse est affirmative. Il fait peur à voir, et le blanc recouvre sa face. Je garde contenance.
— Pouvez-vous nous raconter ?
Je m'assois, et attends calmement. Je ne dois pas le presser. Alors que je m'attendais à ce qu'il me résiste, il commence presque aussitôt, comme pour se libérer d'un poids.
— C'était des Hyènes. Pas des humains.
L'incompréhension se peint sur le visage de mon apprenti. Ce qu'il peut être lent à la compréhension. Je l'ignore et incite l'inconnu à continuer. Moi, je comprends de ce qu'il parle. Il n'y a qu'eux pour faire ça, comme ça, sans peur des représailles.
— Des gamins, une fille, un avec chapeau et un borgne. Ils l'ont épluché par fusillade. Et le borgne a coupé la pomme. De toute façons, elle était pourrie.
Je me retiens de lui enfoncer mon poing dans la mâchoire. Je déteste que l'on parle de manière floue. J'aime les choses claires, rapides et concises. Combien étaient-ils ? Des gamins ? Les Hyenas ne sont pas connu pour employer des enfants. Et puis c'est quoi cette métaphore ? D'ailleurs, pour les affaires des Hyenas de ce type, c'est souvent un trio qui se déplace. Deux jeunes et leur chef. Un Borgne. Je suis certains que les gamins dont il parle sont en fait les deux qui accompagne le ce dernier.
Ce qui voudrait dire que ma cible principale est sur l'affaire. C'est une occasion de l'éliminer. Je ne l'ai jamais vue, mais je sais que je la hais. Je l'excère même. Parce qu'elle est à l'origine de sa mort. Je sais seulement que c'est une fille, plus jeune que moi. Et s'il y a une chose dont je suis certain, c'est que je suis déterminé à la supprimer. Même s'il faut que je m'en salisse les mains de sang.
Je balaie du regard les photos accrochées à mon miroir. Elles sont à mon image : parfaitement droites et alignées, et séparées en plusieurs groupes qui ne sont pas l'oeuvre du hasard. Je me concentre sur l'une d'elles, qui représente un jeune garçon aveugle. Je dois le rencontrer aujourd'hui. J'inspire profondément. Je ne dois pas défaillir. Ce n'est pas parce qu'il est privé de vue qu'il est inoffensif. En tout cas, sa famille ne l'est pas.
Je vérifie d'un rapide coup d'œil la propreté de ma chambre avant de sortir. Je n'aime pas le désordre. Les quelques agents que je croise dans les couloirs me saluent avec respect. Ils ne sont pas nombreux : il n'est que six heures trente. Pourtant, je ne trouve pas qu'il est tôt. Il n'y a pas une heure qui passe sans que notre métier de révèle être utile. Il y a beaucoup de personnes malveillantes. Nous ne sommes pas de simples agents pour la justice. Nous, nous nous sacrifions chaque seconde. Parce qu'on ne s'occupe pas des simples délits.
Je croise alors un hommes de mon escouade. Je le reconnais parce qu'il est aussi le meilleur ami de mon apprenti. Je l'arrête.
— Il n'est pas réveillé, n'est-ce-pas ?
Mal à l'aise, il semble hésiter à le trahir, mais son silence suffit. Je lui fais signe de la tête qu'il peut partir et vais chercher un seau d'eau. Je ne tolère pas le retard. Encore moins ceux du réveil. Ce n'est pas un hôtel ici. Sans demander, j'ouvre la porte de sa chambre. L'odeur du sommeil mêlé à celle du travail m'interpelle aussitôt. Il n'en faut pas plus pour m'énerver d'avantage. Je m'approche de son lit, et sans crier gare, je verse le contenu du récipient. Le jeune garçon sursaute et pousse un cri peu attirant, avant de se relever avec précipitation.
— Putain, grogne t'il sans s'apercevoir de ma présence.
Quand il me voit, son expression change.
— Euh, excusez-moi, s'empresse t'il de se corriger, je n'ai pas vu l'heure.
— Je vois ça. Tu as exactement un quart d'heure pour te préparer et ranger cette écurie.
J'insiste sur la conjonction de coordination. J'indique de la tête les vêtements, les draps et les papiers sur le sol. Rien est à sa place. Après un dernier regard meurtrier, je sors rapidement de cette pourriture.
— Je vérifie, hurlé-je une fois dehors.
Je secoue la tête. Quel délaissement. Je viens de perdre cinq minutes inutilement.
Je me rends ensuite dans la cuisine et me sers de mon petit-déjeuner que j'ai préparé soigneusement hier, comme chaque jour. Quelques instants plus tard, je me pose sur une des tables de la cantine qui est vide, avec mon verre de jus d'orange et quelques céréales dans un bol de lait. L'autre abruti ne devrait pas tarder. Il a même intérêt. Je me saisis de mon téléphone et jette un œil sur les actualités. Mon regard s'arrête sur un article dont le titre contient le nom de la ville. Je clique et lis :
Règlement de compte sanglant:
Hier, aux alentours de vingt-trois heures,
J'arrête ma lecture. Vingt-trois heures. Je dormais. La rage et la culpabilité me ronge. La ville n'est pas bien grande. À moins d'une dizaine de kilomètres de moi, il y a eu un meurtre. Pendant que je dormais. Je soupire. Les actualités sont le meilleur moyen de plomber ma journée. Je décide de ne pas finir la lecture. De toutes façons, on me le rapportera. Et puis, je ne peux pas tout faire.
— Je suis vraiment désolé, dit le jeune garçon aux cheveux teintés de vert. Je ne me suis pas levé.
J'ai vu ça oui. Tout le monde le surnomme l'apprenti excentrique. Visiblement, ma méthode de réveil à fonctionné. Il me paraît en pleine forme. Il pose quelques cookies sur un plateau et un verre de cacao avant de me rejoindre. Je me retiens de critiquer son faux petit-déjeuner et son t-shirt alors que nous sommes aux portes de l'hiver, et lui intime de s'assoir.
Soudain, l'objet à mon oreille vibre. Quand mon oreillette se montre à cette heure, c'est qu'il y a une urgence ou une affaire –urgente aussi–. C'est alors que la voix de notre chef s'élève :
— Agent Warner, Vous êtres attendu au café-bar Rosalía. Règlement de compte.
Je le savais. Quelle ironie du sort. Bien-sûr que l'affaire devait m'être confiée. Je grogne de frustration. Jen, mon apprenti, semble se concentrer. J'en déduis que le message lui parvient lui aussi par oreillette.
— Je viens d'en entendre parler à la radio, pendant que je me préparais, me dit t'il
Je lève les yeux au ciel. Je n'ai pas envie de m'occuper de ce cas.
— Ils disaient que les responsables seraient les membres d'une organisation mafieuse. Je pense deviner qui c'est.
Les Hyenas. Finalement, cela prend une tournure différente. Je sens que mon visage s'illumine. Je me saisis alors rapidement de mon téléphone, retarde ma rencontre avec le garçon aveugle, puis je me lève. Je suppose que mon geste est brusque puisque l'excentrique, qui vient de finir de manger, sursaute.
— On y va, déclaré-je.
~~~
Nous sommes devant la façade dudit Rosalía, ou le café-bar du meurtre. J'aurais probablement toqué avant d'entrer si la porte n'étais pas cassée en mille morceaux. Il n'y sont visiblement pas allés de main morte. Je contourne donc les bouts de porte et pénètre à l'intérieur du bâtiment. Finalement, ça va. Seul le vide et l'atmosphère angoissée témoigne de l'incident d'hier. Comment le meurtre a t'il eu lieu ? Je ne vois ni sang, ni corde. Nos informations seraient t'elles faussées ?
Alors que je m'apprêtais à tirer la conclusion que le lieu est vide, un homme tousse. Il est assis au fond, sur une chaise haute du bar. Pas moins de soixante ans au premier regard. Je ne le vois pas très bien : un épais manteau le couvre en entier sans exclure sa tête. Il est avachi sur un long bar, en face d'un présentoir à boisson. Je doute que ce soit du jus d'orange. Mon hypothèse devient encore plus probable quand je l'entends grommeler des mots incompréhensibles et le vois tanguer.
Je m'approche de lui, éternellement taloné par Jen. Lorsque j'arrive à sa hauteur, l'homme ne bouge pas. Je me racle alors la gorge :
— Je suis l'agent Warner, envoyé par une agence de défense.
Je ne lui précise rien d'autre. Ne jamais rien dire de trop à des inconnus. Se contenter du minimum.
— J'ai quelques questions, reprends-je, étiez-vous là au moment de l'incident.
Lorsqu'il lève enfin son visage, je comprends que la réponse est affirmative. Il fait peur à voir, et le blanc recouvre sa face. Je garde contenance.
— Pouvez-vous nous raconter ?
Je m'assois, et attends calmement. Je ne dois pas le presser. Alors que je m'attendais à ce qu'il me résiste, il commence presque aussitôt, comme pour se libérer d'un poids.
— C'était des Hyènes. Pas des humains.
L'incompréhension se peint sur le visage de mon apprenti. Ce qu'il peut être lent à la compréhension. Je l'ignore et incite l'inconnu à continuer. Moi, je comprends de ce qu'il parle. Il n'y a qu'eux pour faire ça, comme ça, sans peur des représailles.
— Des gamins, une fille, un avec chapeau et un borgne. Ils l'ont épluché par fusillade. Et le borgne a coupé la pomme. De toute façons, elle était pourrie.
Je me retiens de lui enfoncer mon poing dans la mâchoire. Je déteste que l'on parle de manière floue. J'aime les choses claires, rapides et concises. Combien étaient-ils ? Des gamins ? Les Hyenas ne sont pas connu pour employer des enfants. Et puis c'est quoi cette métaphore ? D'ailleurs, pour les affaires des Hyenas de ce type, c'est souvent un trio qui se déplace. Deux jeunes et leur chef. Un Borgne. Je suis certains que les gamins dont il parle sont en fait les deux qui accompagne le ce dernier.
Ce qui voudrait dire que ma cible principale est sur l'affaire. C'est une occasion de l'éliminer. Je ne l'ai jamais vue, mais je sais que je la hais. Je l'excère même. Parce qu'elle est à l'origine de sa mort. Je sais seulement que c'est une fille, plus jeune que moi. Et s'il y a une chose dont je suis certain, c'est que je suis déterminé à la supprimer. Même s'il faut que je m'en salisse les mains de sang.
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