Léa était la femme parfaite.

En tout cas, tout le monde la trouvait belle, intelligente, drôle, altruiste...
Tout le monde se disait ça entre eux, en rigolant mais en le pensant réellement.

Léa était la femme parfaite.

Elle prenait soin de son corps, ce corps plein de courbes qui la rendaient si belle, ces courbes partout qui donnaient un côté si doux à son corps.

Léa elle mettait des robes, pas parce que c'était une fille, juste parce qu'elle se trouvait si belle avec ses robes qui voletaient autour de ses jambes quand il y avait du vent.
Ses cheveux longs et blonds étaient souvent tressés contre son crane, ses yeux bruns lançaient toujours des regards charmeurs et gentils.

Elle avait aussi des béquilles, elle ne pouvait pas marcher sans, mais elle était habituée, Léa, elle était née comme ça.
Elle les avait même décoré, de nuances de rose et de violet, parce que Léa adorait le violet et que le rose s'assortissait bien avec.
Parfois elle utilisait un fauteuil roulant, qu'elle avait customisé d'hibiscus bleus et violettes.

Léa était la femme parfaite.

Léa était en couple avec Julien, et elle l'aimait tant que son coeur s'emballait à chaque mot du brun, et il l'aimait tant que sa respiration s'emmêlait à chaque regard de la grande femme.

Son trente troisième anniversaire avait été fêté il y a quelques mois, quand un jour de mai son amie Charlotte lui avait demandé si cette année elle voulait venir à la pride avec eux en juin.
Julien, Charlotte, Léonore, Gabrielle, Lola et Meylin allaient tous les ans à la marche des fiertés, mais chaque année Léa ne voulait pas venir car elle avait peur de gêner, elle qui était hétérosexuelle et en fauteuil.

Pourtant, pour aucune raison, cette année ci elle accepta.

Le jour prévu, elle avait mis une robe arc-en-ciel achetée pour l'occasion.
Ses amis s'étaient eux aussi habillés de ces couleurs, et elle cultivait ça très beau.

Dans la voiture de Gabrielle, Léa commença à poser des questions sur les LGBT, alors qu'elle n'avait jamais fait car ça elle ne s'y était jamais intéressé.
Ils ont commencé par lui dire que LGBTQ + étaient un terme plus correct, et ils se lancèrent dans de longues explications sur les sexualités, puis sur les genres.
Ils passèrent tout le long trajet à parler des gens transgenres, des non-binaires.

Léonore a évoqué son adolescence où elle s'était beaucoup questionnée sur le sujet.
Lola parla de sa grand-mère qui était transgenre.
Julien prit la parole pour parler de san toncle non-binaire.

Léa cogita.

Elle se questionna.

La journée, bien que très éprouvante, joyeuse et colorée, se passa dans une chape de brouillard.
Pendant plusieurs mois, le brouillard resta.
Elle fit de nombreuses recherches, elle en parla à pleins de gens.

Elle éplucha les sites, les vidéos et les témoignages.

Elle passa des heures à parler avec ses amis ou des nouvelles rencontres.

Léa découvrit un gêne, un manque, un mensonge en elle qu'elle n'avait jamais vu car elle ne savait pas qu'il pouvait exister.

C'était ça.

Léa n'était pas la femme parfaite.

Avec ses robes qui voletaient autour de ses jambes, ses béquilles décorées avec du rose et du violet, ses longs cheveux blonds souvent tressés contre son crâne, avec tout ça, Léa n'était pas la femme parfaite.

Léa était l'homme parfait.