Mi
La touche effleurée, un doigt seulement posé,
Et pourtant, le charme d'un son, d'une note soudain éclate.
Mi.
Mi brise le silence et résonne doucement dans la salle si sombre.
Il n'y a personne.
Personne n'est là pour écouter cette mélodie qui commence.
Le pianiste inconnu soupire et tire silencieusement le tabouret.
Le mi se fait de nouveau entendre, mais cette fois brodés d'arpèges, qui semblent s'élancer vers le mi sans jamais l'atteindre.
L'artiste ferme les yeux et se livre tout entier à son œuvre.
Ses émotions descendent dans ses mains, les guidant de leur puissance refoulée, donnant vie à des notes passionnées.
La musique, vibrante, s'élève, et remplit peu à peu la salle, chargeant l'atmosphère d'une tristesse et d'une nostalgie infinies.
Mi, la, mi, mi, fa...
Telles des larmes, elles glissent et s'évanouissent dans les airs.
Mais soudain, comme pris de folie, le musicien se met à plaquer avec une rage désespérée des accords aux consonances bouleversées, qui déchirent la salle de leurs désespoir lancinant.
Et tout aussi soudainement, interrompant le chef d'œuvre, il retire ses doigts, comme brûlé et claque avec colère le couvercle sur le clavier.
Le siège est renversé et le pianiste s'enfuit, abandonnant son cœur brisé sur les touches blanches et noires.
2020-10-19 12:02:08
22
2