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Je titube dans une ruelle obscure avec une vue brouillée. Il n'a fait que me frapper dans le ventre et je m'attends à vomir à tout moment. Je ferme les yeux et me cramponne a un mur crasseux. Essoufllé, je reste là quelques instants pour reprendre mes esprits. Même habitué à la souffrance physique, je ne m'attendais pas à recevoir autant de coups ce soir.
- Adil ! S'écrie soudain une voix.
Je n'ai même pas la force de me retourner et m'écroule le long du mur. J'entends des pas précipités, de plus en plus proche. Je ferme les yeux et les rouvre lentement. Anna se tient maintenant devant moi, les cheveux relevés et des grands yeux ouverts. A ses côtés se trouve une fille blonde, habillée avec une robe rouge froissée et du mascara lui forme des cercles noirs autour de ses yeux clairs. Anna s'accroupie devant moi.
- On peut te ramener, me dit-elle, en voiture. A moins que tu veux qu'on appelle directement une ambulance ?
Je secoue la tête, épuisé. Mon abdomen me fait souffrir et ma respiration devient haletante. Je la laisse soulever mon pull et mon t-shirt pour voir les dégats. Elle appuie doucement au dessus de mon nombril et je grimace. L'autre fille et elle échangent un regard.
- Je crois que tu vas avoir de sacrés bleus demain, m'annonce Anna.
Je penche la tête sur le côté, sur le point de m'évanouir. Soudain, un haut le coeur me traverse et j'ai juste le temps de me pencher sur le côté pour vomir. Je tremble lorsque je rend mon repas sous le regard des deux filles. Je me sens tellement vulnérable tout à coup.
- D'accord, on t'emmène Adil, assure Anna d'un ton sans appel.
Elle se penche sur moi et m'essuie les coins de ma bouche avec un mouchoir. J'évite son regard, de peur qu'elle lise ma peur et ma souffrance dans mes yeux. Puis elle soulève encore une fois mon pull, mais cette fois pour l'enlever. Je me laisse faire, essayant de rester éveillé. Elle sort mon téléphone de ma poche et le rend à son amie.
- On va te porter, me rassure tendrement l'autre fille. Passe ton bras autour de mes épaules.
Je m'exécute lentement, tremblant avec qu'un seul t-shirt et elles me relèvent avec précaution, mes deux bras autour de leurs épaules. La blonde me sourit tristement lorsque je grimace au début. Chaque pas est insoutenable et se répercute sur mes abdos endoloris.
- Vous auriez pu repartir chez vous, je bafouille. Pourquoi vous êtes revenus me chercher ?
Anna replace mon bras autour de ses épaules et me lance un regard déterminé. J'essaye de garder les yeux ouverts autant que je peux. Je n'y arrive presque plus.
- J'ai pas pu empêcher ce conn*** de te tabasser, alors que j'aurais pu, avoue-t-elle en détournant la tête. C'est normal que je t'aide maintenant.
Nous traversons une grande avenue et je vois les gens me regarder avec curiosité. Je manque de trébucher sur une bouteille qui traîne mais Anna passe son bras autour de ma taille fermement. Je me crispe car personne ne m'avais jamais touché à cet endroit depuis longtemps, pas même ma mère. Arrivés devant une Mercedes noire, elles s'arrêtent. Je ne m'attendais pas à rentrer dans une telle voiture. A l'intérieur en cuir, la fille blonde s'assoit à mes côtés. Anna se place au volant sans un mot.
- Au fait moi c'est Noémie, lâche alors la blonde. Je suis la meilleure amie d'Anna.
Je hoche la tête et esquisse un vague sourire avant d'être pris d'une autre nausée. Je déteste la voiture et encore moins moi retrouver blessé dans la voiture d'une fille encore inconnue.
- Vous auriez pas un...un sachet ? Je demande presque timidement.
- Oh bien sûr ! S'exclame Noemie en fouillant dans son sac.
Elle en sors un sac plastique rempli de pinceaux de maquillage. Puis elle me le temps et je l'attrape d'une main toujours tremblante. Je crache quelques glairs en rougissant. Le plus dur ce n'est même pas d'avoir mal, mais d'être entouré de personnes qui ne peuvent pas m'aider.
- Je te dépose chez toi ? Me questionne Anna en m'observant à travers le rétroviseur.
- Si...si tu peux, je bégaye. L'adresse c'est...c'est...
C'est quoi déjà ? Noémie me rend alors mon téléphone avec un petit sourire. Je tape le mot de passe et la laisse fouiller dans mon répertoire ma propre adresse. Elle en pointe du doigt une et j'acquisse lentement de la tête. Elle a allumé l'adresse et Anna l'entre sur son GPS.
- Ça va prendre un peu de temps, m'informe-t-elle au bout d'un moment. Tiens bon, Adil.
Elle commence et s'engage dans une rue déserte. Je ferme les yeux avec un goût affreux dans la bouche. Ma tête penche sur le côté, et à plusieurs reprises, Noémie me remet doucement droit. Au bout de quelques minutes, je m'endors presque.
- Si tu veux tu peux t'allonger sur mes genoux, propose alors Noémie.
Je ne me fais pas prier. Elle m'aide à détacher ma ceinture. Puis je pose ma tête sur ses genoux et pose mes mains près de ma tête. Elle pose sa main froide sur mon épaule et j'essaye de me détendre. Mais ma respiration redevient une nouvelle fois haletante. On se calme.
- Accroche toi, Adil on y est presque ! Me lance Anna, concentrée sur la route.
Son amie garde sa main sur mon épaule et je pense soudain à ma mère. Je sais qu'elle va été furieuse et en même temps, tellement inquiète pour moi. Bordel. Je joue avec les lanières du sac plastique pour moi garder éveillé. La voiture tourne pendant un moment et Noémie me tient le bras pour m'empêcher de tomber. J'inspire et expire bruyamment pour éviter de tomber dans une crise de panique incontrôlable. J'en ai pas fais depuis un moment, mais j'appréhende toujours le moment où je serais à nouveau confronté à mes phobies. Soudain, je me rend compte que la voiture s'est arrêtée. Anna se retourne et me regarde avec des yeux perçants.
- On est arrivé Adil, m'informe-t-elle d'une voix calme.
Je me redresse lentement. Un mal de tête commence déjà a grossir dans mon crâne. Noémie sort de la voiture et c'est Anna qui m'aide à me remettre sur pieds. Elle me tient fermement et je ne vois toujours aucune émotion dans son regard sombre. La porte claque et je passe un bras autour de ses épaules. Il ne me reste plus qu'une dizaine de marches à monter avec l'estomac retourné pour affronter ma mère.
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