« Hum... alors vous vous connaissez ? demanda Aron.

—On était dans la même classe au collège et au lycée, minauda Calypso en lui faisant les yeux doux.

—Tu n'épures la vérité que quand ça t'arrange, hein ? marmonna Nayana dans sa barbe.

—Quelle surprise de te revoir à Caliawen ! Je ne pensais pas que tu trouverais le passage. Je suis heureuse de te revoir après deux ans. J'espère que tu ne t'es pas trop ennuyée de moi... », sourit Calypso.

Nayana leva les yeux au ciel. Elle souhaitait ardemment lui faire avaler son sourire stupide.

« Dans tes rêves peut-être Calypso ! En ce qui me concerne, tu ne m'as absolument pas manqué et je trouve ta compagnie toujours aussi insupportable. Je comprends mieux pourquoi Sunset a une telle image de toi. Tu mérites d'être princesse d'un royaume autant que tu as mérité d'avoir ta couronne de reine du bal, quand on était en troisième. Si vous voulez bien m'excusez... »

Elle se leva de table et partit tranquillement vers la porte menant à l'intérieur du château. La pièce dans laquelle elle était était une sorte de salle des trophées des souverains. Elle remarqua alors la couronne de reine du bal des troisièmes et s'approcha de la vitrine. Elle posa doucement sa main sur la vitre. Elle aurait préféré que Calypso l'emporte dans les règles.

« Tu aurais aimé la gagner, hein ? », retentit la voix goguenarde de Calypso.

Nayana n'eut pas besoin de se retourner pour deviner son sourire mesquin. Elle ne prit même pas la peine de se tourner vers elle pour lui répondre.

« Non, j'aurais préféré que tu la gagnes à la loyale.

—Mais je l'ai gagné à la loyale ! », ricana Calypso.

A travers la vitre qui renvoyait leurs reflets, Nayana fusilla la blonde du regard.

« Parce que tu trouves que s'introduire dans la chambre de sa rivale en pleine journée, une heure avant le bal, pour saccager sa robe et la forcer à déclarer forfait, c'est gagner à la loyale ? rétorqua Nayana d'une voix glaciale.

—Ce n'est qu'un détail, et personne ne le sait. »

Nayana se retourna pour lui faire face, le visage dur. Elle la pointa d'un doigt accusateur.

« Si, moi je le sais. J'avais installé une caméra dans ma chambre, justement parce que je savais que tu me ferais un sale coup ! Mais je n'aurais jamais pensé que tu tomberais si bas Calypso ! Tu n'es la reine de rien du tout, à part la reine des sales coups !

—Je trouve que tu as la langue bien pendue Nayana. Je t'ai connu moins bavarde. Je te préférais avant.

—Evidemment ! Vu que je ne disais rien, tu pouvais me persécuter sans problème avec ta bande de cruches teintées !

—Et cela tombe bien que tu sois à Asgard, je vais pouvoir reprendre mes vieilles habitudes ! », répondit Calypso avec un sourire machiavélique.

Naya claqua des doigts et Calypso fut envoyée à l'autre bout de la salle.

« C'est ce que tu crois. Je ne me laisserai plus faire Calypso. Personne ne mérite d'être traitée comme tu l'as fait avec moi. Et je ne te laisserai pas mentir à Aron sur ce qui s'est passé entre nous. Il m'a aidé à prendre confiance en moi, je lui dois bien ça. Il mérite de connaître la vérité à ton sujet.

—C'est donc ça... tu sais chérie, tu n'as aucune chance avec Aldaron. On est fiancés, lui et moi ! », se vanta Calypso en se relevant.

Nayana haussa un sourcil, sceptique.

« Tu essaies de convaincre qui là ? Toi ou moi ?

—Mais je ne te mens pas chérie. Il est le fils de la comtesse d'Alfheim, la deuxième ville la plus importante après Asgard. C'est normal qu'il soit fiancé à la princesse. Oh, désolée... tu ne devais pas savoir qui était sa mère... s'excusa faussement la blonde.

—Si, je le savais. Tu sais ce que je sais d'autre sur Aron ? Tu sais que cela fait plus d'un mois que je passe chacune de mes journées avec lui et Sunset ? On vit dans la même maison, Aron et moi, j'ai eu le temps d'en apprendre beaucoup sur lui.

—Ah oui ? Je serais curieuse de savoir ce que tu penses connaître de lui.

—Assez pour savoir qu'Aron est très différent de sa mère. Il n'est pas du genre à se fiancer à une fille dont il n'est pas amoureux.

—Mais il est amoureux de moi, voyons !

—Dans tes rêves, peut-être. Mais ce que je sais, c'est que Sunset connaît son cousin bien mieux que toi. Tu penses que je vais croire qui, entre sa cousine qui m'assure que je suis la première fille à l'intéresser autant et une princesse pourrie gâtée odieuse qui prétend qu'il est amoureux d'elle ? »

Nayana sourit légèrement en voyant le visage de Calypso se déformer par la colère.

« Je te permets pas ! Je suis la princesse de Caliawen, et tu n'es qu'une simple roturière ! Tu me dois le respect !

—Désolée, mais tu n'as aucune légitimité à mes yeux. Oh, mais en fait, je ne le suis pas. Et je ne suis pas « une simple roturière », mais bien plus. Tu ne t'es pas demandé ce que je faisais à Caliawen ? »

Calypso resta muette, étant trop furieuse pour trouver les mots.

« Eh bien je vais te le dire. Tu connais Lyna, la mage la plus puissante de Caliawen ? Il se trouve que je suis sa petite-fille, et que j'ai hérité de ses pouvoirs. Alors, non, je ne suis pas « une simple roturière » comme tu le dis. Je pense même que je suis bien plus respectée que toi, vu la façon dont tu traites toutes les filles une fois Aron loin de toi. Sur ce, je te laisse. J'ai mieux à faire que de perdre mon temps avec une gamine qui se prend pour une prostituée ! »

Avec un dernier geste de la main pour la saluer, Nayana retourna dans la roseraie, nettement plus sereine. Elle avait enfin pu lui dire en face ses quatre vérités, comme elle avait tant souhaité le faire depuis l'obtention du bac.

« N'empêche, que faisait Calypso sur Terre ? Puisqu'elle est la princesse de Caliawen, elle aurait dû rester afin de suivre les enseignements royaux, dans son royaume... »

Elle s'approcha de la porte et vit alors Aron, accoudé contre cette dernière. Nayana papillonna des yeux, surprise de le voir.

« Qu'est-ce-que tu fais ici ?

—Je voulais savoir pourquoi tu semblais détester Calypso, mais j'ai eu la réponse à ma question. », répondit le rouge en désignant du menton la blonde rouge de colère. « Je n'aurais jamais cru qu'elle était du genre à agir comme ça. Elle a toujours été si gentille...

—Avec toi, peut-être. Mais Sunset l'a qualifié de, je cite, « détestable envers les autres filles ». Apparemment, c'était surtout le cas quand elle était hors de ta vue.

—Sunset ne m'a jamais dit ça...

—Tu la connais, ça lui passe au-dessus. Du peu que j'ai pu observer de son comportement avec toi, son seul objectif était de te séduire Aron. Et c'est sûrement pour ça qu'elle a été si sympa avec toi. Mais je connais Calypso depuis que j'ai onze ans. Ce n'est pas une fille gentille, c'est juste une peste qui aime faire du mal aux autres.

—Ne la crois pas Aron, tu ne vois pas qu'elle raconte des sottises ? », intervint Calypso en s'approchant, étrangement très calme. « Tu ne vas pas croire une fille que tu connais à peine plutôt que moi ! Cela fait des années qu'on se connaît.

—Calypso, j'ai assisté à toute la conversation, y compris ce que tu as fait pour obtenir la couronne lors de ce bal... et justement, je croyais te connaître. Sauf que la personne que je pensais connaître n'aurait pas fait toutes ces choses horribles dont t'accuses Nayana. Et je connais certainement mieux Naya que toi, au passage. Comme elle l'a dit, on passe énormément de temps ensemble, elle est ma meilleure amie ! Et je peux savoir pourquoi tu as essayé de lui faire croire qu'on était fiancés ?! », s'énerva Aron. « Qu'est-ce-que cela t'apporte de faire tout ça ?!

—Comment tu peux m'accuser de l'avoir persécuté et d'avoir fait cette chose horrible pour le bal ?! Tu n'as aucune preuve !

—Oh que si, crois-moi. La particularité de la magie de lumière pure, c'est qu'elle est incapable de mentir sur les souvenirs ou les sentiments de son détenteur. »

Il pointa quelque chose derrière Calypso. Elle se retourna et vit avec stupeur des vidéos de lumière montrant tout ce qu'elle avait fait contre Nayana. Cette dernière, elle, regardait ses mains, étonnée que sa magie se soit manifestée sans qu'elle ne s'en rende compte, sous l'effet des mauvais souvenirs qu'avaient fait ressurgir l'apparition de la blonde.

« Et même sans ça, je croirais Naya sans hésiter ! Elle est beaucoup trop gentille et innocente pour mentir sur des choses pareilles !

—Innocente ? releva Nayana, ne sachant où il voulait en venir.

—Oui. Dès que tu penses avoir fait quelque chose de mal, quand tu penses avoir fait du mal à quelqu'un, tu t'excuses aussitôt. Même quand tu n'as rien fait, il suffit que tu penses avoir mal agi pour que tu t'excuses. Une personne aussi soucieuse des autres ne pourrait mentir, surtout pas à ses meilleurs amis. », sourit Aron.

Nayana rougit. Le jeune homme n'avait pas tort, maintenant qu'il le disait.

« Bref, je te demanderai de ne plus nous approcher. Ni moi, ni Nayana. Et sache que Shimmer veille toujours sur elle, alors on le saura rapidement si tu tentes quoi que ce soit Calypso. »

Il ouvrit la porte et invita Nayana à sortir, d'un geste de la main. Elle s'exécuta et il la suivit, refermant la porte derrière eux alors que la princesse hurlait de rage.

Son cri, annonciateur d'une redoutable vengeance selon Nayana, fit trembler la jeune fille de peur. Aron le remarqua et la prit dans ses bras pour calmer les tremblements de la mage.

« Tout va bien, elle ne te fera plus rien. Maintenant que je sais la vérité, je ne la laisserai même pas toucher un de tes cheveux. »

Pour toute réponse, Nayana enroula ses bras autour de la taille du mage et le serra contre elle.

« Désolé... si j'avais su que tu avais un tel passif avec elle, je ne t'aurais pas laissé venir...

—Non, tu n'as pas à t'excuser Aron. J'avais besoin de lui déballer tout ce que je pensais d'elle. J'en pense encore beaucoup mais disons que les mots sont très colorés... je ne suis plus la faiblarde que j'étais avant, et c'est grâce à Sunset et toi. Je n'ai plus peur de me défendre, de dire ce que je pense. Merci d'être là pour moi.

—C'est normal voyons. Pas parce que tu es la petite-fille de Lyna, mais parce que tu es avant tout notre amie. On t'aime et on n'aime pas te voir malheureuse. C'est normal qu'on veuille le meilleur pour toi, c'est normal qu'on veuille veiller sur toi et te protéger. Mais... je peux te poser une question ?

—Bien sûr.

—Tu as dit que tu étais invisible avant, pourtant Calypso te remarquait, non ?

—C'est vrai. Mais je n'étais visible par les autres que lorsqu'ils avaient besoin de quelqu'un sur qui se défouler ou alors quand ils avaient besoin d'un bouc émissaire. Cela a commencé très tôt alors Grand-mère m'avait inscrite à tous les cours d'arts martiaux possibles, afin que je sache me défendre. Mais avant d'arriver à Alfheim, cela ne m'a jamais vraiment été utile. J'avais trop peur. D'ailleurs, j'avais peur de ce que pouvait me faire Calypso quand je discutais avec elle à l'instant.

—On n'aurait pas dit pourtant. Tu as vraiment gagné en assurance, c'est fou. Au lieu de t'écraser face au monde, tu te dresses face au monde. Quand on y pense, c'est dingue de voir le chemin que tu as parcouru depuis ton arrivée à Alfheim.

—Oui, cela m'étonne moi-même. J'ai l'audace de faire des choses que je n'aurais jamais pensé pouvoir faire.

—Comme ?

—Tenir tête à Calypso, c'est clairement en tête de liste ! », plaisanta Nayana. « Plus sérieusement, je dirais plutôt que je n'aurais jamais pensé pouvoir être aussi expressive avec quelqu'un qui ne soit pas un animal. J'ai l'impression d'être capable de soulever des montagnes !

—Tant mieux, mais ne te surestimes pas trop non plus.

—Je ne suis pas idiote non plus Aron. Je ne vais pas croire que je peux battre le seigneur Obscur alors que je ne peux que terrasser les Darksouls les plus faibles pour l'instant...

—Je sais, je voulais juste te le rappeler. »

Nayana leva la tête et lui offrit un sourire de trois kilomètres, qui fit légèrement rougir Aron. Il leva la main pour replacer délicatement une mèche rebelle de Naya derrière son oreille. La jeune fille se rendit alors compte de leur proximité et devint aussi rouge que la tignasse d'Aldaron.

« Allons rejoindre les souverains. On s'est absentés depuis trop longtemps je pense, souffla Aron.

—Oui, tu as raison. En plus, ils me semblent beaucoup plus sympathiques que leur fille. »

Aron hocha la tête et ils marchèrent tranquillement vers le kiosque.

« Dis-moi, comment se fait-il que Calypso ait été sur Terre ? Je n'arrive pas à comprendre... demanda soudainement Naya.

—Je n'en ai pas la moindre idée. Je ne savais même pas qu'elle avait fait sa scolarité là-bas, à partir de ses onze ans. Tu penses bien que je t'en aurais informé sinon.

—C'est sûr.

—Tu pourras toujours demander à ses parents. »

Nayana acquiesça et entrelaça doucement ses doigts à ceux du rouge. Elle lui sourit timidement avant de regarder de nouveau devant elle. Ils arrivèrent rapidement au kiosque et se réinstallèrent à leurs places précédentes. Sauf que cette fois-ci, ils étaient tous deux légèrement plus proches de l'autre qu'avant l'altercation avec Calypso.