Prise de conscience.
Le sang de l'eau.
De Neotasgos à Lacusoppidum.
Alison.
Aux portes du diable.
Crevez Furry!
Dix contre un.
Dernière raison.
Direction Périté !
Les ailes de chacun.
Damnatio aeternum.
Dans l'œil du maelstrom.
Le brasier du Fraxinus.
Direction Périté !

Les voilà à nouveau partis.

- Ça peut vous paraître bizarre ce que je vais vous dire, mais j'étais bien là bas, dit Rick chagriné.

- T'inquiète, des endroits sympas on en verra d'autre. Enfin, ''sympa'' c'est relatif hein? Ce n'est pas l'endroit le plus sécur' non plus, répondit Suzanne.

- Mouais, j'espère bien... et toi Alison ?

- Hmm ?

- Tu voulais vraiment partir ?

Elle prit un court moment de réflexion.

- Oui. Mais je... Ça me fait de la peine de laisser Marc là bas.

- Ha... Encore du mal à avaler le morceau ?

- Il est mort hier je te rappelle. Tu dis ça comme si c'était facile, dit elle d'un ton sec.

- Heu non...

- J'essaye juste de ne pas trop vous embêter avec ça.

Personne ne répondit, et elle ajouta:

- Enfin bref, je ne sais pas dans quoi je me lance.

- T'inquiète pas, nous non plus ! dit Frédéric avec un grand sourire.

- Hein ? Vous faites vraiment ça sur un coup de tête ? On en avait parlé mais je ne vous trouvais pas sérieux !

- Ouais, c'est plus ou moins ça. On est parti très vite un peu n'importe comment. C'est surtout Suzanne qui nous à fait partir...

- Hé ! rétorqua Suzanne. J'vous signale que vous étiez sur le point de me le proposer.

- Oui c'est vrai. Un peu tout le monde avait l'idée de partir.

-Mais il y a un truc qui m'embête d'être parti de Neotasgos, ajouta Pako.

- Quoi ?

- Bah simplement que tout ce que j'ai planté va crever. J'ai un peu les boules, ça faisait à peine quatre ans que j'étais sorti de la cueillette.

- Ha oui... C'est vrai qu'on n'a pas pensé à ça en partant.

- Après la fusillade, on est parti en deux jours, forcément on ne pense pas à tout.

- Donc tu connais les plantes ? demanda Alison.

- Oui, enfin ce qu'il faut pour manger, se soigner, et surtout ce qu'il ne faut pas manger . Les bases quoi.

- Cool, et tu sais lire non ?

- Oui, j'écris aussi d'ailleurs.

- Ah ouais c'est vrai ? Alors j'ai peut être quelque chose qui devrait t'intéresser.

Elle fouina dans son sac et en sortit les livres de botanique.

-Tiens, c'est les livres de Marc.

- C'est très gentil de ta part mais... Pourquoi me les donner ? C'est à Marc tout de même...

- C'est vrai, mais ce n'est pas parce que je ne veux pas les garder. On va dire que je ne suis pas super bien lettrée, répondit elle gênée.

- Ha ? Mais il n'y a pas à avoir honte, c'est pas comme si c'était courant de savoir lire.

- Non, c'est plutôt que vous êtes de Neotasgos et je sais que les illettrés ce n'est pas hyper courant et pas forcément bien vu.

- Aïe, aïe, aïe, les préjugés ici... On n'est pas pas tous comme ça. Bon peut-être qu'il y a bien plus de lettrés là-bas, mais en réalité on n'en a pas grand chose à faire.

- Ha bon ?

- Bien sûr. Frédéric et moi ça va on sait faire. Suzanne bof, sa famille utilisait surtout des pictogrammes pour le commerce...

- Mais on est polyglotte ! rétorqua Suzanne en levant le doigt.

- Oui c'est vrai que tu parles correctement deux ou trois langues. En revanche, Rick lui... bah il ne sait absolument pas lire.

- On n'était pas des lumières chez moi, ria Rick.

- Mais quand tu dis "pas très lettrée", tu veux dire quoi exactement ? demanda Frédéric.

- Je veux dire que je suis proche de rien du tout, répondit Alison.

- Du genre ?

- L'alphabet, ça va j'ai, mais j'arrive à peine à déchiffrer certains mots donc forcément écrire ce n'est pas non plus ça.

- On réglera ça t'inquiète, on te donnera des cours avec Rick, sourit Frédéric.

- Oui, on n'aura qu'à utiliser les livres, ajouta Pako.

- Mais j'ai une question, dit Rick.

- Laquelle ?

- Ça sert à quoi concrètement lire et écrire aujourd'hui ? Avant la disparition c'était indispensable mais maintenant ça ne sert plus à rien comme plus personne ne sait écrire ?

- Ah la fameuse question... Hmm, parce que c'est une manière de s'exprimer à travers le temps par exemple. Des écrits de nos ancêtres datant de la disparition nous on permit de savoir plus ou moins ce qu'il s'est passé.

- Et que pour la transmission du savoir c'est important, ajouta Frédéric.

- Oui c'est vrai, c'est comme les livres de Marc: ce sont de véritables petits trésors de savoir.

- D'ailleurs, on ne les a toujours pas ouverts.

Frédéric prit un livre des mains de Pako et l'ouvrit.

- Ouah...

- Quoi ?

- Je pense qu'il les a écrits lui même. Ce ne sont pas des héritages, même les dessins on été fait à la mains. Il a tout fait.

Pako se pencha sur le livre.

- Oh. C'est vrai, il avait un sacré coup de crayon.

- Alison, tu disais qu'il était nomade au départ?

- Oui c'est ça.

- Je pensais que les nomades ne savaient pas écrire.

- C'est même le contraire!

- Comment ça ?

- C'est eux qui cherchent le plus à transmettre. Ils notent tout: partout où ils sont allés, les plantes...

- Et dire qu'hier j'étais en train d'en canarder... Ils font tous ça ?

- Pas absolument tous, mais beaucoup oui.

Pako ouvrit un autre livre.

- Bon, il n'y a pas que des livres de botanique.

- Ha ?

- Celui là c'est plutôt une sorte de journal-carnet-de-bord-de-dessin.

- Montre un peu.

Alison regarda le carnet avec Pako.

- Hem... Tu peux me dire ce qu'y est écrit s'il te plaît ? dit elle hésitante.

- Il raconte un peu tout et n'importe quoi, les endroits où il est allé, ses rencontres, ses aventures et mésaventures de tout genre.

- Y'a même des dessins des gens qu'il a rencontrés.

- En effet.

Pako continua de feuilleter le carnet.

- Tiens on arrive au moment où il t'a rencontré.

- Ah?

- Oui, oui. Là par exemple il raconte qu'il s'était installé près d'une station de condensation et qu'il trouvait son eau en la volant.

- C'est vieux ça. Mais on pourrait continuer plus tard s'il te plaît ? Mine de rien ça remue pas mal de choses...

- Ah oui... Oui d'accord, si tu veux.

Pako remit les livres dans son sac et alla à côté de Suzanne qui conduisait.

- Je me demande, à quoi ça ressemble Périté ? demanda Rick.

- Je ne sais pas je n'y suis jamais allée, répondit Alison.

- Je pense que ça ressemble plus ou moins à Neotasgos, répondit Frédéric.

- Tient, ça devrait plaire à Pako tout ça, ajouta Suzanne.

- Hé Pako ?! dit Rick. Tu entends ce qu'on dit ?

- Heu... désolé j'écoutais pas trop à vrai dire...

- Périté ressemble à Neotasgos, lui dit Suzanne.

- Ah oui ?

- Sauf que ce village est un peu particulier, ajouta Frédéric.

- Oui ?

- Vous verrez quand on y sera, en tout cas ce village porte très bien son nom.

Le chariot continuait à suivre le chemins kilomètre après kilomètre rythmés par le vacarme du convois et les bosses du sentier.

Frédéric essayait de faire déchiffrer des lignes à Rick, Suzanne, elle, tentait de résister à la fatigue de la conduite. Quant à Alison et Pako, ils étaient en assis l'un à côté de l'autre et méditaient... ou dormaient, on ne sait trop.

Ces moment s'éternisaient jusqu'à ce qu'un long coup de sifflet retentit. Un animal du chariot d'en face fit signe à Suzanne de se rabattre sur la droite.

Le convois était arrivé à la frontière du désert de Pulvis, son premier arrêt.

- Debout la meute ! On arrête de comater sinon vous ferez une nuit blanche ce soir ! dit Suzanne.

Suzanne arrêta le chariot. Frédéric et Rick sautèrent immédiatement se dégourdir les jambes. Alison ouvrit enfin les yeux, elle vit Pako qui s'était endormi, n'ayant pas envie de s'embêter elle lui pinça la truffe pour le réveiller. Elle descendit du chariot après avoir mit en apnée Pako qui reprenait son souffle plus qu'il ne se réveillait.

- Ces chariots commencent vraiment à me bousiller le dos ! se plainait Frédéric. Ça fait du bien de descendre.

- Frédéric ? l'appela Suzanne. Tu peux prendre les commandes du chariot ? J'en ai marre de conduire et ils veulent former un cercle avec les chariots...

- Bon d'accord, mais pourquoi un cercle ?

- Ne me demande pas, 'fais juste ce qu'ils disent, dit elle en cédant la place.

- Bon d'accord...

- Merci.

Elle s'étira un petit peu et regarda autour d'elle.

C'était une lisière avec grande étendue d'herbe qui était subitement coupée par le désert. La forêt se trouvait à une centaines de mètres de là où ils s'installèrent. Des deux côté de la frontière, quelques intimidantes ruines de grands bâtiments subsistaient aux fardeaux de l'âge et de la végétation.

Peut-être qu'ici aussi il y aurait eu une Cité ? Ou une partie de la même près de la station ? se demandait Suzanne.

Elle continua à regarder le paysage et le convois qui s'organisait, puis elle vit Alison qui observait aussi le paysage.

- Tu es déjà venue ici ? demanda Suzanne.

- Non jamais, je ne suis jamais allée aussi loin dans cette direction.

- Ah.. et pourquoi ?

- Je n'y étais pas autorisé, je n'avais pas le droit de trop m'éloigner, sauf dans certains cas particulier de mission, comme avec la Cité.

- C'est strict, le règlement de la station ?

- Oui assez, c'est même un peu tyrannique par moment. Si tu t'engages officiellement d'une manière au d'une autre, la station va faire le possible pour que tu n'en sortes pas et comme je suis née là bas, inutile de dire que je ne devais même pas y songer.

- Mais pourquoi ils nous laissent partir alors ?

- J'ai dû quand même pas mal batailler avec les gens ''d'au-dessus'' et ils ont finalement cédé.

- C'est vraiment gentil de ta part d'avoir fait autant.

- Il n'y a pas de quoi.

- En tout cas je suis contente que tu sois sortie de cette endroit.

- Ce n'est pas encore fini, les gars du convoi vont me voir ce soir, j'ai intérêt à la jouer fine.

- Et comment tu vas faire ?

- Je vais juste utiliser mon grade et ma petite notoriété. Ça devrait aller.

- Et si ça ne passe pas ? Il te faudrait un plan B.

- Il n'y a jamais de plan B avec moi.

- Alors j'espère que tu sais ce que tu fais.

- Viens, ils viennent de finir de former un cercle avec les chariots. On va voir si ça va passer.

Tous les animaux déchargeaient le matériel au sol, quelques tentes se dressaient et des feux s'allumèrent. Le campement était installé au milieu du cercle, tout le monde formait son petit groupe, chacun de leur côté.

En entrant dans le cercle, Alison et Suzanne se sentirent particulièrement observées, suivies par des regards en coin de l'œil.

- Génial, ça n'aura pas duré, soupira Suzanne.

- T'inquiète ça va bien se passer, répondit Alison à voix basse.

- Je ne m'inquiète pas.

- Pour l'instant on se contente de retrouver les autres, évite d'adresser la parole à qui que ce soit tant que je ne suis pas grillée.

Suzanne vit enfin Frédéric leur faire signe de le rejoindre. Il était assis avec le reste de la bande.

- Vous étiez où ? demanda Frédéric quand elles furent arrivée.

- On n'était pas bien loin, on regardait juste le paysage, répondit Suzanne.

- Vous n'avez pas encore eu de problème ?

- Non pas encore, répondit Alison, mais ça ne devrait pas tarder.

À ce moment là, un Iguane à l'air grave surgit derrière Alison.

- Tu peux m'expliquer ce que tu fous là toi ?!

Alison soupira un coup et se leva pour faire face à l'Iguane qui faisait bien deux têtes de moins qu'elle.

- Depuis quand tu rejoins les convois clandestinement ? continua t'il. Explique-toi.

- Tu n'as pas été prévenu ? C'est un ordre de toute dernière minute.

- Ah ouais ? Et lequel je te prie ?!

- Le groupe que tu vois derrière moi doit partir pour une autre mission. Entre deux je dois les escorter personnellement.

- Quel genre de mission ?

- Je ne sais pas, ils n'ont pas le droit de le dire.

- Tu te fous de moi c'est ça? Ça ne fait pas une semaine qu'ils se trouvent à la station, dit il en la menaçant du regard.

- Absolument pas, répondit-elle sans hésiter avec le même regard.

- C'est quand même bizarre, ce n'est pas le genre de mission qu'on te donne. Surtout quand il s'agit de partir aussi loin de la station n'est ce pas ? Pourquoi ils n'ont pas envoyé quelqu'un dont c'est le job ?

- On m'a donné un ordre je l'exécute et l'ordre est de les escorter. Tu remets en question les ordres maintenant ?

L'Iguane ne répondit pas.

- Contente toi de suivre les ordres sans réfléchir comme il est demandé. Tout comme moi tu sais ce que tu risques à remettre en question un ordre. Alors si tu ne veux pas d'emmerde à ton retour à la station pour remise en question de l'autorité et tentative de sabotage de mission t'as intérêt à t'en tenir là.

L'Iguane était dévisagé, mais il tenait à sa fierté.

- Remballe tes galons devant moi. Je te garde à l'œil, si t'essayes quoi que ce soit je me ferais un plaisir de te coller une balle.

Il tourna le dos et repartit agacé et Alison se retourna vers la bande.

- Bien, ça s'est mieux passé que prévu.

- C'est super sympa l'ambiance ici, dit Rick, les gens s'apprécient c'est génial.

- Je ne te le fais pas dire. Surtout que ce mec, c'est une vrai saloperie.

- Ah ?

- C'est lui qui dirige les convois et il est hyper à cheval sur le règlement et il n'hésiterait pas à te faire péter les genoux pour l'exemple. Avec ça, il sait très bien que j'ai envie de partir.

- Il ne va pas te lâcher quoi.

- Je ne sais pas, mais à la moindre occasion il essayera de me faire un coup bas voire même de m'abattre et vous avec. Donc ne faites confiance à personne ici. Il va utiliser tous les gars du convois pour trouver une preuve de désertion.

- Mouais, il faut donc partir au plus vite de ce convoi, dit Frédéric.

- Oui, s'il y a des idées.

- On ne pourra pas partir du convoi comme ça et fuir pendant une nuit serait vraiment suicidaire, on aurait plus de vingt personnes à nos trousse. On va devoir rester jusqu'au bout, distribuer l'eau à Périté et partir à la première occasion.

- Pour aller où ?

- Je ne sais pas encore, il me faudrait une carte plus précise de ce coin là, sinon je ne pourrais rien faire.

- Le problème c'est que l'on n'a même pas idée de comment va se passer la distribution, ajouta Suzanne. Peut-être que l'on pourrait partir au moment où l'eau sera distribué, ça nous servira de diversion.

- Mais ils déchargeront qu'un seul chariot à Périté, rétorqua Alison. Tout les animaux du convoi ne seront pas mobilisé.

- Ne vous prenez pas la tête, continua Rick. Périté c'est un grand village ?

- Je ne dirais pas grand, mais assez oui, répondit Frédéric.

- Alors on n'aura qu'à partir là nuit venue, ils vont devoir fouiller tout le village pour nous retrouver même en nous suivant à l'odeur, ça nous laissera un peu d'avance et s'orienter dans le noir ça ne sera pas un problème: moi, Suzanne et Pako on est des nocturnes vous n'aurez qu'à nous suivre et on n'aura pas besoin de torche.

- C'est très bien tout ça. Mais il nous faut un itinéraire.

- On en trouvera bien un, mais pour l'instant nous devons faire profile bas.

La soirée continua de s'éterniser, à part Alison, personne n'arrivait vraiment à dormir, à cause de la sensation d'être complètement entouré d'animaux hostiles qui pourrait les faire taire à tout moment ou peut-être cette chaleur qui ne descendait plus les nuit depuis quelques jours.

La nuit fut très longue, très. Tout le monde s'était levé sous un horrible cagnard et des vents venant du désert poussait déjà des nuages de poussières sur le convois qui, pourtant, n'avait même pas pénétré dans le désert aride.

- Ça donne vraiment envie d'y aller tout ça, soupira Rick.

- Je ne te le fais pas dire. J'aurais aimé ne pas repasser par le désert, répondit Pako.

- On va passer par Pulvis ? Encore ?

- Non je ne pense pas ! répondit Frédéric de loin. On va peut-être l'apercevoir à l'horizon mais on ne va pas s'approcher.

- Très bien ! Ça me soulage.

- Ah oui j'oubliais ! J'ai fini le café ce matin j'espère que ça ne vous dérange pas.

Tout le monde tourna brusquement la tête vers lui.

- T'es pas sérieux ? T'as pas fait ça ? dit Suzanne exaspérée.

- Il n'en restait plus et je n'en bois jamais, je pouvais au moins choper la dernière tasse !

- La moindre des choses c'est de nous prévenir avant de tout finir ! répondit Alison. Maintenant on va galérer à en trouver !

- D'accord c'est bon ! On dirait que vous êtes accro, prenez l'exemple de Pako : il s'en sort bien avec ses infusions, ce n'est pas la mort .

- Le mal est fait ça ne sert à rien de s'énerver plus là dessus de tout façon, continua Alison en soupirant.

- Par contre tu recommences pas, tu ne vas pas t'en sortir comme ça je te le dis ! ajouta Suzanne pleine de rancune.

Deux coup de sifflet retentirent, c'était le signal de départ, les premiers chariots partirent et un bref désordre dû à la hâte encombra le passage.

Toute la bande sauta dans leur chariot et suivit le convoi. Cette fois-ci, c'était Frédéric qui conduisait avec Alison lui tenant compagnie. À l'arrière du chariot, c'était une succession de petits jeux, de diverses gamineries auxquelles Alison, trop grave et sérieuse, ne se prêtait jamais.

Le paysage était triste et monotone, des dunes, des dunes, toujours des dunes, des dunes de petites tailles modifiant à peine la forme de l'horizon, où les seules surprises étaient des débris sans intérêt, des morceaux de on-ne-sait-quoi qui parsemaient le paysage mêlé aux quelques roches avec cette sorte d'étrange poussière qui est un semblant de sable et de cendre.

Malgré l' ennuyeux paysage, le voyage ne l'était pas autant. Les chariots communiquaient constamment entre eux avec de grands gestes comme par exemple : faire bouger sa main verticalement devant son visage signifiait de rester en alerte car la zone est dangereuse, serrer le point en le tendant bien haut et descendre le coude successivement indiquait des sables mouvants sur la route, former deux ronds avec les mains et indiquer un nombre et une/des direction signalait une présence de chariots ou encore montrer sa mains droit comme un 'i' et indiquer un nombre et une direction signalait la présence d'animaux.

Concernant le chariot de la bande c'était Alison qui gérait cette constante communication, à la base c'était censé être Suzanne, mais elle était incapable de retenir toutes ces gestuelles abstraites. C'est pour ça qu'elle se retrouve à l'arrière à affronter l'ennui du voyage avec Rick et Pako. Enfin, surtout Rick, Pako s'était mit en tête de tous les dessiner et il n'a pas sortit le museau de son carnet depuis un certains temps.

Elle ne lui reproche pas d'utiliser le carnet qu'elle lui a offert non, mais c'est que Rick... il est sympa mais vraiment faut qu'il apprenne à grandir des moments.

- Et tu sais ce qu'il lui dit ?! dit Rick très fort et près du visage de Suzanne.

- Je ne sais pas ? répondit elle avec un sourire maladroit.

- ''Non ce n'est pas pour les chiens'' !

Et il rit en plus...

- T'es bien gentil Rick, mais tu me l'as déjà racontée celle-là.

- Ah oui ? Quand ?

- Il n'y a pas moins d'une horas, même pas.

- Ah...

- T'inquiète ça va, essaye juste de renouveler ton répertoire de blagues...

- Bon... Hé Pako tu fais quoi ?! Tu ne m'as toujours pas montré !

- Oh heu... Et bien, là j'essaye juste de dessiner Suzanne... Mais j'ai vraiment du mal avec son museau.

Pako sortit le museau de son carnet pour regarder Suzanne. Mais un épais nuage de poussière coupé d'une fumée noir venant de l'autre côté des dunes l'intrigua.

- Mais qu'est-ce que c'est ... dit il en posant son carnet. Alison ? Regarde à ta droite. C'est normal ça ?

- Non absolument pas. Sortez les armes des torchons, on ne sait jamais.

Alison se mit debout et siffla longuement pour appeler le chariot qu'ils précèdent. Elle montra ensuite le nuage de poussière... L'alerte était lancée, le chariot de devant fit passer le message à toute la file.

C'est alors qu'un autre nuage de poussière fut repéré de l'autre côté du convois.

- Bon ok là c'est mauvais signe, ajouta Alison. Planquez vous derrière les tonneaux, ce qu'ils veulent c'est l'eau, ils n'ont pas intérêt à tirer dessus mais ne vous abritez pas derrière la chaudière, il faut impérativement les empêcher de l'endommager.

Soudainement, un chariot sortit du nuage de poussière de gauche et se mit à rouler près du leur.

Trois animaux enveloppé dans des bandages se trouvaient à bord... et brandissait des fusils.

Frédéric dans un réflexe surprenant, lâcha les commandes et prit son fusil pour tirer en automatique. Alison plongea littéralement sur ses genoux pour rattraper les leviers et le contrôle du chariot.

Sous les rafales de Frédéric, le premier chariot vira tout de suite pour retourner derrière les dunes.

- Rick ! Prend les commandes ! T'es le seul à avoir un pistolet ! Suzanne, balance plus de bois dans la chaudière, il faut accélérer !

Tous s'exécutèrent. Mais un autre chariot surgi à son tour de l'autre côté du convois, cette fois-ci, au niveau du chariot juste devant eux.

Alison ouvrit le feu tout de suite et les assaillants se retrouvèrent pris entre deux feux. Malgré ce déluge de balles, l'un d'entre eux brandit un petit objet qu'il lança dans les roues du chariot. Dans une violente détonation, une roue du chariot sauta et se retourna brusquement, projetant tout les occupants sur la route.

Rick vira de justesse pour éviter la carcasse.

- C'était quoi ça ?!

- Des grenades ! répondit Alison. Ne les laissez pas s'approcher du chariot !

C'est alors que le chariot des pillards freina brusquement pour se retrouver à coté de celui de la bande.

Plusieurs tires filèrent en direction de Rick qui riposta immédiatement et toucha leur pilote à l'épaule. Le pillard perdit le contrôle de son chariot et vint heurter celui de la bande. Ils se retrouvèrent museau à museau durant l'espace d'un instant suffisant pour qu'un tire touche Suzanne au flanc droit qui tomba entre les tonneaux.

- Suzanne est touchée ! cria Pako.

- T'inquiète j'ai ! répondis Alison. Couvre nous c'est tout, je gère !

Elle alla au près de Suzanne.

- Ça va ma grosse ?

- Ouais t'inquiète, c'est juste un point de côté. J'en ai juste pour deux minutes.

- Ne fait pas l'idiote. Montre moi ça.

- Je vais bien je te dis, ne me touche pas.

- Arrête. Ne joue pas à l'héroïne ! Je déteste ça. Si tu perds trop de sang on ne pourra jamais t'en donner assez ! Ce n'est pas le moment.

- Ce n'est pas le moment d'avoir un poids dans un moment pareil t'as raison ! Va aider les autres.

- Rah la tête de mule ici ! Tu nous aides pas là ! Ce n'est pas le moment d'avoir une morte sur les bras alors laisse moi faire.

Alison essaya quand-même d'écarter les mains de Suzanne qui compressait la plaie.

- Non ! Ne...

Suzanne tourna la tête vers Alison en grognant agressivement.

- Oh ok ! Je ne touche à rien ! répondit elle en levant les mains. J'espère que tu sais ce que tu fais.

Alison se leva pour récupérer son fusil.

- Mais qu'est-ce que tu fous ?! Elle est blessée je te rappelle ! lança Frédéric.

- Cette tête de mule ne veut pas que je la touche ! Et j'ai envie de garder cinq doigts dans chaque mains !

- Ce n'est vraiment pas le moment pour ce genre d'ânerie. Dis moi au moins s'il y a un trou de sortie !

Alison se pencha à nouveau sur Suzanne qui était roulée en boule sur le côté gauche qui laissait paraître une deuxième plaie de l'autre côté du flanc.

- Oui y'en a un ! Au flanc !

- Il faut qu'elle se décide à se laisser faire maintenant ! Elle ne pourra jamais comprimer les deux plaies toute seule.

- Écoute Suzanne laisse moi faire, t'es en trains de te vider ! Tu ne peux pas gérer cette blessure toute seule !

Suzanne ne répondit pas pendant un court moment.

- De toute manière vous ne me lâcherais pas la grappe si je m'entête...

Alison ouvrit tout de suite le sac à dos de Pako où il y avait du coton prévu pour ces blessures.

- Comprime plutôt avec ça, t'es en trains de faire n'importe quoi là !

Alison prit un gros morceau de coton et le comprima contre le troue de sortie.

- Allonge toi pour le maintenir et appuie toi dessus de tout ton poids, je reviendrais te les changer dès que je peux.

Quelques balles sifflèrent au dessus de la tête de Alison et l'une toucha un des tonneaux.

- Génial, maintenant c'est les tonneaux qui se font tirer dessus ! soupira t'elle. Vite ! Passez moi une planchette et des cloues !

- Et moi je suis à sec ! dit Frédéric. J'ai besoins qu'on me couvre aussi !

Tout à coups un autre chariot du convois fut touché par une grenade et parti en tête à queue avant qu'un chariot des assaillants le percuta dans un violent choc frontale.

Le chariot de la bande n'ayant que deux personnes en état de riposter était une proie facile, un chariot reviens à l'assaut toujours à la droite du leur, et à peine Pako avait vu le chariot que plusieurs tires faisaient exploser les planches du chariots autour de lui. Pendant qu'il se mettait à couvert, une autre grenade tomba à ses côtés. Sans réfléchir, il l'attrapa et la renvoya sur le chariot des pillards alors qu'il se faisait toujours canarder. Elle explosa près de leur chaudière qui embrasa instantanément le chariot et avant de partir dans le décors. Après quelques échange de tires et la perte de ces deux chariots, les pillards sonnèrent la retraite et se dispersèrent dans le désert.

- Ils sont partit ? dit Rick.

- Sûrement, ils viennent de perdre deux chariots, ils ne peuvent pas se permettre d'en perdre d'autres et puis, ils ont eu ce qu'ils veulent, ils vont prendre les tonneaux dans les carcasses des chariots détruits et c'est tout.

Pako alla au près de Suzanne.

- Ça va tu tiens le coup ? dit il à Suzanne.

- Ouais ça va j'en ais connu d'autre tu sais, répondit elle avec une voix un peu étranglée.

- Montre moi ça, je vais voir si l'hémorragie a été arrêtée.

Il enleva délicatement le coton saturé de sang pour regarder la plaie et fit pareil pour celle du dos.

- Bon ça va, ça saigne bien moins qu'avant, il faut continuer à comprimer. Par contre il faut impérativement la nettoyer, il y a trop de poussière dans chacune des plaies, si on en fait rien ça risque de dégénérer.

- C'est ce qui arrive quand on refuse de se faire soigner, ajouta Alison. Je t'avais dit de te laisser faire, je ne comprend vraiment pas pourquoi t'as fait ça, ce n'est vraiment pas raisonnable.

- Ce n'est pas grave l'erreur est faite. Il faut juste essayer de la nettoyer avec ce qu'on a, mais on ne peut pas faire ça sur le chariot, on risque d'aggraver la chose. Pour l'instant on comprime et on évite que ça se salisse plus.

- Quand est-ce que l'on pourra s'occuper d'elle correctement alors ? dit Rick.

- Ce soir si on est sorti du désert. Il faut juste qu'elle tienne le coup. D'ailleurs, tu n'as pas trop mal Suzanne ?

- Ça va je peux tenir... mais j'aimerais bien qu'on me file quelque chose pour apaiser la douleur.

- C'est vrai, si tu dois supporter ça durant tout le voyage autant apaiser la douleur. Tu n'as rien pour ça Frédéric ?

- Non, il faudra faire avec ce qu'on a. Tout ce que tu peux faire c'est te débrouiller pour qu'elle bouge le moins possible durant le voyage. Dormir un peu ne lui fera pas de mal aussi. Mais avant ça nous devons lui faire un bandage digne de ce nom, on ne va pas maintenir les compresses à la mains durant tout le voyage.

- C'est vrai, je vais déchirer un de mes tee-shirt.

Pako prit son seuls tee-shirt à manche longue de rechange et le déchira en deux sous les manches afin de faire un bandage le plus long possible.

- Bon, continua-t'il, maintenant il faut que tu t'assois et que tu découvre ton ventre Suzanne. Juste le temps de mettre le bandage. Alison tu peux l'aider ?

Alison l'aida à s'asseoir comme elle le pouvait.

- Sers les crocs, dit Alison à Suzanne avant d'enlever les compresses de coton, découvrir le ventre de Suzanne, changer les compresse à l'aide de Pako et serrer le bandage. Une opération douloureuse sachant que son habit s'étaient ventousé aux plaies.

- En espérant que ça tienne le coup, dit Pako.

- Et maintenant ?

- Je vais rester à côté d'elle pour la surveiller. Frédéric se chargera de nettoyer les plaies dès qu'on pourra.

- Attendez... Ça remet un tas de choses en question cette blessure, interrompu Suzanne.

- Comment ça ?

- On est censé déserter du convois je te rappel. Comment on va faire si je suis blessée ?

Pako ne répondit pas.

- Je vous avez dit que je serais un poids.

- Repose toi Suzanne. On y réfléchira plus tard. Pour l'instant on va te caler entre les sacs histoire que tu sois bien.

Ils apportèrent tous leur sac et les calèrent entre Suzanne et les tonneaux. Pako s'assit à côté d'elle qui posa sa tête sur les genoux de Pako.

Journal page cinq.

Il n'y a pas à dire, le pire moment pour que l'un d'entre nous se fasse trouer la peau et cette personne est Suzanne. Elle en a vu d'autres oui, si ce n'était que ça je ne m'inquièterais pas. Sa blessure n'est pas si grave. Ce qui m'inquiète c'est cette poussière, elle s'est tout de suite logée dans les plaies, le fait qu'elle ne s'est pas laissée soigner après être avoir été touchée n'a sûrement pas aidé à ce niveau là. Avec ça, l'omniprésence de la poussière rend impossible tout nettoyage des plaies sur le chariot tant que nous sommes dans ce désert. Combien même on regagnerait la forêt ce soir pour nettoyer la plaie, une infection pourrait se développer. On n'a vraiment pas de quoi soigner ce genre de complication et je doute que ce foutu Iguane accepte de nous aider. J'espère qu'elle sera au moins en état de marcher pour s'enfuir une fois à Périté, il nous reste deux jours de trajets avant d'y arriver, deux jours à la soigner dans un chariot transformé en passoire après l'affrontement dans le désert. Je ne comprends vraiment pas pourquoi ces chariots n'ont même pas été renforcé, c'est évident qu'un convoi comme celui-là est une cible de choix. À mon plus grand étonnement, aucune partie vitale du chariot n'a été touchée, la chaudière comme le mécanisme directionnel n'a été endommagé, un tonneau à peut-être été touché mais vite rebouché. Il nous reste plus qu'à...

- T'écris quoi ? dit Suzanne qui avait la tête appuyée sur le genoux et entre les bras de Pako qui écrivait.

- Rien, je fais juste le point de cette journée, comme d'habitude...

- Ça ne va pas ? T'as l'air inquiet.

- Quelle question ? Bien sûr que je suis inquiet !

- Pour moi ? Moh , t'es mignon ! Ce n'est pas comme si c'était la première fois, tu n'as pas à t'inquiéter.

- Oui c'est vrai...

Suzanne réfléchie un court instant.

- Hé ça me rappel la fois où quelqu'un avait essayé de braquer le comptoir quand j'avais douze ans.

- Ha oui, il t'avait troué la jambe c'est ça ?

- Ouais, tirer sur une gamine de douze ans... y'a vraiment des gens qui n'ont aucune morale. Heureusement que les habitants de Neotasgos sont sympa, sinon le gars aurait vidé le comptoir.

- Je me souviens, la galère que ça été, dit il avec un rire soudain.

- Toujours aussi compliqué de trouver un médecin pas vrai ?

- Forcément, c'était il y a à peine quatre ans.

- Déjà !

- Tu as l'air franchement détendue pour une blessée de guerre.

- Tu préfères que je braille durant tout le trajet ? Je peux tu sais.

- Je sais mais...

Elle se mit à simuler une douleur en gesticulant exagérément.

- Arrête tu vas te faire mal.

- Aïe.. Oui c'est vrai...

- Détendue ou pas tu reste blessée, tu devrais faire plus attention.

- Si on ne peut même plus s'amuser...

Pako eut rire soudain.

- T'as beau être intelligente mais tu restes bêbête par moment.

- Toi aussi tu sais, dit elle en lui touchant le bout du museau.

- Même blessée tu ne t'arrêtes jamais, dit il en lui touchant le museau en retour.

- C'est pourquoi je peux t'assurer que je vais m'en sortir. Tu n'as pas à t'inquiéter, dit elle en lui caressant la joue.

Pourtant, Pako gardait son air inquiet, les oreilles rabattu vers l'arrière. Suzanne le vit, arrêta de lui caresser et tourna la tête pour dormir.

Le soir même, le convoi sortit enfin du désert. Ils débarquèrent immédiatement après avoir passer la lisière de la forêt.

© Macarez Clément,
книга «Après eux, La ruée vers l'eau.».
Les ailes de chacun.
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