Recess
Pdv omniscient
Un matin comme un autre, Gon était assis sur une chaise des couloirs près des casiers, dans le but de trier ses affaires dans son sac. Il se hâtait pour pouvoir rejoindre ses amis à l'extérieur, ils devaient l'attendre depuis un moment. Mais plus loin, derrière le coin du mur, un autre garçon se parlait à lui seul. Appuyé contre les portes de casiers, il se répétait en boucle les mots qu'il voulait prononcer.
–– Tu veux aller danser ?. Non. Est-ce que tu voudrais venir au bal, avec moi ? Oh, et puis merde.
Il soupira en fermant les yeux. C'était l'instant rêvé. Gon, ce garçon qui l'attirait tant, et à qui il pensait tous les jours, était seul juste à côté. De plus, le bal de fin d'année approchait. C'était l'occasion de lui demander de l'accompagner, juste pour une soirée, discuter de tout et de rien et apprendre à le connaître. Il voulait lui dévoiler ses secrets, notamment ce poème qu'il lui avait envoyé. C'était maintenant ou jamais.
Sans plus attendre, il se retourna pour marcher en direction du Freecss, celui-ci ayant toujours le nez dans ses manuels en vrac. Mais soudain, il se prit un coup d'épaule de quelqu'un qui passait à côté de lui à toute vitesse. Il releva les yeux. Illumi lui offrit un regard mauvais avant de poursuivre son chemin. Le jeune Principal s'asseya aux côtés de Gon, qui sursauta en le voyant. Il ne semblait pas vouloir lui donner de punition. Plus surprenant, il lui souriait de manière sympathique. L'auteur de la lettre retourna se cacher derrière les casiers, observant la scène de ses yeux de chat.
–– Salut.
"Salut"? Gon avait-il bien entendu ? Depuis quand le Principal s'adressait-il à lui de cette manière ? Depuis quand s'adressait-il aux élèves tout court ? Méfiant, Gon lui répondit tout de même d'une petite voix.
–– Salut...
–– Tout va bien ?
De mieux en mieux, le voilà qui entamait la discussion comme s'ils étaient des amis de longues dates. Il devait avoir perdu la tête pour lui parler ainsi. Gon hocha cependant la tête. Puis il demanda, sur la défensive.
–– Qu'est-ce que vous me voulez ?
–– Pas de vouvoiement, je t'en pries, nous n'avons que quelques années d'écart. Bien, je te cherchais parce que je voulais...
Illumi hésita. Il avait le regard ailleurs, fixant un point imaginaire avec un petit sourire. Gon ne le reconnaissait plus. Était-ce bien le chef d'établissement qui s'exprimait ainsi ? Il avait l'impression d'être face à une tout autre personne. L'autre élève derrière les casiers, tendait l'oreille.
–– Je voulais te demander si... tu voulais être mon cavalier au bal de promotion.
Gon écarquilla les yeux. Il pensait à un piège, ou une mauvaise blague. Mais le jeune homme aux longs cheveux noirs semblait sérieux et même gêné de ses paroles. Gon était figé de stupeur.
–– V-vraiment ?
–– Bien sûr, lui répondit-il en se rapprochant un peu plus de lui. Je ne sais pas si tu as reçu mon écrit, mais je t'avais glissé une letrre dans ton casier il y a quelques jours.
Le jeune élève ne l'écoutait plus. Il était perdu dans ses pensées. Alors c'était lui, l'auteur de ce poème subliminal ? En remarquant cette spécifique touche poétique, il avait pensé que l'auteur était une fille. Apparemment, il s'était trompé sur toute la ligne. Il semblait déçu de cette découverte. Et soudain, le souvenir d'un échange avec son groupe d'amis fit surface dans son esprit.
~~
–– Nooon, tu as d'abord cru que c'était moi l'auteur de cette lettre ?! s'exclama Kurapika avant d'éclater de rire.
–– Oh ça va, arrête de te moquer, j'étais fatigué et pour moi ce style d'écriture te correspondait !
–– Pas trop déçu, j'espère ? pouffa Leolio en lui donnant un coup de coude dans l'épaule. De toute façon, tu n'avais aucune chance. Kurapika est raide dingue de moi.
–– Alors ça, ça m'étonnerait, dit le concerné en frappant l'arrière du crâne de Leolio avec son livre.
–– Je continues de penser que c'est une fille qui t'as écrit cette lettre, s'incrusta Biscky à leurs côtés. Les filles adorent les poèmes d'amour, elles trouvent ça romantique de se jouer les mystérieuses.
–– Elles ont des goûts étranges les filles de ton entourage, répondit Alluka qui lui tenait le bras. En plus, Gon est moche comme un pou, aucune fille ne peut le trouver beau, ironisa-t-elle avant de se faire pousser dans le mur par son meilleur ami.
–– Soyez sérieux un minimum ! La fin de l'année approche, et cet expéditeur pourrait être n'importe qui.
Kurapika haussa des épaules.
–– Ça pourrait être une simple mauvaise blague de Pitou. Elle cherche peut-être à te piéger.
–– Dans ce cas, la meilleure solution est de te rapprocher d'elle ! Qui sait, peut-être que Pitou te méprise parce qu'elle n'assume pas le fait d'avoir des sentiments pour toi, s'exclama Alluka. Ce serait si drôle de finir l'année sur cette découverte !
–– Tu pars beaucoup trop loin, Alluka, soupira Gon désespérément ironique.
–– Tu peux tenter le tout pour le tout, évoqua Leolio comme conclusion. Tu sais ce que l'on dit : garde tes amis proches, et tes ennemis plus encore.
–– De qui est-ce que tu cites cela ? demanda Kurapika en haussant un sourcil, amusé.
–– De moi-même, répondit simplement Leolio avant que ses amis ne se mettent à rire à l'unisson.
~~
–– J'adorerais y aller avec toi.
Illumi s'arrêta dans sa lancée pour regarder Gon dans les yeux. Il était plus que ravi de cette réponse.
–– Vraiment ?
–– Oui, j'accepte d'être ton cavalier.
Le Principal lui offrit un sourire avant de se relever sur pieds après un moment de flottement assez malaisant. Avant de partir sans se retourner, il lui dit d'une voix euphorique.
–– Super, on se retrouve à dix neuf heures pétante dans le hall de l'école. Tu verras, ce sera une soirée inoubliable !
Puis il partit en lui adressant un dernier signe de la main. Il passa à grandes enjambées devant les casiers, où un jeune garçon s'y trouvait quelques instants auparavant. Cet élève s'était enfui comme une ombre, laissant couler des filets d'eau silencieux dans les couloirs.
~~
La nuit du bal annuel de K-12 finit par arriver. Tout le bâtiment était décoré et illuminé de lumières et de guirlandes féériques. C'était le grand soir, pour les élèves comme la bande de Gon. Ses amis n'étaient pas accompagnés, ils s'étaient réunis pour pouvoir mettre au point les dernières directives du plan d'évasion. Leolio était à sa tête. Dans la grande salle de bal, sous les spots et les paillettes, il donnait les dernières indications à ses amis, leur rappelant leurs rôles à jouer. Sur la piste de danse et aux alentours, les élèves bavardaient, chantaient et dansaient joyeusement. La fin de l'année scolaire était toujours un bon moment de détente. Elle allait bientôt sonner leur libération, sans qu'ils le sachent.
De l'autre côté de la piste, Pitou cherchait Kaito des yeux. Elle était sa petite amie, alors il lui appartenait. Il était évident qu'elle était sa cavalière, pas besoin de faire de demande. La jeune fille patienta longtemps, très longtemps. Elle s'appuya sur le buffet en soupirant. Est-ce qu'il avait osé la planter là ? Elle s'était faite plus apprêtée qu'elle ne l'avait jamais été. Ce n'était pas comme cela que les choses devaient se produire. C'était elle qui larguait et posait des lapins, pas l'inverse. Elle commença à se mordre la lèvre, stressée pour son rang d'être vue seule à l'événement le plus important de l'année.
Enfin du coin de l'œil, elle aperçut Kaito qui entrait. Elle soupira de soulagement, et se dirigea vers lui à toute vitesse.
–– Bébé, qu'est-ce que tu faisais, j'ai cru que-
Elle se figea net en découvrant qu'il n'était pas arrivé seul. Ponzu, sa meilleure amie ou confidente, lui tenait un peu trop le bras pour ne faire que l'accompagner. Le rouge monta au cerveau de la fille populaire.
–– Kaito, tu la tiens par le bras ? Pourquoi je te vois arriver avec elle ? Tu as perdu la tête ?! Je suis ta petite amie officielle !
Kaito souffla d'exaspération sans lui répondre pour autant. Frustrée de son silence, elle s'attaqua alors à sa "meilleure" amie.
–– Ponzu, comment tu peux me faire ça, il est à moi, tu le sais !
Pour toute réponse, sa camarade aux cheveux turquoise retourna ses yeux dans ceux de Kaito, et enserra ses doigts dans ceux du jeune homme. Pitou fit volte-face vers sa bande de moutons, qui se tenait non loin de là.
–– Vous allez juste rester plantées là comme des idiotes et regarder ce qui se passe sans réagir ?
Une fois de plus, ses sois disantes amies ne lui répondirent pas.
–– Je vous ai créé, vous n'êtes rien sans moi !
Pitou poussa un cri de rage, et s'enfuya au pas de course à travers la foule en jouant des coudes. Elle n'était pas triste. Seulement profondément blessée.
Devant la buvette, Kurapika avait les yeux tournés vers le plafond, l'air songeur.
–– Vous ne trouvez pas que cet endroit est trop magnifique, les gars ?
–– Si, répondit Leolio. Mais il le serait encore plus parsemé de cendres.
Biscky serra son gobelet entre ses mains frêles.
–– Je suis vraiment nerveuse. Est-ce qu'on est obligés de le faire de cette manière ?
Alluka lui prit doucement l'épaule, et lui souria en parlant comme à un petit enfant.
–– Ne t'en fais pas, tout se déroulera à merveille. On y travaille depuis des semaines. Ce soir, c'est le soir.
Leolio hocha la tête. Il était toujours très sûr de lui.
–– Restes simplement fidèle au plan. Tu n'as pas à t'en faire, il est méticuleux et retouché à ma sauce.
Biscky ne savait pas vraiment à quoi s'attendre avec Leolio. Il était si imprévisible que les choses pouvaient tourner au vinaigre à n'importe quel moment. Mais elle était son amie, elle se devait de lui faire confiance.
Aux portes d'entrée, un garçon aux cheveux brun et à reflets verts entrait à son tour. Il était encore une fois en retard, mais Illumi ne s'était pas présenté dans le hall. Même s'il s'y attendait, il en était quelques peu blessé. Tout comme Pitou qui arrivait dans sa direction. Gon se figea sur place. Pitou ne le vit pas et se cogna dans son torse. Elle ouvrit les yeux et se recula bien vite. Gon essayait de percevoir son expression, mais elle s'essuyait les joues de ses mains. Est-ce qu'elle était en train de... Pleurer ? La célèbre et populaire Pitou pleurait à son évènement ? Voilà quelque chose d'impropable.
–– Pitou, qu'est-ce qui t'arrive ? Il s'est passé quelque chose à la fête ?
Il jeta un œil derrière son épaule pour voir la piste de danse. Il reconnut Kaito, le petit ami de Pitou. Enfin, difficile à affirmer vu que celui-ci dansait au bras d'une autre élève en riant aux éclats. Il fit rapidement le lien.
–– C'est Kaito qui t'as planté ?
–– C'est pas tes affaires, Pleurnichard !
Et elle reprit sa course à ces mots pour passer derrière lui et descendre les escaliers quatre à quatre. Gon soupira en la voyant partir. Même si Pitou semblait intouchable, elle faisait de la peine au jeune homme. Il se retourna vers la grande salle tout de même pour chercher ses amis dans la fête.
Dans un coin de la salle, un élève que personne ne remarquait jamais l'observait entrer dans la salle. Il était ébloui de sa personne, encore plus sous les lumières de la fête de fin d'année. Ses joues se teintèrent de rose. Il remarqua que lui aussi était seul. Alors Illumi n'était finalement plus son cavalier ? C'était une opportunité inattendue ! Mais il n'y arrivait pas. Les fesses collées à sa chaise, il n'arrivait pas à avancer vers lui. Il se haïssait lui-même d'être aussi réservé. Il ne remarqua même pas que le verre de punch qu'il se servait débordait. Il sursauta en sentant son costume se tremper. Il attrapa une serviette pour s'essuyer discrètement derrière le buffet.
Kurapika fixait sa montre des yeux, observant la petite aiguille avancer petit à petit dans le cadrant. Puis soudain, une petite alarme se fit entendre. Il s'adressa à ses compagnons.
–– C'est l'heure H. Les gars, vous savez quoi faire.
Tous hochèrent la tête, déterminés à accomplir la "grande évasion". Biscky tourna les yeux vers la piste. Elle fronça les sourcils en désignant un être vert qui arpentait la salle.
–– Attendez, qu'est-ce qu'il fabrique ici ?
Ses trois amis se retournèrent dans la direction qu'elle pointait. Leolio soupira d'exaspération en reconnaissant Gon, qui se tenait près du buffet. Il semblait avoir l'air triste. Alluka entama le pas, décidée à aller lui remonter les bretelles. Elle croisa un garçon qui s'appelait Tompa, et qui lui demanda si elle voulait bien lui accorder une danse. Elle l'envoya bouler, et se remit en marche. Kurapika, Biscky et Leolio la suivèrent, l'air confus.
Gon sourit en voyant enfin son groupe d'amis, mais perdit vite celui-ci en voyant la mine énervée de sa meilleure amie.
–– Toi ! Qu'est-ce que tu fais là ? Tu ne peux pas avoir pris contrôle de l'esprit d'Illumi en si peu de temps comme c'était prévu.
Kurapika se plaça à ses côtés.
–– Elle n'a pas tort, tu devrais être à l'étage normalement.
–– Ha ? Pourquoi donc ? demanda Gon en les regardant d'un air perdu.
–– Les hauts parleurs, Gon ! intervint Leolio, maître du plan. Tu ne te rappelles pas ? Ton rôle c'était de nous ouvrir une brèche pour faire évacuer tout le monde, c'est le point culminant du plan !
Gon se passa la main derrière le crâne. Il leur devait quelques explications, c'était inévitable.
–– Justement, à propos de ça... Illumi m'a demandé d'être son cavalier pour ce soir il y a peu de temps.
–– QUOI ?! s'exclama le groupe en chœur.
–– Dis-moi que tu n'es pas sérieux, hésita Alluka. Tu as laissé ce tyran te manipuler ?
–– Non, en fait- commença le brun avant de se faire couper par Biscky.
–– Gon, je croyais que tu étais plus fort que ça, on a pas à s'abaisser à leurs niveaux. Tu ne peux pas tout lâcher pour une simple attirance. Crois-moi, j'y suis passée et tu sais comment ça a fini.
Elle avait encore de l'espoir en son ami qui lui avait fait sortir de la boulimie. Ses amis voulaient bien la croire aussi. Mais tout ce que Gon fit, c'est s'excuser d'un "pardon les gars". Ils écarquillèrent les yeux, choqué de ce comportement. Ce n'était pas dans la nature de Gon d'être ainsi. Il reprit la parole en balbutiant.
–– Écoutez, je ne sais pas ce que j'ai voulu faire, mais je suis...
–– ... devenu égoïste ? compléta Alluka, le visage sombre.
Gon ouvrit la bouche pour parler, mais rien n'en sortit. Il regarda ses amis un à un pour leur chercher du soutien. Mais Leolio lui fronçait les sourcils. Kurapika regardait ailleurs, et Biscky avait l'air triste. Les mots ne sortaient pas. Seulement les larmes coulaient de ses yeux.
–– Je... Excusez moi...
Et à ces mots, il tourna les talons pour emprunter un couloir de l'école. Alluka voulu le suivre, mais Kurapika la retenit.
–– Laisse lui un instant. Ça ira mieux après.
~~
Gon ne savait plus quoi faire, ni où aller. Sa vue se troublait. Il poussa une porte au hasard et tomba sur les cabinets. Il s'appuya contre le lavabo, et regarda son visage affreux dans la glace.
–– Tu as foiré tout le plan. Et tout ça pour un fils de Satan qui ne t'aime même pas. Bien joué, idiot.
Il pencha son visage vers ses avants bras pour pleurer de plus belle dans l'évier. Soudain, il sent une présence derrière lui. Il se redressa avant de voir le reflet de celle qui avait interrompu ses pleurs.
–– Hey, arrête un peu de faire ce que toute l'école pense de toi.
Il fit volte-face. Et ne tarda pas à venir étreigner la personne présente dans ses bras.
–– Mito !
~~
La fête battait toujours son plein dans la grande salle de réception de l'école. Les autres élèves continuaient à vaquer à leurs occupations, ne se doutant pas de qui allait bientôt leur arriver. Le jeune homme solitaire avait vu Gon s'en aller, et se demandait ce qui avait bien pu se passer avec ses amis pour qu'il paraisse si triste. Ceux-ci étaient toujours regroupés, bavardant d'autres sujets comme pour oublier ce qu'il venait de se passer. Et soudain, les hauts-parleurs résonnèrent une première fois dans la vaste pièce. Tout le monde se boucha les oreilles au premier son strident. La musique s'arrêta.
–– Bonsoir chers élèves, et bienvenue au 150ème bal de fin d'année de K-12, dit le jeune Principal de son bureau, accompagné de son micro.
–– Ça ne fait pas parti du plan, ça ! chuchota précipitamment Leolio à ses amis sous les quelques applaudissements des élèves.
Illumi toussota dans les hauts-parleurs pour mettre fin aux bruits de satisfaction des élèves.
–– Maintenant, avant que je vous laisse retourner danser toute la nuit, j'aimerais adresser un petit message à quelqu'un en particulier.
Les élèves se regardaient avec incompréhension. Biscky hocha un sourcil en regardant ses amis. Personne ne comprenait la situation. Et personne ne s'attendait aux mots du Principal, ni de qui voulait-il bien parler.
–– Gon Freecss. Je sais ce que tu manigances. Je t'observe depuis un moment déjà.
Alluka se pinça les lèvres. Ça sonnait mal, très mal, pour Gon comme pour eux tous.
–– Est-ce que tu pensais vraiment que tu pouvais juste tuer mon père, continuer ton année tranquillement, avoir ta petite danse avec moi et t'enfuir ?
–– Ben ouais, dit Leolio sous le regard sévère de Kurapika qui lui intima de se taire.
Un rire glacial retentit dans les hauts-parleurs. Peu importe qui pouvait l'entendre ce soir, il en aurait eu des frissons dans le dos. De la mine incomprise, les élèves devenirent inquiets et affolés.
–– Je ne pense pas que vous partirez, chères dernières années. Pas ce soir.
Un garçon nommé Chrollo sortit de la foule pour se précipiter vers la sortie. Il tenta de déclencher la poignée, en vain.
–– Les portes sont verrouillées ! s'exclama le jeune homme en s'adressant aux élèves d'un air paniqué.
–– Amusez-vous tant que vous le pouvez encore, résonnèrent les hauts parleurs. Dansez. DANSEZ !
Une instrumentale douce débuta soudainement, et aussitôt les élèves se retrouvèrent par deux. Chaque fille se retrouvait aux bras d'un garçon, et vice-versa. Le rose avec le bleu.
J'étais trop jeune pour voir la vérité
Sur les genoux de grand-mère je sentais son doux parfum
Alluka était face à Kurapika, qui lui tenait la taille et elle les épaules. Elle rougissa sans comprendre pourquoi. À leurs côtés, Leolio et Biscky étaient également dans la même position. Les amis se regardaient avec incompréhension.
Trop naïf pour me rendre compte
Des mots qu'elle me chuchotait en brossant mes cheveux
Il en fut ainsi pour toutes les autres personnes de la pièce. Tout le monde se retrouva au bras de quelqu'un d'autre, qu'il ne connaissait ou non.
Les gens te diront
"Si tu veux faire une pause, quelqu'un prendra ta place
Les gens essayeront
De te dire que tout va bien
Avec des billets dans leurs yeux
Souviens-toi seulement
Leurs corps ne répondaient plus d' eux-mêmes. Ils dansaient à travers la salle, sans aucun contrôle sur eux. Une fois de plus, Illumi avait réussi à prendre le contrôle de la situation.
Ne les laisse pas te foutre en l'air chéri
Ne les laisse pas essayer de prendre le dessus
Ne les laisse pas te faire du mal chéri
–– Qu'est-ce qui nous arrive ? demanda Alluka en essayant de couvrir la musique de sa voix.
–– J-Je ne sais pas, bégaya son partenaire, Kurapika face à elle alors qu'ils tournaient sur eux-mêmes.
–– Je ne peux même pas me gratter ! s'ingurgita Leolio.
–– J'ai besoin de m'arrêter... se plaigna Biscky en soupirant.
Dis seulement : "Pouce, j'ai besoin d'une pause"
–– On doit faire quelque chose, les gars, dit Alluka. Où est passé Gon bon sang ?
Assis dans ma chambre, j'observe tout ce que j'ai fais
Tout ce que je voulais c'est arriver à un but dans ma vie
Je devrais être heureux, mais je n'arrive pas à sortir du lit
Je stress à propos de ces voix qui crient dans ma tête
–– Je ne sais pas, il n'est pas revenu depuis tout à l'heure. On aurait bien besoin de lui par moment ! s'exclama Leolio qui faisait tourner Biscky de sa main sans le vouloir.
–– En vérité, j'adore danser, mais ce truc est ridicule, dit Kurapika à son tour.
–– On doit retrouver Gon et arrêter ça maintenant si on ne veut pas mourir d'épuisement ! s'écria Alluka alors que Kurapika la penchait jusqu'à presque toucher le sol.
Quand sera mon heure ?
Perdu dans mes pensées
Perdu, je n'arrive pas à trouver l'euphorie
Et lorsque je suis vexé
Je pense alors
Aux mots qu'elle me disait
Biscky et Leolio, de leur côté, tentaient de se concentrer pour utiliser leurs pouvoirs. Mais malgré toute la détermination qu'ils y mettaient, ils n'y arrivèrent pas. La situation semblait désespérée pour tous. Leurs jambes étaient en feu, pour qui que cela soit. Pitou, Kaito, Ponzu, Zushi, Meruem, Komugi, Pufu, Phinks, Nobunaga, Shizuku, Feitan, Machi, Chrollo, Sharnalk et même Tompa n'arrivaient à voir d'issue. Ils semblaient coincés dans un manège interminable, un tourbillon de couleur et de paillettes sur une piste de danse. Pour la première fois, l'ensemble des élèves partageaient la même douleur physique et mental.
~~
~Yaya, 26 août 2020.
Un matin comme un autre, Gon était assis sur une chaise des couloirs près des casiers, dans le but de trier ses affaires dans son sac. Il se hâtait pour pouvoir rejoindre ses amis à l'extérieur, ils devaient l'attendre depuis un moment. Mais plus loin, derrière le coin du mur, un autre garçon se parlait à lui seul. Appuyé contre les portes de casiers, il se répétait en boucle les mots qu'il voulait prononcer.
–– Tu veux aller danser ?. Non. Est-ce que tu voudrais venir au bal, avec moi ? Oh, et puis merde.
Il soupira en fermant les yeux. C'était l'instant rêvé. Gon, ce garçon qui l'attirait tant, et à qui il pensait tous les jours, était seul juste à côté. De plus, le bal de fin d'année approchait. C'était l'occasion de lui demander de l'accompagner, juste pour une soirée, discuter de tout et de rien et apprendre à le connaître. Il voulait lui dévoiler ses secrets, notamment ce poème qu'il lui avait envoyé. C'était maintenant ou jamais.
Sans plus attendre, il se retourna pour marcher en direction du Freecss, celui-ci ayant toujours le nez dans ses manuels en vrac. Mais soudain, il se prit un coup d'épaule de quelqu'un qui passait à côté de lui à toute vitesse. Il releva les yeux. Illumi lui offrit un regard mauvais avant de poursuivre son chemin. Le jeune Principal s'asseya aux côtés de Gon, qui sursauta en le voyant. Il ne semblait pas vouloir lui donner de punition. Plus surprenant, il lui souriait de manière sympathique. L'auteur de la lettre retourna se cacher derrière les casiers, observant la scène de ses yeux de chat.
–– Salut.
"Salut"? Gon avait-il bien entendu ? Depuis quand le Principal s'adressait-il à lui de cette manière ? Depuis quand s'adressait-il aux élèves tout court ? Méfiant, Gon lui répondit tout de même d'une petite voix.
–– Salut...
–– Tout va bien ?
De mieux en mieux, le voilà qui entamait la discussion comme s'ils étaient des amis de longues dates. Il devait avoir perdu la tête pour lui parler ainsi. Gon hocha cependant la tête. Puis il demanda, sur la défensive.
–– Qu'est-ce que vous me voulez ?
–– Pas de vouvoiement, je t'en pries, nous n'avons que quelques années d'écart. Bien, je te cherchais parce que je voulais...
Illumi hésita. Il avait le regard ailleurs, fixant un point imaginaire avec un petit sourire. Gon ne le reconnaissait plus. Était-ce bien le chef d'établissement qui s'exprimait ainsi ? Il avait l'impression d'être face à une tout autre personne. L'autre élève derrière les casiers, tendait l'oreille.
–– Je voulais te demander si... tu voulais être mon cavalier au bal de promotion.
Gon écarquilla les yeux. Il pensait à un piège, ou une mauvaise blague. Mais le jeune homme aux longs cheveux noirs semblait sérieux et même gêné de ses paroles. Gon était figé de stupeur.
–– V-vraiment ?
–– Bien sûr, lui répondit-il en se rapprochant un peu plus de lui. Je ne sais pas si tu as reçu mon écrit, mais je t'avais glissé une letrre dans ton casier il y a quelques jours.
Le jeune élève ne l'écoutait plus. Il était perdu dans ses pensées. Alors c'était lui, l'auteur de ce poème subliminal ? En remarquant cette spécifique touche poétique, il avait pensé que l'auteur était une fille. Apparemment, il s'était trompé sur toute la ligne. Il semblait déçu de cette découverte. Et soudain, le souvenir d'un échange avec son groupe d'amis fit surface dans son esprit.
~~
–– Nooon, tu as d'abord cru que c'était moi l'auteur de cette lettre ?! s'exclama Kurapika avant d'éclater de rire.
–– Oh ça va, arrête de te moquer, j'étais fatigué et pour moi ce style d'écriture te correspondait !
–– Pas trop déçu, j'espère ? pouffa Leolio en lui donnant un coup de coude dans l'épaule. De toute façon, tu n'avais aucune chance. Kurapika est raide dingue de moi.
–– Alors ça, ça m'étonnerait, dit le concerné en frappant l'arrière du crâne de Leolio avec son livre.
–– Je continues de penser que c'est une fille qui t'as écrit cette lettre, s'incrusta Biscky à leurs côtés. Les filles adorent les poèmes d'amour, elles trouvent ça romantique de se jouer les mystérieuses.
–– Elles ont des goûts étranges les filles de ton entourage, répondit Alluka qui lui tenait le bras. En plus, Gon est moche comme un pou, aucune fille ne peut le trouver beau, ironisa-t-elle avant de se faire pousser dans le mur par son meilleur ami.
–– Soyez sérieux un minimum ! La fin de l'année approche, et cet expéditeur pourrait être n'importe qui.
Kurapika haussa des épaules.
–– Ça pourrait être une simple mauvaise blague de Pitou. Elle cherche peut-être à te piéger.
–– Dans ce cas, la meilleure solution est de te rapprocher d'elle ! Qui sait, peut-être que Pitou te méprise parce qu'elle n'assume pas le fait d'avoir des sentiments pour toi, s'exclama Alluka. Ce serait si drôle de finir l'année sur cette découverte !
–– Tu pars beaucoup trop loin, Alluka, soupira Gon désespérément ironique.
–– Tu peux tenter le tout pour le tout, évoqua Leolio comme conclusion. Tu sais ce que l'on dit : garde tes amis proches, et tes ennemis plus encore.
–– De qui est-ce que tu cites cela ? demanda Kurapika en haussant un sourcil, amusé.
–– De moi-même, répondit simplement Leolio avant que ses amis ne se mettent à rire à l'unisson.
~~
–– J'adorerais y aller avec toi.
Illumi s'arrêta dans sa lancée pour regarder Gon dans les yeux. Il était plus que ravi de cette réponse.
–– Vraiment ?
–– Oui, j'accepte d'être ton cavalier.
Le Principal lui offrit un sourire avant de se relever sur pieds après un moment de flottement assez malaisant. Avant de partir sans se retourner, il lui dit d'une voix euphorique.
–– Super, on se retrouve à dix neuf heures pétante dans le hall de l'école. Tu verras, ce sera une soirée inoubliable !
Puis il partit en lui adressant un dernier signe de la main. Il passa à grandes enjambées devant les casiers, où un jeune garçon s'y trouvait quelques instants auparavant. Cet élève s'était enfui comme une ombre, laissant couler des filets d'eau silencieux dans les couloirs.
~~
La nuit du bal annuel de K-12 finit par arriver. Tout le bâtiment était décoré et illuminé de lumières et de guirlandes féériques. C'était le grand soir, pour les élèves comme la bande de Gon. Ses amis n'étaient pas accompagnés, ils s'étaient réunis pour pouvoir mettre au point les dernières directives du plan d'évasion. Leolio était à sa tête. Dans la grande salle de bal, sous les spots et les paillettes, il donnait les dernières indications à ses amis, leur rappelant leurs rôles à jouer. Sur la piste de danse et aux alentours, les élèves bavardaient, chantaient et dansaient joyeusement. La fin de l'année scolaire était toujours un bon moment de détente. Elle allait bientôt sonner leur libération, sans qu'ils le sachent.
De l'autre côté de la piste, Pitou cherchait Kaito des yeux. Elle était sa petite amie, alors il lui appartenait. Il était évident qu'elle était sa cavalière, pas besoin de faire de demande. La jeune fille patienta longtemps, très longtemps. Elle s'appuya sur le buffet en soupirant. Est-ce qu'il avait osé la planter là ? Elle s'était faite plus apprêtée qu'elle ne l'avait jamais été. Ce n'était pas comme cela que les choses devaient se produire. C'était elle qui larguait et posait des lapins, pas l'inverse. Elle commença à se mordre la lèvre, stressée pour son rang d'être vue seule à l'événement le plus important de l'année.
Enfin du coin de l'œil, elle aperçut Kaito qui entrait. Elle soupira de soulagement, et se dirigea vers lui à toute vitesse.
–– Bébé, qu'est-ce que tu faisais, j'ai cru que-
Elle se figea net en découvrant qu'il n'était pas arrivé seul. Ponzu, sa meilleure amie ou confidente, lui tenait un peu trop le bras pour ne faire que l'accompagner. Le rouge monta au cerveau de la fille populaire.
–– Kaito, tu la tiens par le bras ? Pourquoi je te vois arriver avec elle ? Tu as perdu la tête ?! Je suis ta petite amie officielle !
Kaito souffla d'exaspération sans lui répondre pour autant. Frustrée de son silence, elle s'attaqua alors à sa "meilleure" amie.
–– Ponzu, comment tu peux me faire ça, il est à moi, tu le sais !
Pour toute réponse, sa camarade aux cheveux turquoise retourna ses yeux dans ceux de Kaito, et enserra ses doigts dans ceux du jeune homme. Pitou fit volte-face vers sa bande de moutons, qui se tenait non loin de là.
–– Vous allez juste rester plantées là comme des idiotes et regarder ce qui se passe sans réagir ?
Une fois de plus, ses sois disantes amies ne lui répondirent pas.
–– Je vous ai créé, vous n'êtes rien sans moi !
Pitou poussa un cri de rage, et s'enfuya au pas de course à travers la foule en jouant des coudes. Elle n'était pas triste. Seulement profondément blessée.
Devant la buvette, Kurapika avait les yeux tournés vers le plafond, l'air songeur.
–– Vous ne trouvez pas que cet endroit est trop magnifique, les gars ?
–– Si, répondit Leolio. Mais il le serait encore plus parsemé de cendres.
Biscky serra son gobelet entre ses mains frêles.
–– Je suis vraiment nerveuse. Est-ce qu'on est obligés de le faire de cette manière ?
Alluka lui prit doucement l'épaule, et lui souria en parlant comme à un petit enfant.
–– Ne t'en fais pas, tout se déroulera à merveille. On y travaille depuis des semaines. Ce soir, c'est le soir.
Leolio hocha la tête. Il était toujours très sûr de lui.
–– Restes simplement fidèle au plan. Tu n'as pas à t'en faire, il est méticuleux et retouché à ma sauce.
Biscky ne savait pas vraiment à quoi s'attendre avec Leolio. Il était si imprévisible que les choses pouvaient tourner au vinaigre à n'importe quel moment. Mais elle était son amie, elle se devait de lui faire confiance.
Aux portes d'entrée, un garçon aux cheveux brun et à reflets verts entrait à son tour. Il était encore une fois en retard, mais Illumi ne s'était pas présenté dans le hall. Même s'il s'y attendait, il en était quelques peu blessé. Tout comme Pitou qui arrivait dans sa direction. Gon se figea sur place. Pitou ne le vit pas et se cogna dans son torse. Elle ouvrit les yeux et se recula bien vite. Gon essayait de percevoir son expression, mais elle s'essuyait les joues de ses mains. Est-ce qu'elle était en train de... Pleurer ? La célèbre et populaire Pitou pleurait à son évènement ? Voilà quelque chose d'impropable.
–– Pitou, qu'est-ce qui t'arrive ? Il s'est passé quelque chose à la fête ?
Il jeta un œil derrière son épaule pour voir la piste de danse. Il reconnut Kaito, le petit ami de Pitou. Enfin, difficile à affirmer vu que celui-ci dansait au bras d'une autre élève en riant aux éclats. Il fit rapidement le lien.
–– C'est Kaito qui t'as planté ?
–– C'est pas tes affaires, Pleurnichard !
Et elle reprit sa course à ces mots pour passer derrière lui et descendre les escaliers quatre à quatre. Gon soupira en la voyant partir. Même si Pitou semblait intouchable, elle faisait de la peine au jeune homme. Il se retourna vers la grande salle tout de même pour chercher ses amis dans la fête.
Dans un coin de la salle, un élève que personne ne remarquait jamais l'observait entrer dans la salle. Il était ébloui de sa personne, encore plus sous les lumières de la fête de fin d'année. Ses joues se teintèrent de rose. Il remarqua que lui aussi était seul. Alors Illumi n'était finalement plus son cavalier ? C'était une opportunité inattendue ! Mais il n'y arrivait pas. Les fesses collées à sa chaise, il n'arrivait pas à avancer vers lui. Il se haïssait lui-même d'être aussi réservé. Il ne remarqua même pas que le verre de punch qu'il se servait débordait. Il sursauta en sentant son costume se tremper. Il attrapa une serviette pour s'essuyer discrètement derrière le buffet.
Kurapika fixait sa montre des yeux, observant la petite aiguille avancer petit à petit dans le cadrant. Puis soudain, une petite alarme se fit entendre. Il s'adressa à ses compagnons.
–– C'est l'heure H. Les gars, vous savez quoi faire.
Tous hochèrent la tête, déterminés à accomplir la "grande évasion". Biscky tourna les yeux vers la piste. Elle fronça les sourcils en désignant un être vert qui arpentait la salle.
–– Attendez, qu'est-ce qu'il fabrique ici ?
Ses trois amis se retournèrent dans la direction qu'elle pointait. Leolio soupira d'exaspération en reconnaissant Gon, qui se tenait près du buffet. Il semblait avoir l'air triste. Alluka entama le pas, décidée à aller lui remonter les bretelles. Elle croisa un garçon qui s'appelait Tompa, et qui lui demanda si elle voulait bien lui accorder une danse. Elle l'envoya bouler, et se remit en marche. Kurapika, Biscky et Leolio la suivèrent, l'air confus.
Gon sourit en voyant enfin son groupe d'amis, mais perdit vite celui-ci en voyant la mine énervée de sa meilleure amie.
–– Toi ! Qu'est-ce que tu fais là ? Tu ne peux pas avoir pris contrôle de l'esprit d'Illumi en si peu de temps comme c'était prévu.
Kurapika se plaça à ses côtés.
–– Elle n'a pas tort, tu devrais être à l'étage normalement.
–– Ha ? Pourquoi donc ? demanda Gon en les regardant d'un air perdu.
–– Les hauts parleurs, Gon ! intervint Leolio, maître du plan. Tu ne te rappelles pas ? Ton rôle c'était de nous ouvrir une brèche pour faire évacuer tout le monde, c'est le point culminant du plan !
Gon se passa la main derrière le crâne. Il leur devait quelques explications, c'était inévitable.
–– Justement, à propos de ça... Illumi m'a demandé d'être son cavalier pour ce soir il y a peu de temps.
–– QUOI ?! s'exclama le groupe en chœur.
–– Dis-moi que tu n'es pas sérieux, hésita Alluka. Tu as laissé ce tyran te manipuler ?
–– Non, en fait- commença le brun avant de se faire couper par Biscky.
–– Gon, je croyais que tu étais plus fort que ça, on a pas à s'abaisser à leurs niveaux. Tu ne peux pas tout lâcher pour une simple attirance. Crois-moi, j'y suis passée et tu sais comment ça a fini.
Elle avait encore de l'espoir en son ami qui lui avait fait sortir de la boulimie. Ses amis voulaient bien la croire aussi. Mais tout ce que Gon fit, c'est s'excuser d'un "pardon les gars". Ils écarquillèrent les yeux, choqué de ce comportement. Ce n'était pas dans la nature de Gon d'être ainsi. Il reprit la parole en balbutiant.
–– Écoutez, je ne sais pas ce que j'ai voulu faire, mais je suis...
–– ... devenu égoïste ? compléta Alluka, le visage sombre.
Gon ouvrit la bouche pour parler, mais rien n'en sortit. Il regarda ses amis un à un pour leur chercher du soutien. Mais Leolio lui fronçait les sourcils. Kurapika regardait ailleurs, et Biscky avait l'air triste. Les mots ne sortaient pas. Seulement les larmes coulaient de ses yeux.
–– Je... Excusez moi...
Et à ces mots, il tourna les talons pour emprunter un couloir de l'école. Alluka voulu le suivre, mais Kurapika la retenit.
–– Laisse lui un instant. Ça ira mieux après.
~~
Gon ne savait plus quoi faire, ni où aller. Sa vue se troublait. Il poussa une porte au hasard et tomba sur les cabinets. Il s'appuya contre le lavabo, et regarda son visage affreux dans la glace.
–– Tu as foiré tout le plan. Et tout ça pour un fils de Satan qui ne t'aime même pas. Bien joué, idiot.
Il pencha son visage vers ses avants bras pour pleurer de plus belle dans l'évier. Soudain, il sent une présence derrière lui. Il se redressa avant de voir le reflet de celle qui avait interrompu ses pleurs.
–– Hey, arrête un peu de faire ce que toute l'école pense de toi.
Il fit volte-face. Et ne tarda pas à venir étreigner la personne présente dans ses bras.
–– Mito !
~~
La fête battait toujours son plein dans la grande salle de réception de l'école. Les autres élèves continuaient à vaquer à leurs occupations, ne se doutant pas de qui allait bientôt leur arriver. Le jeune homme solitaire avait vu Gon s'en aller, et se demandait ce qui avait bien pu se passer avec ses amis pour qu'il paraisse si triste. Ceux-ci étaient toujours regroupés, bavardant d'autres sujets comme pour oublier ce qu'il venait de se passer. Et soudain, les hauts-parleurs résonnèrent une première fois dans la vaste pièce. Tout le monde se boucha les oreilles au premier son strident. La musique s'arrêta.
–– Bonsoir chers élèves, et bienvenue au 150ème bal de fin d'année de K-12, dit le jeune Principal de son bureau, accompagné de son micro.
–– Ça ne fait pas parti du plan, ça ! chuchota précipitamment Leolio à ses amis sous les quelques applaudissements des élèves.
Illumi toussota dans les hauts-parleurs pour mettre fin aux bruits de satisfaction des élèves.
–– Maintenant, avant que je vous laisse retourner danser toute la nuit, j'aimerais adresser un petit message à quelqu'un en particulier.
Les élèves se regardaient avec incompréhension. Biscky hocha un sourcil en regardant ses amis. Personne ne comprenait la situation. Et personne ne s'attendait aux mots du Principal, ni de qui voulait-il bien parler.
–– Gon Freecss. Je sais ce que tu manigances. Je t'observe depuis un moment déjà.
Alluka se pinça les lèvres. Ça sonnait mal, très mal, pour Gon comme pour eux tous.
–– Est-ce que tu pensais vraiment que tu pouvais juste tuer mon père, continuer ton année tranquillement, avoir ta petite danse avec moi et t'enfuir ?
–– Ben ouais, dit Leolio sous le regard sévère de Kurapika qui lui intima de se taire.
Un rire glacial retentit dans les hauts-parleurs. Peu importe qui pouvait l'entendre ce soir, il en aurait eu des frissons dans le dos. De la mine incomprise, les élèves devenirent inquiets et affolés.
–– Je ne pense pas que vous partirez, chères dernières années. Pas ce soir.
Un garçon nommé Chrollo sortit de la foule pour se précipiter vers la sortie. Il tenta de déclencher la poignée, en vain.
–– Les portes sont verrouillées ! s'exclama le jeune homme en s'adressant aux élèves d'un air paniqué.
–– Amusez-vous tant que vous le pouvez encore, résonnèrent les hauts parleurs. Dansez. DANSEZ !
Une instrumentale douce débuta soudainement, et aussitôt les élèves se retrouvèrent par deux. Chaque fille se retrouvait aux bras d'un garçon, et vice-versa. Le rose avec le bleu.
J'étais trop jeune pour voir la vérité
Sur les genoux de grand-mère je sentais son doux parfum
Alluka était face à Kurapika, qui lui tenait la taille et elle les épaules. Elle rougissa sans comprendre pourquoi. À leurs côtés, Leolio et Biscky étaient également dans la même position. Les amis se regardaient avec incompréhension.
Trop naïf pour me rendre compte
Des mots qu'elle me chuchotait en brossant mes cheveux
Il en fut ainsi pour toutes les autres personnes de la pièce. Tout le monde se retrouva au bras de quelqu'un d'autre, qu'il ne connaissait ou non.
Les gens te diront
"Si tu veux faire une pause, quelqu'un prendra ta place
Les gens essayeront
De te dire que tout va bien
Avec des billets dans leurs yeux
Souviens-toi seulement
Leurs corps ne répondaient plus d' eux-mêmes. Ils dansaient à travers la salle, sans aucun contrôle sur eux. Une fois de plus, Illumi avait réussi à prendre le contrôle de la situation.
Ne les laisse pas te foutre en l'air chéri
Ne les laisse pas essayer de prendre le dessus
Ne les laisse pas te faire du mal chéri
–– Qu'est-ce qui nous arrive ? demanda Alluka en essayant de couvrir la musique de sa voix.
–– J-Je ne sais pas, bégaya son partenaire, Kurapika face à elle alors qu'ils tournaient sur eux-mêmes.
–– Je ne peux même pas me gratter ! s'ingurgita Leolio.
–– J'ai besoin de m'arrêter... se plaigna Biscky en soupirant.
Dis seulement : "Pouce, j'ai besoin d'une pause"
–– On doit faire quelque chose, les gars, dit Alluka. Où est passé Gon bon sang ?
Assis dans ma chambre, j'observe tout ce que j'ai fais
Tout ce que je voulais c'est arriver à un but dans ma vie
Je devrais être heureux, mais je n'arrive pas à sortir du lit
Je stress à propos de ces voix qui crient dans ma tête
–– Je ne sais pas, il n'est pas revenu depuis tout à l'heure. On aurait bien besoin de lui par moment ! s'exclama Leolio qui faisait tourner Biscky de sa main sans le vouloir.
–– En vérité, j'adore danser, mais ce truc est ridicule, dit Kurapika à son tour.
–– On doit retrouver Gon et arrêter ça maintenant si on ne veut pas mourir d'épuisement ! s'écria Alluka alors que Kurapika la penchait jusqu'à presque toucher le sol.
Quand sera mon heure ?
Perdu dans mes pensées
Perdu, je n'arrive pas à trouver l'euphorie
Et lorsque je suis vexé
Je pense alors
Aux mots qu'elle me disait
Biscky et Leolio, de leur côté, tentaient de se concentrer pour utiliser leurs pouvoirs. Mais malgré toute la détermination qu'ils y mettaient, ils n'y arrivèrent pas. La situation semblait désespérée pour tous. Leurs jambes étaient en feu, pour qui que cela soit. Pitou, Kaito, Ponzu, Zushi, Meruem, Komugi, Pufu, Phinks, Nobunaga, Shizuku, Feitan, Machi, Chrollo, Sharnalk et même Tompa n'arrivaient à voir d'issue. Ils semblaient coincés dans un manège interminable, un tourbillon de couleur et de paillettes sur une piste de danse. Pour la première fois, l'ensemble des élèves partageaient la même douleur physique et mental.
~~
~Yaya, 26 août 2020.
Коментарі