Pdv Gon

Après un échange interminable dans le bureau du Principal, ils décidèrent de nous séparer, moi et Pitou, pour éviter que d'autres conflits n'arrivent. Tant mieux si ça l'arrangeait, parce que ce n'était que le début de l'année et j'étais déjà fatigué de Pitou. J'avais besoin d'un peu de détente, pour ensuite pouvoir me concentrer sur mes études.

Je marchais dans les couloirs en regardant mon emploi du temps. Le prochain cours était à l'opposé de là où j'étais, il ne fallait pas traîner. Je me demandais comment allait Alluka en ce moment. J'espèrais qu'elle ne se sentait pas trop seule pendant son cours d'aujourd'hui. Elle me manquait déjà. Je n'attendais plus que l'entre-deux pour courir la rejoindre.

Enfin après un labyrinthe d'escaliers et de couloirs, j'arriva devant ma foutu salle de cours. Il n'y avait plus personne de rangés devant la salle. Me revoilà en retard, encore une fois. Je commençais très bien l'année scolaire.

Mais j'y pensais, je n'avais qu'à utiliser l'entretien avec le Principal comme excuse. Rassuré, je frappa contre la porte de bois et y rentra, sûr de moi.

Étrangement, une atmosphère bizarre m'enveloppa le corps lorsque je pénètra dans la salle de cours. Tous les élèves, sans exception, me fixaient en souriant. Que fabriquaient-ils avec des appareils photos ? Je n'y comprenais rien.

Soudain, je sentis ma professeur, Mme Neon, me tirer par les cheveux.

Tu me tires par les cheveux
Pour que je ne puisse pas m'enfuir

Je ne savais plus où j'étais. Je sentais des fils atrocement solides s'attacher autour de mes poignets et mes chevilles. Je relèva la tête. Neon me regardait de toute sa hauteur. Depuis quand était-elle aussi grande ? À moins que c'était moi qui avait rapetissé. Qu'est-ce que je fabriquais dans le théâtre à marionnettes du Club de théâtre ? Les élèves continuaient à sourire, un air terrifiant sur le visage. M'avaient-ils vu ?

Vous dites que vous m'aimez
Mais vous faites comme si je n'étais jamais là

Je perçus des injures à l'extérieur. Beaucoup d'injures. Et elles m'étaient toutes destinées. Qu'est-ce que j'avais fait de mal ? Mon cœur se serra.

Les mots les plus cruels
Ont pour habitude de me briser le cœur

Soudain, je me sentis bouger sans le vouloir. En relevant la tête, je remarqua que c'était Neon qui me contrôlait avec ses fils qui me charcutaient les articulations. Je n'avais plus aucun contrôle sur moi-même, mon corps ne répondait plus à mes ordres.

Parce que je suis là
Faisant travailler mon cul

Mes camarades ne voyaient pas que je souffrais. Ils ne savaient pas l'enfer que je vivais. C'était si abominable que j'en avais des envies suicidaires.

Pourquoi est-ce si dur à voir ?
Si je me mutiles je saignerais

Ne comprennaient-ils pas que j'étais l'un des leurs ? Un élève comme un autre, avec des peurs, des émotions, des défauts ? J'avais le vertige à force de bouger dans tous les sens.

Je suis juste comme vous, vous êtes comme moi
Imparfaits et humains sommes-nous ?

Mais ils s'en fichaient. Pour eux, je n'étais qu'un jouet qu'on jetait aux ordures lorsqu'il était cassé. Ils continueront de faire attention à moi tant que j'amuserais la galerie. Les rideaux s'ouvrirent.

"Montre et raconte !"
Je suis sur scène pour que vous tous les merdeux puissiez me voir
Montre et raconte
Tu m'insultes si je ne fais pas une photo avec toi
Achetez, vendez
Comme si j'étais un produit de la société
L'art ne se vend pas
Sauf si tu as niqué toutes les autorités

La fatigue me gagnait, mais ce spectacle était sans fin. Je ne priais qu'une chose : que cela s'arrête. J'entendis la voix de Mme Neon retentir au-dessus de ma tête.

- Voilà Gon Freecss! Un élève différent et ridicule ! Raconte nous ce que tu fais dans la vie, ou présente toi tout simplement !

Je la haïssais tellement. Cette professeur se faisait passer pour la gentille prof de français, mais elle était en réalité hypocrite et manipulatrice. Elle encourageait toujours les moqueries, ou faisait comme si elle n'avait rien vu. Le plus souvent, elle s'en prenait aux plus faibles, n'hésitant pas à les rabaisser. Je faisais parti de ces gens là.

Elle détacha l'un de ses fils que je n'avais même pas remarqué et qui m'empêchait dès lors de parler.

- Oui, c'est moi, Gon Freecss, en chair et en os devant vos yeux ! Pourquoi n'arrivez vous pas à me considérer comme l'un des vôtres ? Je ne suis qu'un élève, tout comme vous ! Vous me rejetez seulement parce que je suis différent. Ou alors vous faites comme si vous m'aimez, puis vous me jetez comme une vieille chaussettes. Nous avons tous des défauts et de l'humanité, non ? Vous ne réussirez pas à me faire abandonner, ou changer la personne que je suis.

À ces mots, je concentra toute ma force dans mes muscles pour me détacher de l'emprise des fils qui me contrôlaient. Je souria, victorieux, lorsque j'entendis le bruit de fils brisés. Mais une douleur se rependait dans mon corps alors que je sortais du théâtre de marionnettes sous les yeux furieux de Neon. Je jeta un œil à mes articulations. Les fils, très tranchants, m'avaient ouverts des plaies à plusieurs endroits de mon corps. Je commença à avoir la tête qui tournait tandis que tout ce sang coulait abondamment hors de moi. J'eus le temps d'entendre un "BERK, DÉGOÛTANT !" de mes camarades avant de sombrer dans les ténèbres.

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~Yaya, 23 juillet 2020