Chapitre 1
Chapitre 2
Chapitre 3
Chapitre 4
Chapitre 5
Chapitre 6
Chapitre 7
Chapitre 8
Chapitre 9
Chapitre 10
Chapitre 11
Chapitre 12
Chapitre 13
Chapitre 14
Chapitre 15
Chapitre 16
Chapitre 17
Chapitre 18
Chapitre 19
Chapitre 20
Epilogue
Chapitre 10

Les jours passent et je sens déjà la routine s'installer. Chaque jour je vais voir Niko, le soir je rentre, je mange avec Morgan et nous allons nous coucher. On a réussi à se mettre d'accord que j'acceptais qu'il dorme dans la chambre avec moi s'il ne se passait rien entre nous. Il a validé sans grande difficulté et depuis trois jours nous partageons le même lit.

Depuis le week-end dernier je n'ai pas revue Marylin et je reconnais que ce qu'elle m'avait dit dans son jardin secret ne fait que tourmenter mes pensées. Elle m'a fait tellement de peine, elle avait l'air de crier à l'aide, la tristesse se lisant dans sa voix et la détresse dans ses yeux. Je voudrais tellement faire plus qu'une simple promesse. Je voudrais l'aider, la faire sortir de sa cage, mais je n'ai aucun moyen et je ne pense pas qu'en parler à Morgan pour le moment, lui qui passe ses journées dans le bureau de son père à parler affaire, soit correct. Mais je me promets de trouver une solution.

Je suis sur le chemin du retour à la maison, quand je vois au loin Auréline, ma voisine, porter d'imposant sacs de courses. Ayant les mains vides, je la rattrape assez rapidement.

– Bonsoir, tu as besoin d'aide ? Je demande en désignant les sacs.

– Bonsoir Lorene, je hum... ça va aller merci.

Je la vois suer à grosses gouttes. Ses joues se gonflent à chaque effort que j'ai presque de la peine pour elle. Je lui prends contre son grès quelques sacs et je la suis jusqu'à chez elle.

– Ce n'est pas bon pour ton dos de tout porter toute seule. Boris n'est pas là pour t'aider ?

Auréline se mût dans un silence quelques secondes, mais elle finit par se racler la gorge.

– Non, il est à la maison. Je ne pensais pas en avoir pour autant.

– Je pourrais venir avec toi la prochaine fois si tu veux.

– Je ne voudrais surtout pas te déranger. Tu dois avoir pas mal de choses à faire.

– Pas du tout pour être honnête...

Nous sommes désormais arrivées devant chez elle. Elle regarde la maison presque avec regret d'être arrivée aussi vite. Je lui propose si elle veut de l'aide pour ranger les courses, et après avoir supplié, elle n'a eu d'autre choix que d'accepter. Je suis rapidement rentrée chez moi pour laisser un mot à Morgan avant de retourner auprès d'Auréline.

En entrant, je distingue immédiatement Boris affalé sur le canapé en train de lire un journal. Auréline passe sans un mot jusqu'à la cuisine, son mari l'ignorant également. C'est seulement quand il me voit sur les pas de sa femme qu'il décide de se lever et de me saluer avec son éternelle sourire charmeur. Je lui rends son salut et dépose les sacs sur la table de la cuisine. A notre grande surprise, Boris vient nous aider à ranger les dernières courses. Une fois finit, il m'invite à prendre un verre dans le jardin. Je me vois mal refuser et accepte son invitation, même si me retrouver à la même table que lui ne me plaît pas énormément.

– Vous faites quoi dans la vie ? Je questionne en sirotant mon verre de limonade.

– Je suis actuellement à la recherche d'un emploi dans tout ce qui est manuel.

– Tu ne devrais pas avoir trop de mal, je réponds d'un sourire niais. Et toi, Auréline ?

– Elle n'a rien trouvé également. Depuis notre mariage, nous avons pas mal de choses à faire alors elle n'a pas vraiment eu le temps de chercher.

Boris n'a eu aucun scrupule à répondre à la place de sa femme. Auréline, comme si elle avait l'habitude, n'a pas essayé de se défendre et a laissé son mari faire.

– Et toi Lorene ?

– Oh, moi aussi je n'ai rien et je ne recherche pas trop à vrai dire. En ce moment, mon grand projet est de visiter la ville.

– Tu as parfaitement raison, il y a tellement de choses à visiter ici que ce serait dommage de partir sans en avoir... Morgan ! Morgan par ici !

Boris se lève en faisant tomber sa chaise derrière lui et cours jusqu'à la petite porte qui sépare le jardin de la rue. Il n'a pas terminé sa phrase, mais peu importe puisque notre préoccupation se tourne soudainement au nouveau venu. Morgan s'approche de moi et m'embrasse sur le front avant de faire la bise à Auréline.

– Je l'ai vu passé de l'autre côté de la haie. Ça ne te dérange pas de l’avoir invité ? Me demande Boris le visage illuminé par la visite du dernier.

– Pas le moins du monde.

Morgan s'installe à mes côtés et il semble contrarié. Il a les mains recouvertes de petites coupures, et le visage crispé par quelque chose que je n'arrive pas à deviner. Il essaie pourtant de paraître normal et Boris semble n'y voir que du feu. Comme si la venue du fils du président dans son jardin était une bénédiction.

– Comment ça va ? Demande Boris avec la plus grande joie du monde.

– C'était une journée fatigante, mais ça va très bien et vous ?

Auréline et moi hochons la tête en cœur tandis que Boris tape sur la table pour montrer que tout va bien.

– Dis, j'ai une petite question.

Morgan lève d'abord la tête vers moi, où il doit sûrement lire mon questionnement à son sujet avant de le détourner vers Boris.

– Je t'écoute ?

– Je suis actuellement à la recherche d'un emploi dans tout ce qui peut toucher aux travaux, rénovations, ce genre de choses quoi. Du coup je voulais te demander si tu avais une place quelque part.

Morgan soupire. Il a des cernes qui commencent à se dessiner en dessous des yeux et il joue avec ses doigts nerveusement. A le voir comme ça, je perds mes moyens et n'arrive pas à faire autre chose que de le regarder et me laisser envahir par son doux visage. De profil il a légèrement le nez en trompette, ses sourcilles broussailleux ne font qu'accentuer la forme de ses yeux et ses lèvres rougit à force de trop les avoir mordus ressortent sur sa peau mate.

– Il faudrait demander à mon père, mais je peux peut-être t'aider.

– Super, merci Morgan. C'est toi le meilleur ! D'ailleurs tu veux voir quelques-uns de mes travaux ?

En réalité il ne s'agit pas vraiment d'une question puisque Boris s'est levé et commence déjà à se diriger vers la maison. Je réponds à Morgan que je préfère rester ici avec Auréline, et sans grande motivation il se lève à son tour pour le suivre.

Un silence presque lourd s'est installé entre Auréline et moi. Nous sirotons tranquillement notre limonade quand je commence à en avoir marre de nous regarder dans le blanc des yeux.

– Ça va, pas trop dur ? Je demande doucement et calmement.

– Pas trop dur de quoi ?

– Boris, de vivre avec lui.

– Absolument pas.

Auréline n'a pas levé les yeux de son verre et ses doigts ont blanchi tant elle le serre. Ses longs cheveux châtains lui tombent en cascade autour du visage et je peine à lire son expression.

– Ce n'est pas l'impression que j'ai pourtant. Tu ne parles pas et ne bouges pas en sa présence. Tu es là à attendre patiemment pendant que lui déblatèrent ses exploits.

– Je n'aime juste pas parler quand il y a beaucoup de gens, c'est tout.

Elle tente de me sourire, mais il sonne tout ce qu'il y a de plus faux.

– C'est comme, c'est moi où j'ai l'impression que tu fais tout à la maison pendant qu'il se la coule douce ?

Son visage vient de se teinter d'un rouge vif. Les sourcils froncés, les narines écartés, ses mains tremblent.

– Je ne vois absolument pas ce que tu veux dire, et je ne pense pas que ce soient tes affaires Lorene. Si j'ai bien compris, chez toi c'est Morgan qui fait tout pendant que toi tu pars voir des « amis » !

Étrangement je n'arrive même pas à lui en vouloir parce qu'elle n'a pas réellement tort. J'essaie d'aider le plus possible, mais c'est souvent Morgan qui s'occupe des repas et du ménage quand je ne suis pas là. Alors je lève les bras en signe de paix et m'excuse aussitôt.

– Je suis désolée, je ne voulais pas... Je voulais juste m'assurer que tu allais bien. Après mûre réflexion, je reconnais que ce n'est pas le meilleur moyen pour nouer une amitié.

Et voilà comment réparer son erreur. Auréline se détend immédiatement et je pourrais presque voir un sourire se dessiner à la commissure de ses lèvres.

– Oh non ! Excuse-moi, je me suis emportée alors que je n'avais pas compris que tu voulais juste être gentille. Vois-tu Boris est juste un peu impulsif mais il a un bon cœur au fond. Je peux comprendre que tu ais eu des doutes en l'entendant l'autre jour, mais je t'assure que ce n'était rien.

Je fais mine d'être rassuré.

– Parlons d'autres choses alors ! Je m'exclame.

Auréline me répond avec la plus grande joie et nous commençons un échange de questions/réponses sur nos goûts, nos loisirs et nos passions. Auréline semble si ravie de discuter qu'elle me confit tout sur elle. Elle m'explique qu'elle a grandi dans une famille de 5 sœurs, qu'elle aime le rose et les marguerites, elle sait jouer quelques notes au violon mais sans plus et que son rêve serait de fonder une grande famille. Elle me parle d'elle comme si elle n'avait rien à cacher. Elle ne se rend d'ailleurs pas compte que je n'ai pratiquement pas parlé de moi. Je n'ai rien contre me dévoiler, mais Auréline semble si heureuse que quelqu'un s'intéresse à elle que je fais tout pour lui retourner les questions. Boris et Morgan ne sont toujours pas revenu et le soleil ne montre plus que deux de ses rayons.

– Tu savais que le lac en hiver était complètement gelé et qu'on peut y faire du patin ? C'est là que je venais quand j'étais petite avec mon père.

– Non pas du tout, mais peut-être qu'un jour j'y ferai un tour.

– On pourrait y aller ensemble si tu veux. Ah c'était quoi ça ?

Toutes les deux, avons sursauté sur notre chaise de jardin en entendant un énorme boum résonner dans la maison. Auréline se lève immédiatement, la panique se lisant dans son visage avant de s'arrêter à mi-chemin pour pousser un cri d'horreur. Sur le pas de la porte d'entrée, les deux garçons arrivent une énorme tension entre les deux. Je me lève également pour me poser à côté d'Auréline et suis obligée de montrer ma surprise en voyant le visage de Boris. Il a un œil fermé et gonflé, et la lèvre inférieure ouverte. Morgan quant à lui, a la main rouge et saigne aux niveaux des phalanges. Il ne faut pas être doté d’une grande intelligence pour comprendre ce qu'il s'est passé.

– Mon cœur, que s'est-il passé ? Demande Auréline en se jetant à son cou.

– Je vais bien. C'était un accident. Explique-lui Morgan.

Sa voix était terriblement dure et froide. J'aurais même pu apercevoir de la peur sur le visage, mais la pénombre de la nuit tombante ne me permet pas de confirmer ce que j'ai vu.

– C'est ma faute, j'avais une de ses planches en bois entre les mains et je n'ai pas fait attention en me tournant que tout est tombé. Boris a tenté de tout ramasser et en se relevant, il s'est malencontreusement mangé le coin de la planche. Désolé, je ne voulais vraiment pas te faire mal, répond-il en déposant sa main sur son épaule en signe de compassion.

Boris plante ses yeux dans les miens pendant que Morgan me fuit. Auréline toujours pendu au cou de Boris, l'emmène à l'intérieur.

– Je suis vraiment désolée Lorene, mais je ferai mieux de le soigner.

– Ne t'inquiète pas, il commence à se faire tard, on va rentrer également. On se verra un autre jour !

Auréline me répond de son plus beau sourire et s'éloigne.

Morgan et moi avons rejoint la maison dans le plus grand silence. Il s'est jeté sur le canapé pendant que je suis allée chercher la trousse de premier secours dans la salle de bain.

– Montre-moi, je fais à son intention.

– Je n'ai rien, ça va.

Son ton est presque irritant.

– Je peux au moins désinfecter tes nombreuses petites coupures ?

Morgan soupire en déposant sa tête sur le dossier du canapé. Il me tend sa main et je ne peux que froncer les sourcils en la voyant. Mis à part ses coupures, il est blessé au niveau des jointures et sa main semble presque avoir pris du volume. Je lui passe un coton avec un peu d'alcool sur ses blessures et fini par lui mettre un pansement là où il saigne.

– Je ne te crois pas, je réponds enfin.

– Comment ça ?

– Ton histoire de planche. Je n'y crois pas une seconde.

– Pourtant c'est ce qu'il s'est passé...

– Vraiment ? Alors tu es tellement maladroit que t'arrives même à te faire mal en portant une planche ? Tu as expliqué pour Boris, même si je n'y crois pas une seconde, mais ta main ne s'est pas faite ça toute seule.

Morgan ferme les yeux et se masse sa main blessée.

– Bon ok, je l'ai frappé.

– Et je peux savoir pourquoi ?

Il n'ose pas me regarder et ça m'irrite. Je voudrais prendre son visage et planter ses deux yeux dans les miens pour qu'il m'avoue tout. Mais je ne me sens pas le courage. Quelque chose me freine, alors je décide de me lever pour ranger la trousse.

– Il t'a insulté et je n'ai pas apprécié.

Je m’arrête net au milieu du salon, interloquée. Je ne vois que son dos, mais la vitre en face reflète son visage.

– Et ?

– Et quoi ? Demande-t-il en se retournant.

– Et c'est une raison pour le frapper ?

– Je... Je ne comprends pas là. Il t'a insulté de folle et tu aurais voulu que je le laisse faire ?

– Si tu commences à frapper tous ceux qui me traite de folle, tu n'en auras pas fini.

En moins d'un battement de cil, Morgan s'est levé et posté devant moi.

– Quoi ? Je demande impatiente.

– Je ne te comprends pas Lorene. Quel plaisir as-tu d'être considérée de folle ?

– Je ne prends aucun plaisir, c'est juste une habitude. Si tu étais à ma place tu n'y ferais plus attention. Un peu comme toi avec le fait que tu sois le fils du président.

– Mais tu n'es pas folle Lorene.

– Et qu'est-ce qui te le prouve ?

Les tons ont commencé à monter et je me suis même prise à faire de grands gestes. Morgan me regarde la bouche grande ouverte et semble presque être mis sur pause. Je savais qu'il n'avait pas de preuve sur ma santé mentale. Je décide alors de lui tourner les talons pour ranger la trousse de secours.

– Lorene attends !

– Ne me touche pas ! J'ordonne violemment.

Morgan me lâche le bras mais continue de me suivre.

– Tu ne peux pas te cacher derrière ce que tu n'es pas, Lorene.

Un rire nerveux m’échappe.

– Parce que tu crois que c'est un jeu que je joue ? Tu crois sincèrement que je suis en train de jouer et que j'aime sortir en disant : « Hey regardez-moi la folle est de sortie ! »

– Je n'ai pas dit ça. Lorene écoute-moi…

– Quoi écoute-moi ? Tu es le seul ici qui croit que je vais bien. Tu es le seul ici qui pense que la machine ne s'est pas trompée sur notre mariage. Tu es le seul ici qui croit sincèrement que la vie est un cadeau. Tu vis sur ton nuage Morgan et tu veux que j'en fasse partie. Mais je refuse ! Je refuse parce que je saurais que tout est faux. Les gens me détestent, la vie me déteste, même toi tu me détestes !

Je me dirige en colère dans la pièce d'à côté et referme la porte de la chambre sur le pied de Morgan. Mon cœur palpite à mille à l'heure, je tremble de tout mon être, j'ai l'impression qu'il fait terriblement chaud. Je me dirige jusqu'à la table de chevet la plus proche, tire le tiroir et en sort mes trois flacons de médicaments.

– Je ne te déteste pas Lorene.

– Rooooh ! Ce n'est pas ce que j'ai cru comprendre l'autre jour avec ta copine. Tiens d'ailleurs tu vas être content je vais prendre mes médicaments.

Morgan vient de s'immobiliser sur place faisant ainsi tomber la chambre dans un merveilleux silence. Un silence apaisant pour mes oreilles.

– T-tu as entendu ?

– Sors ! S'il te plaît sors !

Morgan refuse et je suis obligée de le pousser pour qu'il mette les pieds hors de la chambre.

– Je peux t'expliquer Lorene.

– Pour me dire quoi ? Que tu ne le pensais pas ?

– Je l'ai dit uniquement pour faire taire Karine. Je ne le pensais vraiment pas.

– Mais bien sûr et puis quoi encore... Tu sais quoi Morgan ? Je crois qu'ici on est tous les deux fous. Moi je pique des crises violentes et toi tu n'arrives même pas à distinguer le vrai du faux. Finalement tu as peut-être raison, la machine a peut-être réunis deux tarés ensembles.

Je claque la porte à la fin de ma phrase, mais Morgan tente de la rouvrir. Je la bloque en y glissant une chaise qui traînait dans le coin et ainsi je me retrouve coincé entre les quatre murs.

– Ecoute-moi Lorene. Je te promets que je ne le pensais pas. Je suis vraiment désolé pour tout. Je ferai tout pour pardonner mes propos. Lorene ouvre-moi. Tu ne peux pas rester derrière cette porte à m'ignorer quand même. Lorene !

Je me suis assise au pied du lit et les larmes glissent le long de mes joues. Les médicaments commencent à faire leurs effets et je me sens faible. Je n'entends plus Morgan derrière la porte mais je peux encore sentir sa présence.

– Je ne partirais pas tant que tu n'auras pas ouvert la porte, Lorene. Je dormirais ici s'il le faut, mais il est hors de question que je te laisse seule, compris ?

Je tente de lui répondre que oui j'ai compris et surtout que je n’en ai rien à faire, mais aucun son ne sort de ma bouche. Je dissimule autant que je peux mes reniflements et je finis par me relever pour aller me coucher dans le lit. Je me mets en boule sous les draps, le matelas glacé ne fait qu'accentuer mes sanglots, mes mains triturent mes cheveux ondulés blonds jusqu'à en faire des nœuds. Rapidement le drap housse est recouvert de mes larmes, mais je n'y fais pas attraction puisque que je suis sur le point de m'endormir.

© minhox ,
книга «The Book of 23».
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