Chapitre 1
Chapitre 2
Chapitre 3
Chapitre 4
Chapitre 5
Chapitre 6
Chapitre 7
Chapitre 8
Chapitre 9
Chapitre 10
Chapitre 11
Chapitre 12
Chapitre 13
Chapitre 14
Chapitre 15
Chapitre 16
Chapitre 17
Chapitre 18
Chapitre 19
Chapitre 20
Epilogue
Chapitre 7

Avoir l'intention de visiter la ville c'est plutôt intéressant, mais quand on ne la connaît pas et qu'on n'a aucun plan pour se repérer ça devient une autre histoire.

Pour le moment je suis allée vers ce que je connaissais : mon ancien chez moi. Je suis restée devant la grille une bonne dizaine de minutes avant de me faire à l'idée qu'aujourd'hui je ne voulais pas les voir. Alors je suis repartie dans le sens opposé jusqu'à ce qui me semble une forêt. Les arbres m'ont vite englouti, et dans l'idée de toujours avancer tout droit je me suis retrouvée devant l'énorme grillage qui sépare la ville de la liberté. La liberté. A l'heure actuelle je donnerais tout pour me retrouver de l'autre côté. Découvrir le monde, avoir des réponses à mes innombrables questions, vivre librement sans aucun jugement. La forêt continuait jusqu'à des kilomètres d'au-delà de la grille ne me permettant que de distinguer de l'obscurité. Mais une chose est certaine c'est qu'il faisait calme, terriblement calme. Je suis repartie à la conquête de la ville.

J'ai rejoint la civilisation si je peux dire, en retournant vers les quartiers riches et habités. Les maisons sont toutes différentes. Il n'y en a pas deux pareils. On passe aussi bien devant une toute petite blanche, puis d'une imposante aux volets mauves, pour continuer sur une autre plus petite avec son jardin donnant sur la rue. Le dépaysement est total ça c'est certain. Je n'ai pas croisé grand monde dans les rues car ils sont soit au travail, soit au marché. Le travail. A l'hôpital j'ai essayé de m'imaginer dans quelle sorte de métier je pourrais exercer, mais à chaque fois ça c'est conclu à un : « de toute façon qui voudrait d'une folle dans ses bureaux ? ». Aujourd'hui la donne à changer, tout le monde pourrait se jeter à mes pieds pour m'avoir parce que je suis, je cite : « la femme du fils du président ». Imaginez la publicité que ça leur ferait ? « Hey, vous savez quoi ? La femme du futur président travail chez nous ! Et oui, chez nous pas chez vous ! ». Comment les apprécier après ça ? En tout cas, j'ai quitté ce quartier pour rejoindre le marché. Vu l'heure, qui doit être aux environs de midi, je suis surprise de découvrir qu'il y a toujours autant de monde. Je le traverse toujours aussi ravie de découvrir ce qui y est proposé. Je suis comme une enfant le jour de noël. Il y en a pour tous les yeux, tous les goûts, tous les caractères. C'est véritablement mon endroit préféré. J'essaie de ne pas m'arrêter à toutes les étales, même si l'envie est trop grande. Je passe tantôt devant une marchande d'écharpe en laine aussi douce que le coton, puis devant un marchand de fruits et légumes et un poissonnier. Je ne sais absolument pas d'où peux venir ses poissons et je n'ai pas osé le lui demander. Pour conclure mon petit tour, mes pieds m'ont amené jusqu'à l'étale de confitures.

– Bonjour Lorene, me fait Jovelita dans un grand et beau sourire. Tu vas bien ?

– Parfaitement bien, je mens en repensant à la journée d'hier.

– Ta petite mine me dit le contraire. Tu es sûr ?

Je lui réponds par un sourire forcé mais convaincant... enfin je l'espère.

– Alors qu'es-tu venue faire aujourd'hui ? Me demande Jovelita en me donnant une cuillère de confiture à la fraise.

– J'ai décidé de visiter la ville.

– Bon courage ma belle. Ce n'est pas petit ici.

– Je sais, je m'en suis aperçue. Mais je suis bien motivée pour faire tout le tour, quitte à y passer plusieurs jours.

– Il devrait y avoir plus de personnes motivées comme toi. D'ailleurs, ça me surprend que Morgan ne soit pas là.

– Normal, je suis partie avant qu'il n'ait eu le temps de proposer. Je ne voulais pas de sa présence. Je voulais me débrouiller seule sans l'aide de personne.

Je vois que Jovelita tique à ma réponse, mais son éternelle gentillesse prends le dessus et elle n'en demande pas plus.

– Je devrais peut-être y aller, la route est longue.

– Fais attention à toi, ma belle.

– Ne vous inquiétez pas.

Je commence à me diriger vers la sortie quand je croise trois jeunes filles, bien plus jeune que moi discuter et me regarder avec une certaine haine. La discrétion et elles font 20, mais je reprends mon rôle d'hier soir et leur sert un énorme sourire suivit d'un bonjour avant de m'éloigner.

Je me retrouve rapidement dans l'inconnu le plus total. Un monde parallèle à ce que j'ai connu jusqu'à présent. Je me doute du quartier dans lequel je me trouve, mais je ne me serai point doutée que c'était pire que ce j'avais toujours imaginé. Au fur et à mesure que j'avance, les maisons ne ressemble plus à des maisons mais des cabanes rafistolées avec je ne sais quoi, les rues sont remplies de déchet en tout genre, sur les derniers murs encore debout de nombreux graffitis les recouvrent. Quiconque oserait s'approcher d'ici prendrait la fuite surtout s'il vient de l'autre côté du marché. Mais je ne suis pas comme eux et décide de continuer. Contrairement à ce que j'aurais pensé, personne ne s'arrête pour me regarder de travers. Ils vivent leur vie, avancent parfois en souhaitant un bonjour et repartent aussitôt. J'arrive alors devant un groupe d'enfants jouant avec un vieux ballon. Je reste un moment à les regarder, leur bonheur m'envahissant. Un enfant, ce qui me semble le plus jeune, tombe taclé par l'un de ses camarades de jeu et se met à hurler de douleur. Je cherche autour de moi un adulte et me rend compte que je suis la seule. Ses camarades se sont regroupés autour de lui et tentent en vain de l'encourager à se lever, mais il est bien trop en train de crier pour les entendre. Je décide alors de m'approcher du groupe. Celui-ci s'écarte et je peux m'agenouiller devant le jeune garçon.

– Est-ce que je peux voir ? Je demande d'une voix douce.

Le garçon pleure à chaudes larmes et avec difficultés relève le bas de son pantalon. Je lui prends sa jambe avec une douceur qui m'étais inconnue et la dépose sur mes deux genoux. Il a la jambe d'une extrême blancheur et maigreur.

– Tu as mal là ? Je demande en touchant légèrement le tibia.

Il me fait non de la tête.

– Et ici ?

Je le vois grimacer mais me répond encore une fois non et me désigne du doigt encore plus bas. Je n'ai à peine toucher sa cheville que je l'entends hurler de douleur. Quand on regarde on ne voit rien, et pourtant quand je touche il semble souffrir le martyre.

– Très bien, est-ce que tu peux me dire où tu habites pour qu'on retrouve tes parents ?

Le jeune garçon me regarde avec de grands yeux remplis de larmes, mais aucun son ne sort de sa bouche.

– Niko n’habite pas très loin, je peux t’y emmener.

Je relève la tête vers mon interlocuteur et découvre un jeune homme bien plus grand que les autres. Il est roux, le visage parcourus de tâches de rousseurs et étant agenouillé à ses pieds j'ai l'impression qu'il est immense.

– Je pense que le mieux serait de l'emmener voir un médecin. Il ne s'est pas cassé la cheville, mais je ne voudrais pas prendre le risque quand même.

– I-il n'est pas là. Il est parti.

– Où ça ?

Personne ne me répond, la tristesse se lisant dans les yeux de chacun. Mon cerveau comprend et je ne cherche pas à en savoir plus.

– Bon très bien, emmenez-moi jusqu'à chez lui alors.

Je me relève et prends le jeune blessé dans mes bras pour le remettre sur pied. Un bras sous ses aisselles nous essayons tant bien que mal de nous diriger jusqu'à sa maison.

Le quartier semble inhabité tant les maisons sont dégradées et sales. Mais nous pénétrons dans une cabane remplie de bibelots en tout genre. Bien que ce soit désordonné et sombre, la cabane semble chaleureuse et accueillante. Je dépose le jeune Niko sur un tabouret et demande à mon guide d'aller me chercher de la glace. Je relève pour la seconde fois le pantalon et sa cheville a triplé de volume sur le chemin. Le garçon revient avec un sachet de légumes congelés. Je n'y fais pas attention et le donne à Niko pour qu'il le dépose sur sa cheville.

– Ok, ne t'inquiète pas ce n'est pas bien grave. Je vais juste te demander de maintenir cette poche sur ta cheville afin d’atténuer la douleur pendant que ton ami et moi allons chercher un bandage et des battons solides. On revient vite.

Niko hoche la tête et le rouquin sort immédiatement à la recherche de deux bâtons qui serviront à maintenir la cheville en place. Moi, je fouille à l'arrière de la cabane quelque chose qui pourrait servir de bandage. Bien évidemment les armoires à pharmacie ne courant pas les rues je m'empare d'un foulard traînant sur un vulgaire porte-manteau. Le rouquin et moi arrivons en même temps.

– Maintenant Niko, je veux que tu restes bien fort le temps que je te soigne. Si tu veux tu peux tenir la main de ton ami si tu as vraiment mal, mais il ne faut pas que tu bouges sinon je risque de mal mettre ton bandage. Compris ?

– O-oui, répond-il d'une voix chevrotante.

Je m'empare du deuxième tabouret de libre et m'installe dessus en déposant la jambe du blessé sur mes genoux. Je m'empare ensuite d'un des deux bâtons et le place, bien droit contre la cheville du garçon. Un tressautement parcourt sa jambe, et comme je le lui ai demandé il se force à ne pas bouger plus que ça. Je commence alors à enrouler le foulard. Après deux tours pas trop serrés, je glisse le deuxième bâton et là Niko agrippe férocement son pantalon de sport pour se retenir de pleurer encore une fois. Le rouquin n'ayant pas bougé, je lui demande de bien plaquer les bâtons contre la jambe afin que je puisse enrouler le foulard autour. Il agit sans rechigner et je termine mon travail en attachant comme je le peux autour de son tibia le tissu. C'est la première fois de ma vie que je le fais, mais pas la première que je le vois. Il y a des années, je m'étais foulé le poignet et en attendant le médecin, Marielle m'avait soigné comme ça. L'an dernier ce fut au tour d'un autre patient de se fouler quelque chose, et comme j'étais dans les entourages et que je n'avais rien à faire alors j'ai joué les assistantes. Marielle avait reproduit exactement les mêmes faits et gestes en attendant toujours le médecin. Je dépose la jambe du petit Niko avec délicatesse au sol et lui donne un sourire chaleureux. Le petit se jette immédiatement dans mes bras.

– Qu'est-ce qui te prend ? Je demande en riant.

– Merci beaucoup.

– Mais il n'y a pas de quoi. Tout le monde l'aurait fait s'ils étaient à ma place.

– J'crois pas non, réfute le rouquin.

Niko se dégage de mes bras et me prend la main.

– Comment ça ? Je demande.

– Les riches comme vous n'en ont que faire de nous.

– Les riches comme moi ? Tu veux parler de ceux qui habitent de l'autre côté du marché ?

Niko et le rouquin hochent la tête d'approbation.

– Alors détrompez-vous mes petits gars, car je n'ai strictement rien à voir avec eux. Moi aussi je viens d'un endroit complètement différent et je peux même vous dire que vous avez la chance d'être ici.

– Mais si tu viens d'ailleurs pourquoi tu portes leurs vêtements ?

Je baisse les yeux et reconnais que vestimentairement on est bien différents. Ils ont des habits de sport troués tandis que moi je porte un jean et un tee-shirt flambant neuf. Ce sont les anciens vêtements de Karine et j'ai l'impression qu'ils sortent tous droit d'un magasin.

– Disons que j'ai la mal chance d'être marié à l'un d'eux.

– Si tu es avec eux c'est que forcément tu étais déjà parmi eux. Ici on connaît tout le monde et je ne t'ai jamais vu.

– Ça ne risque pas, je viens de San Armando de l'autre côté de la ville.

– Sérieux ? Demande Niko.

– Et oui.

– Mais t'es pas malade !

Je préfère ne rien dire et sourie encore plus devant tant d'innocence. Le rouquin s'installe sur le tabouret quitté par Niko tandis que le petit grimpe sur mes genoux.

– Au fait comment tu t'appelles ? Demande Niko.

– Lorene.

– Lui c'est mon ami Enzo. Il habite juste en face. Ma maman c'est Armelle elle travaille à la boulangerie.

– Elle doit t'apporter plein de croissant, c'est super ça.

Niko me répond d'un adorable petit sourire. Enzo quant à lui reste sur la défensive.

– Pourquoi t'es là ? Demande-t-il finalement.

– Je fais le tour de la ville, je réponds sans hésiter.

– C'est une drôle d'idée de venir ici, personne ne vient ici. On fait peur comme disent les riches.

– Si vous faites peur, qu'est-ce que je suis alors ? Ils ont peur de moi parce que je suis « folle », je cite en faisant les guillemets avec mes doigts. Crois-moi Enzo, ici vous êtes serein.

– Pourquoi tu restes là-bas alors ? Demande Niko, plein d'innocence.

– Je ne peux pas quitter m-mon... mon mari.

– Tu l'aimes ?

– J'ai cru un moment qu'on était ami. Mais je me suis vite aperçue qu'il était comme les autres.

– Bah alors viens. Moi je veux être ton ami.

Niko est tellement mignon, il est à croquer. Ses petits yeux verts feraient fondre n'importe qui, moi la première. Ses cheveux longs bruns lui glissent sur le front et je les écarte de la main pour les placer derrière l'oreille. Nous trois continuons de discuter encore un moment jusqu'à ce qu'Armelle rentre. Elle fut d'abord surprise en me découvrant, mais quand les deux garçons lui ont expliqué la situation elle m'a encerclée dans ses grands bras en me remerciant une bonne centaine de fois.

– Je devrais rentrer à la maison il commence à se faire tard, je réponds en me mettant à la hauteur de Niko.

– Tu promets de revenir ?

Il me tend son petit doigt, et sans réfléchir lui tends le miens aussi.

– Je te promets mon chou. Je reviendrais le plus tôt possible.

Ses yeux pétillent, son visage s'illumine. J'embrasse la joue de Niko avant de souhaiter une bonne fin de journée à Enzo et Armelle.

En sortant de la cabane, le soleil se couche déjà et le ciel est teinté dans un dégradé d’orange. Il est magnifique, une véritable œuvre d'art. Il est temps pour moi de rentrer à la maison même si l'envie n'y est pas.

© minhox ,
книга «The Book of 23».
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Mémé Paradoxx
Chapitre 7
Trop mignons les petits enfants !!
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2020-12-26 12:25:26
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