Un rayon de soleil passa entre le feuillage de l'arbre auprès duquel je dormais avec mon frère. Il respira fortement et posa sa main sur ma tête. Il me la caressa. Je me redressai, non sans bailler et m’étirer pour reposer juste après ma tête sur son épaule.
_ Tu as bien dormi ? Lui demandai-je, soucieuse parce que j’avais dormi sur lui.
_ Oui tu m’as tenue chaud, plaisanta-t-il.
Je rigolai, lui faisant confiance. Léoni passa devant nous en pouffant de manière exagérée.
_ C’est trop drôle de t’entendre dire ça, se défendit-il. Surtout de te voir jouer le grand frère. Tu es trop mignon.
Thalion ne réagit pas. Ses yeux se posèrent sur moi et il sourit.
_ Normal ! Tu ne m’avais jamais vu avec elle, dit-il en rigolant avant d’être tout à fait sérieux. Mais elle a toujours était ma petite sœur et il est de mon devoir de la protéger contre tout danger.
Il se leva et épousseta ses vêtements avant de terminer.
_ Le froid et les insomnies en font parties.
Il enleva son manteau et me le lança.
_ Tiens. Mets-toi ça. Tu es glacée.
Il partit avec son ami tandis que je me levai et enfilai son beau blouson brun. J’aimais beaucoup cette couleur, elle faisait partie des couleurs de la nature autant que le vert.
La forêt était si belle. Quand j’étais petite j’avais pour habitude d’aller à l’orée de la forêt d’Anglefort qui bordait mon village natal. Je passais beaucoup de temps à écouter les oiseau chanter, le vent murmurer, les arbres danser et observer toute la vie qui s’en échappait. Du haut d’un arbre, je pouvais apercevoir le village dans son ensemble et je guettais le retour de mes parents chaque soir.
J’aimais surtout y aller la nuit, au moment du coucher des parents. Toutes les lumières qui se détachaient de la nuit, l’illuminaient de leur petit éclat pour vivre dans un monde si sombre. Puis à l’heure où la lune atteignait son point le plus haut, les lumières s’éteignaient les unes après les autres laissant, derrière elles, la nuit seulement éclairée par l’astre lumineux.
Je terminai la venue soudaine de mes souvenirs et rejoignit les autres de l’aitre côté du feu. Kay cherchait quelque chose autour d’un arbre. Je m’approchai de lui peu discrètement parce que je trébucha en m’affalant sur le sol sans aucune grâce.
_ Anthéa ! Ça va ?
_ Oui ne t’en fait pas, dis-je avec une grimace sur le visage en me relevant.
Je regardai à l’endroit où il devait normalement y avoir quelque chose, sinon j’étais vraiment maladroite. Mais il n’y avait rien. J’écrasai l’espace vide et mon pied se posa sur un bâton invisible.
_ Qu’est-ce que c’est ? Me dis-je à moi-même.
Je me baissai et attrapai l’objet sous mon pied. C’était comme le manche d’un balai ou un simple bâton mais la différence était que cet outil n’était pas fait de bois et qu’il était beaucoup beaucoup beaucoup plus lourd. J’arrivai à peine à le soulever d’un millimètre mais je le laisser retomber par peur de me blesser.
_ Ma faux ! S’exclama le fantôme en se jetant devant moi.
_ Ta faux ? Répétai-je perdue.
_ Oui. Tu sais l’arme que je transporte, m’expliqua-t-il.
Il murmura quelques mots et un objet apparut juste devant mes yeux. Une grande lame fourchue maintenue sur un manche à balai. Son arme était par terre, à ses pieds.
_ Kay ! C’est dangereux de laisser une arme invisible par terre ! Lança Léoni, furieux.
_ J’ai pas fait exprès. Elle est tombée pendant la nuit. Je l’avais mise contre l’arbre, je te le jure, dit-il en se confondant en excuses.
_ Je te crois, je te crois, c’est bon. Mais fais attention la prochaine fois. Je ne suis pas sûr que Thalion acceptera de soigner Anthéa toutes les deux secondes.
_ Il n’y a pas que moi, bougonnai-je.
_ Tu es la plus maladroite ! Sourit le chevalier en me prenant par les épaules pour m’emmener à mon frère.
_ C’est même pas vrai, grommelait-je une nouvelle fois.
Il rigola de plus belle mais continua à avancer sans me laisser contester davantage. Nous avancions vers Thalion qui rangeait quelques affaires.
_ Thalion chéri ! Ta petite sœur que tu aimes profondément voudrait bien que tu guérisses sa petite entaille, se moqua le grand et preux chevalier.
_ Qu’est-ce que tu es ridicule, s’esclaffa mon frère. Approche Anthéa.
Je m’approchai, poussée par Léoni qui ricana sans grande retenue.
_ Et toi tu peux partir, souffla Thalion.
_ Ça va, je vais y aller, s’excusa-t-il e peur de se faire taper par son ami.
Il partit puis Thalion posa un genoux à terre et appliqua un sort sur mon genou écorché.
_ Tu es tombée ? Me demanda-t-il connaissant déjà très bien la réponse.
_ J’ai trébuché.
Son sort ne dura pas plus de quelques secondes mais je pus apercevoir un cercle lumineux apparaître entre ses doigts. Il tourna dans un sens puis dans un autre et finit par s’éparpiller sur ma peau.
_ Dit Thalion, ça fonctionne vraiment comme ça la magie ?
Il me regarda perturbé par ma question mais leva sa main au niveau de mes yeux.
_ Tes yeux sont magnifiques.
_ Thalion ?
_ Tu vois quelque chose là ?
Il me montra son index posé verticalement au dessus de sa main.
_ Non rien du tout.
Un nouveau cercle apparut mais celui-ci ne tournai pas. Il était fixe et illuminait la main de mon frère.
_ Et là ?
_ Oui, il y a un cercle vert mais lui il est immobile. L’autre tournait.
_ Oui c’est normal. Tu verras ça à l’académie. Tu en avais déjà vu avant ?
Je réfléchis mais il ne me semblait pas en avoir déjà vu. Je secouais la tête et mon frère replaça une nouvelle fois sa main à côté de mes yeux. Ses yeux pétillaient de milles feux. Il semblait émerveillé mais j’étais plutôt heureuse de sa réaction, cela voulait sans doute dire que tout allait bien.
_ Il faut que j’aille parler à Léoni. Tu peux aider Kay à ranger le camp ?
_ Oui bien sûr !
Il se releva et prit un morceau de bois.
_ Au fait tu sais où est ton ami ? Fallon je crois.
_ Non je ne l’ai pas vu mais ne t’inquiète pas il a l’habitude de disparaître. C’est une manie chez lui.
_ Ok... Donc on peut partir sans lui ?
_ Je pense.
Il retourna avec le chevalier et je retournai avec Kay qui faisait des câlins à son arme.
_ Tu as besoin d’aide pour ranger ?
Il leva les yeux puis gêné, toussa et se releva.
_ Non c’est bon il n’y avait presque rien mais il faut tout rapporter en dehors de la forêt.
_ D’accord. Je peux prendre quelque chose ?
_ Si tu veux prendre le sac de Thalion.
Je le pris et l’enfila sur mon dos, il était très léger.
_ Je suis désolé d’avoir laisser traîne mes affaires, murmura-t-il presque assez fort pour s’envoler dans la légère brise qui flânait autour de nous.
_ Ce n’est rien. Regarde je suis comme neuve maintenant ! M’exclamai-je.
_ Quand même, je sais très bien que Léoni doit vous protéger et vous ramener en bon état à la capitale.
_ Une égratignure ce n’est rien mais si tu tiens vraiment à t’excuser alors, c’est bon, c’est fait, souriais-je.
Nous ramassions les dernières affaires éparpillées et éteignions les feu pour être prêt à partir lorsque les garçons auraient finis de discuter. Kay versa une cuve d’eau sur le feu avant de la jeter au centre des cendres restantes.
_ Ils parlent de quoi encore ?
_ Je sais pas vraiment mais Thalion a regardé mes yeux avant de vouloir discuter avec Léoni.
_ Tes yeux ?
_ Oui. Mais tu as dit encore ?
_ Hier soir, quand tu es revenue avec Léoni après avoir discutés, ils sont partis quelques instants mais sont revenus presque immédiatement.
_ Oh... J’en ai marre qu’ils disent des choses dans mon dos, soupirai-je. Au fait, tu connais la magie toi aussi non ?
Il acquiesça d’un signe de tête et je continuai.
_ Tu pourrais m’apprendre quelques sorts ?
_ Je veux bien mais tu veux commencer pas quoi ?
Un immense sourire naquit sur mon visage et je sautai au cou du fantôme mais bien sûr je ne l’attrapai pas et traversai son corps.
_ Désolé, je suis automatiquement intangible.
_ C’est pas grave. J’oublie facilement que tu n’as pas vraiment de corps physique.
_ Bref du coup ?
_ Je pensai à un sort de soin basique et un de protection si possible, expliquai-je en faisant des mouvements avec les mains pour expliquer la chose, c’était plutôt ridicule.
_ J’en connais des simples et rapides mais qui demandent une bonne concentration. Tu penses pouvoir y arriver ?
_ Oui !
_ Très bien alors positionne tes mains comme moi.
Il plaça ses mains, paumes en avant, l’une sur l’autre les doigts en décalés, puis tendit ses bras loin devant lui.
_ Plus tu tendras tes bras, plus le diamètre de ton bouclier sera grand. Mais demandera aussi plus d’énergie.
Je fis pareil et plia mes bras.
_ Très bien. Ensuite il faut réciter l’incantation. Répètes après moi. Aouil plodiov.
Un reflet bleu partant de ses mains, se dispersa autour de lui en une bulle parfaite. Une fois la bulle remplie, elle disparut.
_ Lance un bâton.
Je ramassai un bout de bois et le jetai sur lui. Il se décomposa en entrant dans le bouclier créer par Kay.
_ C’est trop bien !
Je me replaçai et prononçai les mots.
_ Aouil plodiov ?
Rien ne se passa. Je répétai encore une fois mais toujours rien.
_ Mets-y plus de conviction. Pour réussir un sort il faut croire en son utilisation, sa réussite et son existence.
_ Son existence ?
_ Tu vois cette forêt, tu sais qu’elle existe parce que tu la vois et que tu peux là toucher. Mais si elle est invisible, es-tu sûre de son existence ?
_ Non.
_ C’est pareil avec la magie. Si ça peut t’aider, imagine une bulle de protection autour de toi et récites la formule.
_ D’accord. Je réessaie.
Je fermai les yeux en me concentrant sur une image de moi entourée par ce bouclier. Je répétai les mots qu’avait dit Kay. Une légère brise fraîche partit de mes mains, je rouvris les yeux et admirais bouche bée ce spectacle.
Le même reflet bleu se dispersa autour de moi. C’était magnifique. Kay jeta un bout de bois sur moi et celui-ci rebondit sur la parois devenue, à présent, invisible.
_ Ce n’était pas censé se décomposer ? Demandai-je peu sûre d’avoir réussi.
_ Pas forcément. La magie prend des formes différentes selon les personnes. Toi tu préfères ne pas faire de mal donc ton bouclier a simplement repoussé l’attaque. Tandis que moi j’élimine mes adversaires.
_ Donc elle change selon l’invocateur, c’est bien ça ?
_ Exact. Tu es vraiment douée pour une débutante, me complimenta-t-il.
_ Merci mais il faut que j’y arrive sans fermer les yeux.
_ Ne t’inquiète pas. Généralement ça vient avec l’expérience.
J’acquiesçai et désactivai mon sort encore trop heureuse d’avoir réussi.
_ Ensuite un sort de soin c’était bien ça ?
_ Oui.
_ Celui-là est plutôt simple. Tu as un couteau ?
Je sortis les petit couteau de Léoni et lui passai.
_ C’est une incantation simple pour les petites coupures.
Il entailla son avant-bras et plaça sa main au dessus. Il écarta les doigts et je vis à nouveau le cercle. Vert. Il était immobile.
_ Maintenant la formule. Fél kolé.
Le cercle tourna à droite puis à gauche et s’arrêta pour se dissiper et fondre dans la blessure de mon ami qui se referma au contact des étincelles de magie.
_ C’est fabuleux... murmurai-je, vraiment éblouie par la magie.
Je recopiai ses gestes. Je me coupai légèrement, non sans grimacer avant, et plaçai ma main droite au dessus.
_ Fél kolé.
Le cercle apparut mais ne fit rien. Je le regardai en incompréhension totale.
_ Tu as imaginé la coupure refermée avant de dire la formule ?
_ Oui.
_ Dans ce cas là, essaie plutôt de placer ta main ainsi.
Il étendit sa main de tout son long puis plia un peu ses doigts.
_ Comme je te l’ai dit tout à l’heure, plus tes membres sont étendus plus ça consomme de l’énergie magique. Pour une toute petite entaille comme celle-là, il vaut mieux utiliser le moins d’énergie.
Je réitérais le tout en pliant le bout de mes doigts.
_ Fél kolé.
Le cercle magique se mit à tourner puis disparut dans ma blessure qui se referma.
_ Quand on commence à peine à manipuler les énergies magiques, nous ne pouvons en consommer qu’une infime partie. C’est pour ça que lorsque tu as étendu tous tes doigts tout à l’heure ça n’a pas marché. Tu as voulu utiliser une trop grande énergie.
_ Je comprends mieux. Et peut-on utiliser la magie dans n’importe quelle position ?
_ Oui. Mais je ne t’apprendrai pas à le faire. C’est trop dangereux et de toute façon tu verras ça dans très peu de temps.
_ Dommage.
Je m’assis et m’entrainai à utiliser le bouclier. C’était vraiment génial la magie ! Et je n’avais encore presque rien appris.