Siflora est quelque part dans son monde, devant de multiples voiles immobiles en l’air. De petites créatures observent un voile chacun, Siflora les surveille et regarde certains de ces voiles attentivement. Ces écrans d’un autre monde projettent des scènes, différentes scènes plus ou moins irréalistes.

Elle sourit en les voyant.

« Que de beau rêves, les êtres vivants sont si créatifs… »

Un chat rêvant d’une souris qu’il parvient à attraper, des scientifiques réussissant à trouver un vaccin contre des virus mortels… Il y’en a pour tous les goûts ! Les voiles ne concernent pas que les humains, mais tous les individus capables de rêver : les animaux de compagnies comme les chiens ou chats par exemple, les chevaux… Tous les animaux à sang chaud !

L’esprit s’arrête devant un voile en particulier. Une once de mélancolie l’accapare, une petite larme quasiment invisible coule en traversant sa joue pour arriver jusqu’à son menton et tomber. Dans ce voile, elle observe un jeune homme marcher joyeusement en quittant un hôpital. Elle arque un sourire, lâchant un petit rire.

« Quelle belle aventure c’était, tu nous as fait peur Jacob… »

La créature qui surveille le voile regarde Siflora avec de doux yeux remplis de tristesse pour elle, alors que cette dernière s’en va vers un autre voile.

Ce voile est différent des autres, un cauchemar semble s’y dérouler et la créature qui le surveille panique ne sachant pas quoi faire. Siflora s’approche, analysant le rêve et son propriétaire. Elle regarde la créature et la rassure.

« Tu n’as pas besoin d’intervenir, cette personne n’a pas fait de bons actes, laissons aux Koïkelis l’avantage. »

Les Koïkelis sont les versions cauchemardesques des petites créatures travaillant avec Siflora : les Joulinies.

Il y’a énormément de voile à surveiller que Siflora ne peut faire tout ce travail seule, il est tout naturel qu’elle soit aidée.

Elle continue son travail en se posant devant un voile non surveillé, alors qu’un oiseau messagers arrive et lui donne un rouleau. Elle ne l’ouvre pas encore, trop occupée à surveiller ce qui se passe dans le voile.

L’une de ses créatures combat un Koïkelis.

Quand il y’a un litige sur le type de rêve que la personne mérite, l’on se départage dans un combat. Ils se combattent à l’abri des regards et selon qui a l’avantage, le rêve reste tel quel ou se transforme en cauchemar. Si le Koïkelis gagne, le rêve deviend un cauchemar jusqu’à ce que la personne se réveille.

Il n’y a aucune honte à perdre et aucune fierté de gagner. L’objectif des deux camps est aussi de maintenir un ordre dans le pourcentage de rêve ou de cauchemars, ni l’un ni l’autre doit avoir un pourcentage de plus de quatre-vingts pourcents, et encore les gardiens pensent qu’il serait nécessaire de baisser le pourcentage.

Actuellement les cauchemars ont un pourcentage de présences chez les individus endormis de soixante-neuf pourcent et encore il est assez variable : les oiseaux à priori ne rêvent que quelques secondes, et il y’a des différences d’horaire sur la Terre.

L’oiseau messager picore gentiment Siflora pour la faire réagir. L’esprit souffle silencieusement puis ouvre le rouleau. Sa bouche est entrouverte, signe d’une surprise.

« Mais quelle bonne nouvelle ! Préviens Xanto que l’heure des retrouvailles vient de s’avancer !»

Elle sait qu’il est du genre à ne pas lire les rouleaux qu’on lui envoie, les laissant prendre la poussière.

Elle tapote l’oiseau messager qui se renvole. Une fois l’animal en plume parti, elle s’éloigne des voiles. Au fur et à mesure une porte finit par apparaître non loin, l’esprit s’y dirige puis l’ouvre et la referme derrière elle se retrouvant dans une immense salle. Siflora sort de cette salle puis se rend vers une pièce, traversant de longs et larges couloirs.

Les murs et le sol de cette nouvelle salle sont de couleurs plutôt tristes, des nuances de gris partout alors que les couloirs paraissaient plus vivants avec leur bleu glacial et l’effet cristallisé. Les murs sont décorés de gravures représentant des divinités, dont elle et ses sœurs, et le sol pourvu d’ornement type du XVIIIème siècle humain faisant une texture plutôt bizarre, quand on marche dessus, mais original. Un grand miroir, éclairé par une faible lueur, se trouve au milieu de la pièce.

Elle ne fait qu’un pas dans la salle que des flammes bleues s’allument aux murs. Elle se rapproche du miroir, ses pas sont marqués par une luminescence au sol qui disparait après quelques secondes, et s’arrête devant l’objet un instant. Inspirant un bon coup, la gardienne des rêves avance son pied vers l’objet traversant le verre en laissant des ondulations puis se pose sur le sol de l’autre côté. Elle entraine le reste de son corps pour traverser totalement le miroir se retrouvant dans le sanctuaire.

Siflora reste seule quelques minutes avant que Xanto pointe le bout de son nez.

« J’espère que tu as une bonne raison de m’avoir fait venir plus tôt ma gazelle !

-Déjà Speecosing qui me donne un surnom, et maintenant toi ! Mais vous avez quoi à la fin ?!

-Attend quoi ?! Il t’a appelé comment ? C’était chez Mamie Madeleine ?! »

Elle soupire lourdement avant de lui répondre en grognant.

« Oui. Et il m’a appelé ‘’Ma mignonne’’, tu ne m’as pas entendu crier contre lui à propos de ça ?

-Non, mais j’vais le fracasser la prochaine fois qu’on se reverra !»

Elle soupire lourdement, n’aimant pas trop quand il prend cet air-là. Elle sait se défendre et ce n’est pas un bébé dragon qui va faire tourner la balance.

Ils attendent le groupe dans une atmosphère tendue, qui arrive une trentaine de minutes plus tard.

Siflora tape des mains, avant que l’un d’eux ne dise quoi que ce soit.

« J’ai une excellente nouvelle à vous annoncer ! »

Tous les yeux sont rivés vers elle, attendant qu’elle continue

« Il se peut que l’on ait localisé un potentiel terrain où se trouverait le monde des Spectres ! »

Leurs yeux se remplissent d’espoir. Ils pourront enfin y aller et récupérer Mumu ! Saine et sauve ! Enfin ils l’espèrent, ils ne savent pas les supplices qu’elle aurait pu traverser en plus d’une semaine… Cela fait quand même un certain temps qu’elle a été enlevée !

« Cependant, continue Siflora, il faudra non seulement récupérer Mumu mais nous devons profiter de ce premier allé pour les mettre hors d’état de nuire. Nous n’avons qu’une seule chance de réussir les deux objectifs. Bien sûr nous aurons l’aide des anges et des démons mais je devais vous prévenir.

-Nous ne pouvons vraiment pas nous focaliser une première fois sur Mumu, demande Simon, puis une deuxième fois sur ce groupe ?

-Clan, rectifie l’esprit féminin avant de répondre, non car le temps que nous revenons sur leur territoire après vous avoir ramené ils auront certainement changé de stratégie de défense et d’attaque. Déjà qu’ils doivent être bien renforcé en termes d’attaque, car après tout ils veulent en priorité Fumigène. Et c’est nous qui l’amènerons à leur territoire. »

Elle regarde les serpents qui restent de marbre, ils n’ont absolument pas peur de faire face à la mort se serait déjà ridicule et illogique venant d’eux.

« Nous partons quand ? Demande Kévin

-Mainte… »

La porte du sanctuaire s’ouvre. En l’entendant, tout le monde regarde le couloir se préparant à attaquer l’individu, s’il est offensif, qui vient de pénétrer l’endroit sacré. Puis tout le monde se détend en remarquant qui vient d’arriver.

« Mamie Madeleine, s’exclame Xanto !

-Vous pensiez pouvoir partir sans moi ? »

Elle leur sourit joyeusement en leur montrant le parchemin, le même que Siflora a reçu.

« J’ai réussi à trouver la formule, mais il faut que Mumu soit dans les parages sinon il n’aura aucune efficacité ! Tant de travaille pour finalement quelque chose de bête, je me sens si…

-Très bien, répond Siflora en la coupant, suivez-moi maintenant. Il faut aller au point de rendez-vous. »

Elle ouvre la marche, guidant ses camarades hors du sanctuaire. Ils marchent en direction de la grande place où la statue d’un jeune homme y est érigée. Les rues sont vides, comme d’habitude, et les maisons n’émettent aucune lumière. On dirait une ville morte, pourtant il y’a bien des milliers de personnes qui vivent dans cette immense ville.

Xanto regarde la statue, puis Siflora, se remémorant de beaux et mauvais souvenirs.

« Nous devons attendre qui ? Demande Jimmy

-Les soldats angélique et démoniaque, avec les généraux et les Maîtres respectifs… »

Il n’a pas fallu longtemps pour que des bruits de pas et de métal font écho. Non loin des silhouettes s’approchent. Les humains, sauf Simon, sont ébahis par ceux qui leur font face et n'en croient pas leurs yeux. Madeleine rit en les voyant et Hearesed reste sans expression apparente.

« Des démons, chuchote Kévin, et des anges… C’est bien la première fois que j’en vois de mes propres yeux. D’ailleurs comment cela se fait-il qu’on les voie ? Si chez Madeleine on…

-Les soldats, répond Siflora, les gardiens et les Maitres sont capables de manipuler cette capacité à se rendre visibles ou invisibles aux yeux des humains. Cela ne s’apprend pas du jours au lendemain, il faut plusieurs centaines d’années aux meilleurs pour contrôler cette capacité.

-Et vous, demande Molty, vous avez pris combien de temps pour ça ? »

Elle ne lui répond pas arborant une expression gênée alors que Xanto rit, s’il savait tout.

Dirigés par des voix autoritaires les soldats s’arrêtent devant eux. Les Maitres et les généraux s’avancent un peu plus.

Le petit groupe d’humain se sent assez mal face à eux. Ils sont si imposants et intimidants avec leur attirail que cela les rend mal à l’aise. Jimmy se cache derrière Molty qui recule un peu plus comparé à Kévin. L’adulte et Simon sont les seuls humains qui ne bougent pas de leur place.

Une étrange sensation parcourt l’adolescent, ses jambes tremblent et menacent de lâcher. Quelque chose en lui a peur, méprise, de ces nouvelles têtes, mais il en faut plus pour réussir à le faire bouger.

Hearesed s’en fou de leur présence. Les serpents s’avancent à leur tour faisant face aux Maitres et généraux.

« Mes pauvres, marmonne la Maitre des Démons

-Que voulez-vous, répond le serpent aux yeux bleu, la volonté en a décidé ainsi. »

Les Maitres et généraux regardent le reste du groupe et notamment les humains. Le Maitre des Anges reconnait Simon mais il remarque bien qu’il n’est pas très content de le voir, enfin de voir les autres anges étant donné qu’ils ne se sont jamais croisés. Simon reconnait certains anges du groupement, qui apparaissent dans certains de ses anciens souvenirs, mais eux ne semblent pas se souvenir de lui.

Asthan, le Maitre des Anges, regarde les humains avec compassion

« Il n’y a aucune raison d’avoir peur, nous sommes là pour vous aider aussi après tout.

-On a été rapidement mis au courant de la situation actuelle, dit Rizine la Maitre des Démons, et croyez nous qu’on va en finir avec cette situation une bonne fois pour toute ! »

Des regards s’échangent dans le groupe, ils ne sont pas plus mis en confiance. Ce n’est pas tous les jours que des anges et démons se tiennent devant eux, et ils ne dégagent pas la même aura que Siflora et Xanto. Ils semblent tout autant sur les nerfs.

Le général des démons, s’avance d’un pas et déclare

« Je sais le mal que ça fait de perdre une personne qui nous est chère et je vous assure que je ferai tout pour vous aider à récupérer votre amie.

-Merci. »

Simon était sincère dans son remerciement. En revanche sa voix n’a pas tant porté dans l’espace, cela n’a pas empêcher le général de l’avoir entendu. Ce dernier arque un léger sourire avant de le faire disparaitre.

L’adolescent regarde ses congénères, remarquant qu’ils se détendent pour la plupart quite à l’échange qu’il a eu avec le démon. Siflora et Xanto leurs sourient pour leur donner du courage.

Ils se mettent tous d’accord sur la stratégie à adopter lors de cette intervention. Tout doit être parfaitement au point, ils ne peuvent pas se permettre la moindre erreur.

D’un point de vue, le monde des Spectres doit être conçu de la même manière que les deux autres mondes à savoir une tour principale qui regroupe des secteurs d’activités jugés importants et qui serait un bon lieu pour détenir des prisonniers. Ils doivent réussir à s’introduire dans cette tour et trouver Mumu, et s’ils la trouvent il y’a de grande chance qu’ils tomberont nez à nez avec le Maitre des Spectres.

Cependant ils doivent prendre en considération que le Maitre des Spectres les attend avec une petite surprise à la clé, après tout lui aussi doit avoir un plan s’il a enlevé Mumu.

Les Maitres s’approchent des jeunes et de l’adulte et leurs met au cou un collier avec une pierre en guise de pendeloque.

« Ce collier vous permettra de survivre lors du voyage, explique la Maitresse des Démons avec un grand sourire.

-Comment ça ? Panique Jimmy. Survivre pendant le voyage ?! On n’a pas signé pour mourir durant le voyage !»

Mais aucune réponse lui est donnée, alors qu’il se fait attraper au col par une créature pourvue d’ailes. La chimère le dépose sur son dos puis se baisse, ainsi qu’une de ces ailes, pour que les autres puissent monter. Kévin, Molty sont assez réticent à monter sur le dos, tandis que Simon, les serpents et Hearesed rejoignent Jimmy.

« Allez montez ! »

Ils se regardent, Mamie Madeleine tapote leurs épaules, puis finissent par monter sur le dos de la créature.

Ils sont encore stressés de monter sur le dos d’un tel être vivant, par peur de le gêner ou même de lui faire mal d’une quelconque manière. Mamie Madeleine les suit toute souriante, comme d’habitude.

Tous s’envolent direction une terre qui leur est totalement inconnue, mais quelque chose surprend bien Simon, Jimmy, Kévin et Molty : la créature, les anges et les démons montent bien haut. Même beaucoup trop haut. Jimmy a bien du mal à se tenir à cause de la force du vent, mais pas au point de lâcher. Kévin et Hearesed attrapent fermement les poils de la créature. Molty s’accroche bien à Simon et ce dernier s’accroche bien à l’une des antennes dorsales de la créature, ce qui ne semble pas la déranger. Mamie Madeleine s’éclate, les mains bien en l’air elle rigole de l’ascension fulgurante de la créature dans le ciel. Elle ne semble pas perturbée par la force d’attraction de la planète, comme si elle en était libérée.

Ils s’envolent encore plus haut dans le ciel, qu’il en devient presque noir. Ils comprennent enfin vers où ils volent…

« Mais c’est l’espace ! »

Siflora, qui vole à côté d’eux, confirme de la tête ce que Kévin vient de dire. Oui, ils s’envolent direction l’espace, et c’est pour cela que les colliers leur seront bien utiles.

« Grâce à vos colliers vous pourrez survivre dans l’espace, vous ne mourrez ni asphyxiés ni de froid ! »

Ils quittent rapidement l’atmosphère terrestre pour se retrouver dans l’immensité noire de l’espace, peuplée d’étoiles et d’autres objets célestes à tout va. Leur apparence semble changer petit à petit, ils semblent briller.

Intrigué par ce phénomène le petit groupe de mortel regarde tout autour d’eux, les autres individus ont aussi leur apparence de changé, parfois légèrement au niveau des couleurs mais eux aussi sont empli de paillettes. Brillants de mille feux avec les rayons perdus du soleil le plus proche, et grâce à leur nombre important ils laissent une petite trainée lumineuse derrière eux, comme des étoiles filantes…

Ce qui s’apparente à un magnifique moment pour les humains, ou ceux n’étant pas habitués, s’apparente pour d’autre à une routine. Ils profitent de ce spectacle, hypnotisant leurs yeux par ces douces lumières. Ils savourent tout cela pour se détendre et se laissent bercer par les belles lueurs de ces paillettes.

Après tout, la réalité allait bientôt les rattraper…